source : journal solidaritéS, n°148
28 mai 2009

L’étude publiée par les bureaux de l’égalité romands « Quand le travail coûte plus qu’il ne rapporte » a fait grand bruit et commence de produire ses effets. Le gouvernement jurassien a présenté un avant-projet de loi qui prévoit un tarif de crèche de dix francs par jour, quel que soit le revenu des parents. Pour garantir la couverture des coûts d’une crèche, le canton et les communes continueraient de participer au financement à hauteur de 74% et pour le compléter est prévu un prélèvement sur les salaires de 0.07% pour l’employeur et idem pour le salarié (cela représente 3.50 par mois pour un salaire de 5000.-) qui devrait donner droit à un bon d’accueil d’une valeur de 16 francs par jour où l’enfant est à la crèche. Mais attention, il y a des conditions. Les deux parents (si deux parents il y a) doivent travailler dans une entreprise du canton du Jura: exit les chômeurs et chômeuses, les personnes à l’aide sociale et celles qui n’ont trouvé un emploi qu’à l’extérieur du canton.

 

 

La proposition reste intéressante pour les parents qui sont dans la cible, mais ce n’est qu’un avant-projet, et il faut bien voir qu’il ne suffit pas d’un prix attractif pour résoudre tous les problèmes : un coût raisonnable est une chose, encore faut-il assez de places. Un tarif très attractif va augmenter l’intérêt, mais pas les places disponibles ! Or dans toutes les régions en Suisse, le manque de places est criant et le canton du Jura ne fait pas exception. Sera-t-il prêt à augmenter son budget pour répondre à la demande ?

 

Sur le fonds la proposition jurassienne s’approche de ce que nous revendiquons : la gratuité de l’accueil et de l’éducation, de la crèche jusqu’aux universités. Elle abandonne le principe du tarif en fonction du revenu, mais nous estimons que l’éducation, quel que soit son niveau, doit être gratuite pour chaque enfant. C’est la fiscalité qui doit faire que les plus hauts revenus participent davantage au financement de l’Etat.

 

Dans le canton de Neuchâtel, une initiative cantonale « un enfant une place » est déposée depuis deux ans. Elle demande une place en structure d’accueil pour tous les enfants, dès leur naissance et jusqu’à la fin de la scolarité obligatoire, donc l’ouverture de nouvelles crèches pour répondre à la demande. A quand la votation populaire ? Face à l’urgence, largement reconnue dans le canton de Neuchâtel (amplement sous-doté en crèches et structures d’accueil), le Parlement devrait prendre les devants et promulguer une loi en s’inspirant du modèle jurassien, mais en l’élargissant dans le sens de l’initiative neuchâteloise : tout enfant doit avoir le droit de trouver une place si ses parents le souhaitent –y compris les chômeuses et chômeurs ou les personnes qui se trouvent à l’aide sociale. Un tel projet serait non seulement la meilleure façon de concevoir, dès le plus âge, une socialisation bienvenue des enfants, quels que soient leur origine et leur milieu, mais participerait aussi à la création d’emplois et de places d’apprentissage nécessaires en cette période de crise. C’est ce que nous allons proposer au Grand Conseil.

 

Marianne Ebel et François Konrad