PRISE DE POSITION DE SOLIDARITES NE

Finalement, à l’approche des élections nationales, le Conseil Fédéral s’est lui aussi mis à la stratégie des effets d’annonce. Deux milliards pour l’industrie d’exportation et le tourisme, ce n’est pas rien, mais malheureusement cet argent finira probablement par retomber dans les poches des actionnaires. Une chose est sûre, cela ne changera en rien le cours de la crise financière et ne résoudra pas les causes endémiques de la précarisation générale du travail.

 

La Suisse, bon élève de l’économie mondiale ?

On a beaucoup entendu se plaindre tous les dirigeants helvétiques : « Nous avons géré avec efficacité et parcimonie notre pays, nous avons fait tout juste, et maintenant nous sommes injustement pénalisés par l’envolée du franc ». Hypocrites ! Vous avez fait de la Suisse un paradis fiscal pour fortunés du monde entier : ici les impôts sur le bénéfice des entreprises sont parmi les plus bas du monde, l’impôt sur la fortune idem, le secret bancaire est défendu avec acharnement ; tous ces éléments ont contribué à stabiliser les finances publiques helvétiques, mais cela s’est fait sur le dos du reste du monde qui a vu des impôts lui échapper et filer en Suisse.

Le coeur de la crise, c’est l’invraisemblable augmentation des inégalités depuis le tournant néo-libéral des années 1980. Face à l’augmentation scandaleuse des cours boursiers, les possédants jubilaient; aujourd’hui, alors que les bourses restent dans une logique très favorable au capital, ils pleurent parce qu’elles ont un peu chuté.

 

Les fortunés ne paient pas assez d’impôts

Le tournant néo-libéral des années 80 a combiné l’ouverture des frontières pour les capitaux et la baisse d’imposition des bénéfices et des fortunes. C’était le rêve de s’enrichir en dormant. Il a été rendu possible par le consensus global entre les partis bourgeois et les socialistes convertis au libéralisme qui, dans chaque pays se sont efforcés de garder et d’attirer les entreprises et les fortunes en baissant leurs impôts.

Les dirigeants européens nous parlent aujourd’hui d’une règle d’or dans la gestion de l’Etat pour justifier leurs politiques d’austérité. Si règle d’or pour sortir de la crise il y avait, ce serait au contraire augmenter significativement les impôts sur le bénéfice, les fortunes et les hauts revenus et améliorer la situation sociale de la majorité de la population.

 

 

Où nous mèneront le Conseil Fédéral et les partis qui y participent ?

La doctrine officielle a été jusqu’à aujourd’hui d’améliorer les conditions cadres de l’économie, ce qui, traduit en français, veut dire baisser les impôts sur le bénéfice des entreprises et sur les riches, mais aussi ouvrir les vannes des privatisations, des délocalisations et des concentrations d’entreprises en monopoles. Cette politique jouit d’un large consensus, du PS à l’UDC ; on l’a encore vu dans le canton de Neuchâtel avec la réforme de la fiscalité. La montée relative de la valeur du franc et l’approche des élections nationales poussent le monde politique à s’agiter, mais il reste guidé par le vain espoir que la Suisse s’en sortira en attirant les richesses et les riches pendant que les autres s’enfoncent. Les propositions d’arrimage du franc à l’euro, de taux de change fixe ou d’intérêts négatifs ne sont que l’expression de l’impuissance à agir en restant dans le cadre du capitalisme néo-libéral. Le parti socialiste a décidé, avec les évangélistes, du lancement d’une initiative visant à taxer d’un impôt national de 20% les successions en ligne directe, supérieures à 2 millions. Nous en sommes ravis, mais nous craignons fort que cela ne soit qu’une opération à courte vue électorale, car l’impôt sur les successions, qui est un impôt cantonal, a été abaissé à presque rien dans tous les cantons, souvent avec la participation active du Parti socialiste.

 

Toute aide doit être payée par ceux qui ont bénéficié des largesses de l’Etat

Ce n’est pas au peuple de venir une nouvelle fois au secours des plus favorisés. La crise est certes mondiale et les marges de manœuvre de la Suisse sont très limitées, mais pour commencer, toute aide à des entreprises et à des secteurs doit être payée par ceux qui ont bénéficié outrageusement de la politique de l’Etat de ces trente dernières années. Le montant de deux milliards annoncé par le Conseil Fédéral doit être financé par le bénéfice des entreprises, les grandes fortunes et les spéculateurs. Nous avons assez payé !

 

Comment limiter les pots cassés ?

La crise financière va durer. Nous devons agir partout là où nous sommes. Notre but n’est pas de sauver le capitalisme, mais de défendre le monde du travail et la cohésion sociale. C’est pourquoi nous proposons les grandes orientations suivantes :

 

  • augmentation de l’imposition du bénéfice des entreprises jusqu’à des standards internationaux (union européenne)

  • imposition des grandes fortunes, des hauts revenus et des successions identique à celle des pays qui nous entourent pour en finir avec les détournements de capitaux

  • impôt sur les transactions financières et opérations de change pour bloquer la spéculation

  • interdiction des licenciements dans les entreprises qui font des bénéfices

  • introduction d’un salaire minimum garanti de 4000.- nets, pour en finir avec des salaires de misère qui ne permettent pas de vivre

  • soutien à la recherche, aux PME et à la création d’entreprises issues des compétences locales pour favoriser l’emploi

  • toute aide aux entreprises doit être financée parun impôt sur le bénéfice et les transactions financières

  • toute aide à une entreprise doit être conditionnée à l’application d’une convention collective de travail, à l’ouverture de sa comptabilité à l’Etat, aux syndicats et aux représentants du personnel

 

Ces exigences forment un tout, et ce n’est malheureusement pas demain que nous en verrons la mise en vigueur dans les parlements suisse et européen. La crise sera sans doute longue, conduisant à la précarité la majorité des salariés, et particulièrement les femmes, fortemement représentées dans les secteurs les plus menacés du service public, la santé et la formation. Il faut sortir du capitalisme, mais cela ne pourra se faire sans une réeelle prise de conscience d’un nécessaire partage et un large mouvement social. SolidaritéS défend l’idée que les grandes banques doivent être placées sous contrôle public et que l’économie doit être orientée vers les besoins sociaux et écologiques pour un meilleur équilibre et une plus juste répartition des richesses.