Derrière la colline, un monde à sauver

La colline du Mormont à Eclépens dans le Nord-vaudois est démembrée petit à petit par une cimenterie de Holcim. Des militant·e·s tentent de stopper le désastre.

Un chamois devant la cimenterie de Holcim à Eclépens, Suisse
Capture d‘écran du film d’Alexandre Salama ↗.

Le Mormont a été classé à l’Inventaire fédéral des paysages d’importance nationale en raison de sa richesse biologique. C’est un petit coin de nature relativement préservé où l’on trouve pas moins de 200 espèces de plantes et plusieurs espèces d’animaux rares et protégés.

La carrière de calcaire d’Eclépens est exploitée depuis 1953. Depuis 1990 l’extraction s’est accélérée, entaillant fortement la colline. Holcim, filiale de la multinationale LafargeHolcim (2,2 milliards de francs de bénéfice en 2019), qui exploite cette carrière prévoit de détruire la moitié du Mormont d’ici 2070.

Depuis 2014, l’Association pour la sauvegarde du Mormont (ASM ↗︎) lutte contre cette destruction par la voie juridique. Une première victoire en 2018 au Tribunal cantonal contre un plan très lacunaire d’extension de la carrière avait donné un peu d’espoir aux défenseurs·euses de la nature. C’était sans compter la contre-attaque du gouvernement vaudois – le même qui vante son «amibiteux» Plan climat – qui a mis en consultation un plan très similaire auquel l’ASM s’était opposée puis a été déboutée. En juillet de cette année, des membres de l’ASM et trois ONG ont fait recours au Tribunal fédéral.

C’est pour appuyer ce combat que la Zone à défendre (ZAD) de la Colline ↗︎ s’est établie le 17 octobre aux abords de la carrière d’Eclépens. La quarantaine de zadistes des «Orchidées contre béton armé», nom choisi en référence aux 16 espèces rares de cette fleur qui y poussent, veulent alerter sur l’urgence de s’opposer au projet de la multinationale. Féministes, antiracistes, antispécistes et anticapitalistes, ils·elles organisent visites, conférences, rencontres et concerts et tissent des liens avec la population locale. Notre camarade Alexandre Salama a tourné un beau petit reportage sur place ↗︎.

Agir local, penser mondial

Cette lutte qui apparaît locale vise bien plus que la défense d’un petit coin de nature. Ce n’est pas une lutte « Not in my backyard » (« pas dans mon jardin »), elle vise bien l’industrie du béton. Car le calcaire extrait devient du béton, après un passage à 1500 °C. L’industrie du béton émet énormément de CO₂ et le site d’Eclépens est le sixième plus gros émetteur de Suisse.
En mars 2020, la Grève du climat envoyait une lettre ouverte ↗︎ aux dirigeant·e·s d’Holcim pour dénoncer les effets néfastes du bétonnage, et en plaidant pour une sortie du béton. Utiliser des matériaux de construction alternatifs (bois, paille, terre…) locaux et recycler les matériaux de construction est impératif pour contenir le réchauffement climatique sous la barre des 1,5° C.
Notre député Hadrien Buclin a interpellé le gouvernement mardi 28 octobre : « N’est-il par encore temps pour le Conseil d’État de se montrer cohérent par rapport aux objectifs de son Plan climat de revoir sa décision concernant l’extension de la carrière de Holcim ? ».

Niels Wehrspann