Lausanne : Une tour symbole du pouvoir des affairistes
Dans le cadre du projet Beaulieu 2020, la Municipalité de Lausanne présente au vote du législatif un préavis portant sur la construction d’une tour – la tour Taoua – de 85 m de haut comprenant 27 étages.
Un enjeu urbanistique majeur pour l’aménagement de l’espace urbain. Ce projet suscite de nombreuses oppositions, dont celle du groupe La Gauche (POP et solidaritéS). Le débat au Conseil communal est prévu le 13 septembre prochain. S’il devait accepter ce préavis, un vote populaire aura certainement lieu.
Une tour emblématique du pouvoir de l’argent
27 étages dont le programme comporte 5 étages « Hôtel Business », 5 étages « Appart-Hôtel », 5 étages « Bureau et Business Center », 2 étages « activité », 1 étage « technique & accès public », 1 étage « accès tour » et 8 étages logement. Les investisseurs, Losinger SA, ont annoncé que les logements annoncés sont « de standing », « en PPE ». Sur les 24 008 m2 de surface plancher prévus dans la tour, plus de la moitié de la surface, soit 13 338 m2 sont prévus pour « Hôtel Business, Appart-Hôtel et Bureau et Business Center », les logements de standing occupant 7 114 m2. Sans conteste, l’affectation des surfaces de la tour, vu le prix du m2, sera réservée à des activités à haut rendement. La « densification » de la cité, que constituerait sa construction, se fait au profit des privilégié·e·s. Vu le prix de vente des logements, ceux-ci constitueront avant tout une forme d’investissements pour leurs acheteurs·euses, qui les loueront à des loyers prohibitifs. Pour les mêmes raisons, les petits commerces de quartier n’auront évidemment pas les moyens de louer des surfaces réservées aux activités commerciales.
Faire passer ce projet à la hussarde !
La Municipalité veut faire adopter le projet de la tour Taoua sans une discussion préalable indispensable, portant sur le bien-fondé d’implanter des immeubles hauts à Lausanne et surtout dans quels périmètres, avec quels objectifs, et avec quelles mesures compensatoires par rapport à l’impact du projet sur les transports, l’environnement et l’aménagements des quartiers concernés. Or, pour prendre une décision de ce type, il est absolument nécessaire de proposer préalablement certains critères, d’en débattre démocratiquement et publiquement. Il faut adopter un concept d’ensemble, avec des principes, car l’opportunité ou non de construire des tours est une question urbanistique importante. Le territoire de la ville est en pente, exposé à la vue et marque le paysage du Léman, qui a une grande valeur, et pas seulement du côté de Lavaux ! Il s’agira de faire les choix d’emplacements et de constructions correspondant à ces critères. Une telle étude permet d’apprécier, à l’aune de critères comme celui de l’intérêt public poursuivi, si le projet de tour Taoua est pertinent.
Augmentation des nuisances par l’accroissement du trafic, de la pollution et du bruit
Un trafic automobile supplémentaire dans tous les quartiers environnant Beaulieu sera inévitablement généré par la densification prévue du programme des manifestations organisées sur le site et par l’impact de la construction de la tour et de son affectation : hôtel de classe affaire (94 chambres), hôtel de classe économique (126 chambres), résidences appart-hôtel (106 chambres), restaurant (160 couverts), bureaux, logements et Business center, activités commerciales. Beaulieu 2020 est destiné à organiser beaucoup plus de foires et d’expositions, donc d’accueillir plus de monde qu’aujourd’hui. Exposant·e·s et visiteurs·euses des manifestations futures vont amener une augmentation des charges de trafic pour toutes les routes adjacentes, entraînant une hausse importante des nuisances pour les habitants·e·s des quartiers touchés. Le préavis sous-estime totalement cette réalité. La question de fond posée est celle de la nécessité d’augmenter l’offre sur le plan des transports publics. Par rapport à Beaulieu, le choix de la construction de la variante du métro M3 serait une mesure adéquate. Or, on vient d’apprendre que le canton de Vaud conditionne son acceptation et son financement à l’octroi d’une contribution de la ville de Lausanne de 150 millions ! Sur ce point, la Municipalité met également la charrue avant les bœufs.
Jean-Michel Dolivo