Un salaire minimum contre la précarité et pour plus d’égalité
Une large coalition de partis et syndicats a lancé la récolte de signatures pour deux initiatives pour instaurer un salaire minimum dans le canton de Vaud. Un rapport démontre sa nécessité.
Publié le 2 mai 2023, le dernier rapport de Statistique Vaud éclaircit la situation des salaires dans le canton de Vaud entre 2010 et 2020. Durant cette période, le salaire brut médian dans le canton de Vaud n’a augmenté que de 6,2 % pour atteindre 6490 francs alors qu’à l’échelle de la Suisse il a augmenté de 8,5 % à 6665 francs.
Si le rapport se veut optimiste, il nous rappelle que 9 % des travailleurs et travailleuses du canton sont concerné·e·s par les « bas salaires ». Ils et elles ont un revenu inférieur à deux tiers du salaire médian et n’arrivent très souvent pas à vivre de leur revenu sans avoir recours à des aides. Les principales personnes concernées sont celles n’ayant pas achevé de formation (26 %), les moins de 25 ans (28 %), celles travaillant dans l’hébergement et la restauration (43 %), dans le commerce de détail (28 %) et finalement les personnes travaillant dans l’industrie alimentaire, dont la situation s’est même dégradée (de 12 % en situation de bas salaire en 2010 à 20 % en 2020).
Toujours selon ce rapport, les principaux facteurs de différence dans le salaire médian sont la nationalité – avec 6920 francs (+7 % par rapport au salaire médian) pour une personne de nationalité Suisse contre 5940 francs (-8 %) pour une personne de nationalité étrangère – ainsi que le genre – avec 6650 francs (+2 %) pour les hommes et 6270 francs (-3 %) pour les femmes.
Bien que Statistique Vaud se réjouisse des améliorations sur cette dizaine d’années, notamment en termes d’inégalités salariales entre femmes et hommes (380 francs en 2020 contre 700 francs en 2010), il faut le dire : cela n’est pas encore suffisant. Particulièrement dans un contexte de forte inflation des prix où les salaires réels ont diminué de 0,8 % en 2021 et 1,9 % en 2022 !
Lutter contre les emplois sous-payés
Face à ce constat, l’instauration d’un salaire minimum se révèle être une mesure indispensable pour le droit de vivre dignement de son travail : le salaire minimum s’attaque à la sous-enchère salariale pratiquée par les patron·ne·s, qui exploitent les personnes extra-européennes, font de la discrimination à l’embauche et abusent d’emplois sous-payés déguisés en stages pour tirer les salaires le plus bas possible. Le salaire minimum est également une mesure qui pallie l’insuffisance des conventions collectives de travail (CCT), qui seules n’arrivent pas à faire reculer de manière globale la précarité car elles ne concernent qu’environ la moitié des secteurs professionnels de notre canton.
Malgré la garantie du droit constitutionnel en termes d’égalité salariale, les femmes et les minorités de genre continuent de subir des injustices flagrantes sur le lieu de travail. Ielles sont systématiquement sous-payéexs et occupent majoritairement des emplois précaires et mal rémunérés, ce qui les maintient dans une situation de vulnérabilité économique. La situation est d’autant plus dramatique pour les femmes issues de la migration et pour les mères célibataires qui sont majoritaires dans les bas salaires. Les femmes sont souvent reléguées à des emplois dans les secteurs économiques au plus bas de l’échelle, et les compétences et la pénibilité de leur travail sont souvent sous-évaluées.
Les chiffres parlent d’eux-mêmes : plus de la moitié des femmes travaillent à temps partiel et la plupart d’entre elles sont des mères de famille (69 %), tandis que seulement 16 % des hommes travaillent à temps partiel. Le taux de pauvreté chez les mères célibataires atteint 12 %, c’est scandaleux ! De plus, les femmes représentent plus de 66 % des bénéficiaires des prestations complémentaires à l’instar de l’AVS.
À vos stylos !
Face à ce constat, il faut faire aboutir les deux initiatives pour le salaire minimum lancées le 13 mai. Ces deux initiatives ont le même but, mais elles se complètent.
Premièrement il s’agit d’instaurer dans la constitution vaudoise la garantie par l’État du droit à un salaire assurant un niveau de vie décent pour tout·e·s les travailleurs et travailleuses. Sans cette première initiative, qui en établit le principe, une mesure telle que le salaire minimum se retrouverait possiblement sans base constitutionnelle pour être applicable.
Deuxièmement, l’initiative législative fixe les contours du salaire minimum : 23 francs de l’heure, indexation chaque année sur le coût de la vie, amendes, primauté sur les salaires inférieurs dans une CCT, délai d’entrée en vigueur, etc.
C’est une question de justice sociale et de respect des droits fondamentaux. La situation des bas salaires dans le canton est intolérable !
Raza Hajraj William Thibaut