Renforcer la protection des travailleurs agricoles, un objectif prioritaire

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En Suisse, les conditions de travail des ouvriers et ouvrières agricoles ne sont pas soumises à la loi sur le travail (LTr), mais à des contrats-types de travail (CTT) cantonaux, créant des disparités régionales considérables en matière de pénibilité, de durée du travail et de rémunération.

Cette réglementation multiple limite les possibilités de revendications et d’actions, sur le plan national, pour les salarié.e.s de ce secteur. Le 10 mars dernier, Jean-Michel Dolivo déposait au Grand conseil vaudois, pour le groupe La Gauche (POP-solidaritéS), un postulat demandant un rapport au gouvernement vaudois sur l’évolution de ce secteur depuis les années 2000 et sur les moyens à mettre en œuvre pour mieux protéger la santé de celles et ceux qui y travaillent.

En 2013, l’agriculture vaudoise compte 4497 sa­la­rié·e·s classés dans la catégorie « main d’œuvre non familiale », soit 3092 hommes et 1405 femmes (72 % d’entre elles, à temps partiel). Ce sont eux et elles qui sont soumis aux conditions fixées par le CTT pour l’agriculture. Ces dernières années, on a pu constater une salarisation croissante du travail agricole, liée à son industrialisation, et une croissance du nombre de femmes travaillant dans ce secteur, en partie notamment du fait du caractère saisonnier d’un certain nombre d’activités. Les personnes utilisées pour ce travail saisonnier le sont « à flux tendu ». Et ce sont souvent des femmes qui assument les tâches répétitives. Or, une journée de travail de 10 heures implique une forte surcharge de travail, mettant en cause la santé et le bien être des personnes concernées.

Le Conseil d’Etat a adopté en février 2015 une modification du CTT pour l’agriculture, portant la durée du travail à 51 heures en moyenne sur l’année, avec une limite de flexibilité fixée à 55 heures 30 par semaine. Par ailleurs, le salaire brut minimum est passé de 3320 à 3370 francs. Ces timides améliorations ne sont guère à la hauteur de la situation évoquée ci-dessus. Les syndicats de cette branche demandent une réduction à 45 heures (déjà adoptée à Genève en 2012, et validée suite par le Tribunal Fédéral suite à un recours), la fixation du salaire brut minimum à 3500 francs, la mise en place de mesures de formation, la valorisation du CFC et la reconnaissance des acquis par une classification des salaires.

Mais les moyens de luttes, sur le terrain, sont limités, dans ce secteur particulièrement précaire. Sans prétendre répondre à cette situation, en tant que telle, l’initiative du syndicat Uniterre « Pour la souveraineté alimentaire » apporte des éléments de réponse, en demandant notamment à la Confédération « une attention particulière aux conditions de travail des sa­la­rié·e·s agricoles et veille à ce qu’elles soient harmonisées au niveau fédéral.» solidaritéS réitère son appel à un soutien large de cette initiative, tout en défendant dès aujourd’hui les syndicats de la branche des tra­vail­leurs·euses agricoles dans leurs revendications.

 

Pierre Conscience