La queerphobie c’est de droite et c’est dangereux

En octobre dernier, les associations Pink Cross et l’Organisation suisse des lesbiennes (LOS) ont fait appel à la justice pour dénoncer les propos incitant à la haine contre la communauté LGBTQIA+ du journal La Hallebarde

Des manifestant avec une banderole pour la solidarité avec les personnes LGBTIG
Pride de Nuit, Lausanne, 2 juillet 2022

 Le journal, qui s’auto-­définit comme satirique et de droite populaire radicale, a en effet publié plusieurs articles des plus crasseux dont la fantaisie pourrait amuser s’ils n’étaient pas si dangereux. Sous couvert de satire, on y trouve homophobie et transphobie des plus graphiques et décomplexées.

«Il est possible de croiser tous les jours des hommes en jupe et bas résille dans cette ville du démon. Ces ‘iels’ n’y sont victimes de rien du tout, ils sont plutôt perçus comme des figures christiques au sein de Sodome et Gomorrhe.»

Un réseau nauséabond

En bons ménestrels de la panique morale, les auteurices – anonymes – de ces articles manient insultes et rhétorique transphobe avec lourdeur afin d’avertir le lectorat du danger que représentent les communautés LGBTQIA+ pour la famille et les enfants. Car oui, plusieurs exemples historiques contemporains peuvent illustrer les interconnexions et dépendances entre les mouvements homophobes, TERFs (pour « Trans-exclusionary radical feminists », soit des militantes considérant que les personnes trans ne peuvent pas faire partie de la lutte féministe au nom de la biologie) et d’extrême droite, se recoupant notamment dans des mouvements pro-life comme aux États-Unis. 

La prétendue théorie du genre fait peur à la droite, puisqu’elle permettrait, au-delà du transgenrisme, d’ancrer les droits des personnes LGBTQIA+ mais aussi les droits féministes comme le droit à l’avortement. Très récemment en France, la droite et l’extrême ­droite ont offert maintes tribunes au duo TERF Marguerite Stern et Dora Moutot, qui va jusqu’à suggérer, dans leur «manifeste femelliste», que les dysphories de genre, et par extension les femmes trans*, sont potentiellement responsables de la pollution des eaux en œstrogène.

L‘UDC complice

En 2020, l’électorat a dit oui à 63,1 % à une loi contre l’homophobie. Tous les partis, sauf l’UDC, se sont réjouis de ce soutien. En juin dernier, Yohan Ziehli, vice-président de l’UDC Vaud, a pris la parole aux côtés d’intervenants de La Hallebarde lors d’une conférence d’extrême droite à Lausanne. Le magazine a également fait la part belle aux féministes identitaires de Nemesis pour sa première édition. 

Ainsi, c’est aussi localement que nous devons nous armer contre ces rapprochements inquiétants et nocifs. Il ne sera pas possible de lutter contre une montée de l’extrême droite sans apprendre à repérer les rhétoriques transphobes, ainsi que soutenir et intégrer les questions queers dans nos luttes. Soutien à Pink Cross et la LOS, et pas de société sans les pédés.

Al S. Gutierrez