Halte à la restauration militaire
Achat accéléré de nouveaux avions de combat, augmentation massive des dépenses militaires annuelles de 4 à 5,1 milliards, maintien d’une armée de masse de 100 000 soldats au lieu des 80 000 proposés par le Conseil fédéral… La gauche est appelée à réagir pour empêcher ce projet de « restauration militaire » voulue par une majorité du parlement peu avant les dernières élections fédérales d’octobre 2011.
L’armée suisse se trouve dans une impasse, sans boussole, coincée entre le modèle traditionnel de la droite isolationniste (armée de masse, « forte et crédible », capable de défendre la patrie de manière « autonome ») et les visions de la droite modernisatrice (professionnalisation, intégration dans un système militaire européen ou de l’OTAN). La droite pro-armée au parlement a donc proposé de sortir de cette crise en demandant pour l’armée plus d’hommes, plus d’argent et plus d’avions que ne le proposait le Conseil fédéral.
Construire l’opposition au réarmement
Enfin, en choisissant un modèle d’avion Gripen qui n’existe en bonne partie encore que sur le papier et qui est doté de performances nettement inférieures aux autres avions de combat testés dans la procédure d’évaluation, le Conseil fédéral a donné un signal en contradiction avec le projet de « meilleure armée du monde » proclamé par Ueli Maurer lors de son entrée en fonction. Cela laisse intactes les chances de faire capoter tôt ou tard le projet d’achat.
Dans cette opposition, la gauche, les Verts, le GSsA, les syndicats ainsi que les organisations des secteurs de la société concernés par les conséquences du réarmement ont un rôle central à jouer.
Dans l’immédiat, il faudra suivre de près l’évolution du projet d’achat de nouveaux avions de combat. Si le parlement accepte d’acheter les nouveaux avions, il faudra lancer soit un référendum (si l’achat sera financé par un crédit spécial) soit une initiative populaire (si l’achat sera saucissonné dans plusieurs programmes d’armement, sans crédit spécial). Surtout dans cette dernière hypothèse, il faudra préparer une très large coalition, à même de récolter très rapidement les signatures nécessaires pour bloquer le projet d’achat entre la présentation du prochain programme d’armement (fin avril 2012) et la délibération du parlement sur ce programme (session d’automne 2012).
Tobia Schnebli
Le lobby militaire décimé aux élections fédérales
Il y a au parlement 70 nouveaux député·e·s, le GSsA y a certes perdu le sien, l’antimilitariste zougois Jo Lang, mais le lobby pro-armée en est heureusement sorti décimé. Le lobby militaro-industriel a perdu notamment les deux co-président·e·s du « Cercle de travail sécurité et techniques de défense » l’une des principales organisations de façade de l’agence PR Farner. Il s’agit de Bruno Frick, (l’ancien Conseiller aux Etats PDC qui avait orchestré avec succès la restauration de l’objectif d’une armée « forte et crédible » l’été passé), ainsi que Sylvie Perrinjaquet (PLR/NE). Ulrich Schlüer et Christian Miesch, deux conseillers nationaux UDC membres de cette même organisation du lobby pro-armée (et membres en même temps de la commission de politique de sécurité) n’ont pas été reélus non plus.