Arabie Saoudite: une société malade au service de l'impérialisme

L’Arabie Saoudite:

Une société malade au service de l´impérialisme

Si l’on en croit les autorités US, dans la
tragédie du 11 septembre, au moins 10
pirates de l’air sur 15 étaient d’origine
saoudienne, l’un des pays les plus riches
et les plus inégalitaires du monde, mais
aussi l’un des plus fidèles alliés des
Etats-Unis.

Pion de l’impérialisme occidental contre
le nationalisme populiste et ses velléités
de contrôle des ressources pétrolières
de la région, l’Arabie Saoudite s’est édiiée
par la violence. Elle représente
aujourd’hui l’un des Etats les plus
répressifs du monde.

Secouée par une profonde crise de légiimité
politique et discréditée par son
piteux bilan économique, la dynastie des
Saoud est cependant plus fragile que
jamais. L’Oncle Sam se prépare au pire…

Un pion de l’impérialisme

L’Arabie Saoudite est née dans la violence, entre 1902
et 1925. Ibn Saud, l’un des plus puissants leaders
bédouins de l’époque, d’obédience Wahhabite – une
secte puritaine de l’islam sunnite – avait ainsi reçu
carte blanche de l’Angleterre pour soumettre cette province
mal contrôlée par l’Empire Ottoman. Bilan: un
million de réfugiés, 400 000 morts ou blessés, 40 000
exécutions. «Ils plantaient les têtes de leurs ennemis
sur des piques aux portes des villes conquises, brûlant
systématiquement leurs victimes, violant et réduisant
en esclavage les filles…» (Socialist Review, déc. 2001).

Avant de fonder l’Arabie Saoudite, du nom de leur leader,
proclamé roi en 1932, les Wahhabites avaient
réussi à affaiblir les tribus fidèles aux ottomans ou
iées à la dynastie hachémite de Jordanie, à qui les
Anglais avaient fait miroiter un monde arabe unifié
après la Première guerre mondiale. “Ce que nous vouons,
disait Lord Crowe, ministre libéral de sa Majesté,
ce n’est pas une Arabie unifiée, mais une Arabie fragmentée,
divisée en principautés soumises à notre
autorité.”

Une répression moyenâgeuse

Depuis le début, la Maison de Saud pratique le double
langage: ordre puritain très strict pour le peuple;
débauche, jeu et alcool pour les familles régnantes.
Quant au travail, il est assuré par une immigration
massive de 7 millions d’individus (un tiers de la
population totale), pratiquement réduite en esclavage
(bien qu’aboli officiellement en 1962).

Le système saoudien repose sur une police secrète
omniprésente. Il n’y a ni partis politiques, ni élections,
ni syndicats, ni religion alternative, ni justice, ni
médias indépendants. Toute incartade est punie du
fouet, de la torture, de l’amputation, de la prison ou
de la mort (une centaine de décapitations publiques
au sabre par an; trois homosexuels ce 1er janvier).

Mais l’insatisfaction croît, en particulier parmi la jeunesse
(50% de la population a moins de 18 ans). La
politique pro-sioniste des Etats-Unis et l’installation
de troupes US sur le sol saoudien suscitent la révolte.
En même temps, le pays s’enfonce dans une crise
économique profonde: depuis 20 ans, le PNB par
habitant a diminué de plus de 60%, les cours du
pétrole n’ont cessé de baisser et la dette publique a
explosé. La situation est à ce point alarmante que les
Etats-Unis préparent un scénario d’occupation des
champs pétrolifères en cas de renversement des Saud.

Quand l’Amérique fait l’islam

Depuis la Deuxième guerre mondiale, l’Arabie Saoudite
a troqué la suzeraineté britannique pour la tutelle états
unienne. Avec un quart des réserves de pétrole exploitées du globe, dont les coûts de production sont bas
(gisements peu profonds en bordure de mer), elle joue
un rôle de tout premier plan. De plus, sa rente pétrolière irrigue généreusement les marchés financiers (service de la dette) et d’armements du Nord.

L’islam wahhabite est aussi l’ennemi le plus résolu du
nationalisme arabe. Dans les années 50, lorsque
Nasser nationalise le canal de Suez et revendique “le
pétrole arabe pour le peuple arabe”, il est combattu
par des groupes islamistes financés par l’Arabie
Saoudite. Pour la Ligue Musulmane Mondiale, “ceux qui
détournent les enseignements de l’islam en faveur du
nationalisme sont les plus grands ennemis des Arabes.

C’est l’époque où “l’Amérique fait l’islam”, selon le
leader des frères musulmans égyptiens, Sayed
Kuttub. L’islam politique inspiré par les Wahhabites
né de la lutte contre le nationalisme arabe, poursuivra
la carrière que l’on sait dans le combat contre l’Iran
en finançant la guerre lancée par l’Irak, puis contre
l’URSS en Afghanistan, avant de se retourner contre
l’un de ses principaux pourvoyeurs: les Etats-Unis.

Voir Said Aburish, The Rise, Corruption and Coming
Fall of the House of Saud (La mise en place, la corruption et la chute à venir de la Maison de Saud)
, New
York, 1994.

Jean BATOU