La santé n´est pas une marchandise: pour une caisse-maladie unique et sociale!

La santé n´est pas une marchandise: pour une caisse-maladie unique et sociale!

L’initiative fédérale «Pour une caisse-maladie unique et sociale» a été lancée par le Mouvement Populaire des Familles, il y a un peu plus de neuf mois, avec le soutien notamment de solidaritéS. Elle prévoit une caisse fédérale unique, des cotisations proportionnelles aux revenus et une gestion participative, avec la collaboration des assuré-e-s, des soignant-e-s et de l’Etat. A ce jour, au niveau national, elle a reçu l’appui de l’Union Syndicale Suisse, des Verts, du PST, de grandes associations comme l’AVIVO, mais pas du Parti Socialiste Suisse, même si la plupart de ses sections romandes la soutiennent. En réalité, la récolte reste à ce jour très insuffisante, raison pour laquelle solidaritéS et le Parti Suisse du Travail, dans le cadre de l’alliance «A Gauche Toute!», ont décidé d’intensifier leurs efforts dans les mois à venir.

Sous l’influence des contre-réformes néolibérales, la santé est considérée chaque jour un peu plus comme une marchandise, réservée à celles et ceux qui en ont les moyens. Il en va de même des traitement coûteux ciblés, comme de la médecine préventive concernant de larges couches de la population. Dans les pays du Sud, de nombreux médicaments ne sont à la portée que d’une minorité de malades en raison de la rapacité des multinationales pharmaceutiques, soutenue par l’OMC. Par exemple, en raison des coûts prohibitifs du dépistage, le cancer du col de l’utérus – aisément guérissable lorsqu’il est diagnostiqué à temps – y représente la deuxième cause de mortalité par cancer des femmes. En Europe, le «social-démocrate» Schröder n’est pas en reste sur le «conservateur» Raffarin pour mettre en cause les fondements solidaires de l’assurance-maladie. Et pourtant, la privatisation de la santé contribue directement à sa moindre efficacité sociale et à son renchérissement général: ainsi, les Etats-Unis affectent 14% de leur Produit Intérieur Brut (PIB) à leurs dépenses de santé, privatisées à 56%, tandis que ces ratios sont respectivement de 8% et de 25% en France, où les indicateurs de santé sont pourtant sensiblement meilleurs!

En Suisse, l’assurance maladie de base est essentiellement financée par une prime unique par tête profondément inique. Les frais de santé y représentent 10,7% du PIB, position intermédiaire entre l’Union Européenne et les Etats-Unis. Pourtant, contrairement aux idées reçues, ils ont beaucoup plus augmenté dans les années 60 et 70, que dans les années 90… En réalité, c’est le désengagement de l’Etat qui est la principale cause de l’envolée des primes. Selon une étude de l’OFS, publiée en juillet dernier, les ménages finançaient directement 55% de leurs frais de santé en 1971, contre 68% aujourd’hui (chiffres pour 2000). Ceci n’empêche pas les caisses, avec la complicité de l’Etat, de ne plus rembourser des prestations essentielles, par «mesure d’économie»: par exemple, depuis le 1er avril 2003, le dépistage du cancer du col de l’utérus par le «Pap liquide» (frottis) (850’000 examens par an), plus efficace que le test traditionnel pour déceler les lésions débutantes, n’est plus pris en charge par l’assurance de base. Une fois de plus, ce sont les femmes qui trinquent! L’inénarrable Pascal Couchepin propose même aujourd’hui de réduire de 90% à 80% le remboursement de tous les traitements ambulatoires et des médicaments…

A contre-courant de telles évolutions, l’initiative «Pour une caisse-maladie unique et sociale» se place du point du vue des besoins fondamentaux de la population, auxquels elle propose de répondre par un financement solidaire. Afin de rapprocher usager-ères et soignant-e-s de la prise en charge, de la planification et de la gestion du système de santé, elle prévoit de les impliquer à part égale dans l’administration de l’assurance-maladie. L’implication de ces acteurs clés devrait permettre d’accroître la transparence, le contrôle démocratique et l’engagement social de la future caisse unifiée, après reprise des actifs et passifs de la centaine de caisses qui se disputent aujourd’hui le «marché» de l’assurance obligatoire. Au-delà donc d’une réponse urgente à l’envolée des primes et à la restriction des soins, elle dessine une alternative systémique au primat de la concurrence, au creusement des inégalités et à l’arbitraire administratif auquel conduit aujourd’hui la LAMAL.

Gilles GODINAT