Marchons, marchons… pour l’égalité, Les femmes en ont assez !

Marchons, marchons… pour l’égalité, Les femmes en ont assez !

La lutte collective contre la pauvreté et les violences contre
les femmes est en marche, son élargissement sera décisif.
Sans une organisation internationale, les femmes – mais aussi les
hommes – ne parviendront jamais à lutter efficacement
contre un système qui les exploite et les use sans scrupule, ni
limite. Aujourd’hui, en Suisse comme ailleurs dans le monde, le
droit des femmes à l’égalité est
attaqué frontalement par les réponses que les milieux
dominants apportent à la crise.

    Tandis que l’écart des salaires entre
femmes et hommes tendait à se resserrer un peu ces
dernières années, aujourd’hui il se creuse. A
travers le monde, les lois clament toujours :
« à formation et travail de valeur égale,
salaire égal », mais 80 % du travail
précaire est effectué par les femmes, tous âges
confondus; les montants de leurs retraites sont inférieures
à celles des hommes, car partout elles sont
reléguées dans des postes moins bien payés, font
moins «carrière» et occupent des fonctions
subordonnées. Avec la crise qui frappe plus durement les femmes,
les inégalités se renforcent.

    Les filles ont beau réussir à
l’école, elles ont beau être majoritaires dans les
lycées, au bout de la route, elles trouvent comme leurs
aînées des emplois précaires, mal payés, ne
correspondant en rien à leur formation, quand elles en trouvent
un. Et gare à celles qui restent en rade en cours de formation,
elles sont marginalisées et réduites à rêver
à un bonheur illusoire auprès d’un prince
charmant…

    Au niveau planétaire, 80 % des 1,3
milliard d’êtres humains les plus démunis sont des
femmes, alors que ce sont elles qui produisent l’essentiel de la
nourriture, en particulier dans les pays pauvres. Et c’est
partout d’elles, que dépend le renouvellement des forces
de travail, sources des richesses. En Suisse, la valeur
économique du travail gratuit (domestique et éducatif)
assumé essentiellement par les femmes représente
l’équivalent de 250 milliards de francs par an. Autrement
dit, si 6,7 milliards d’heures sont rétribuées sur
le marché du travail, 8 milliards d’heures sont fournies
gratuitement par les femmes.

    Partout, la mobilisation pour des infrastructures
garantissant un véritable accès à la formation et
à l’éducation, mais aussi la promotion de la
santé publique – de la contraception et de
l’avortement dans de bonnes conditions – sont essentielles
pour les femmes. Avec la crise, on assiste dans toutes les
régions de la planète aux mêmes attaques:
mondialisation capitaliste oblige! Dans les pays dits
démocratiques, les parlements à majorité
bourgeoise et masculine, votent à tour de bras, souvent sans
opposition sérieuse, des réductions de subventions pour
les crèches et les écoles, mettent en place des
systèmes de soin à deux vitesses, privatisent des pans
entiers du service public et se dotent de lois restrictives en
matière d’immigration.

    Sur tous ces points, les autorités suisses
sont en première ligne avec une bonne dose d’hypocrisie et
de cynisme. Il suffit de penser aux femmes immigrées des pays du
Sud – aides de ménage et de soins –, auxquelles les
autorités n’accordent pas de statut légal. Non
seulement la société ne pourrait pas se passer de ces
travailleuses, mais elles doivent encore s’occuper de leurs
enfants et de leur famille, en Suisse ou au pays, dans l’espoir
de leur offrir un avenir digne de ce nom. Quant au trafic sexuel dont
les femmes sont victimes, ainsi que les enfants, il brasse
aujourd’hui plus d’argent que le trafic des drogues.

    Les violences de tous ordres que les femmes
subissent sont extrêmes et révoltantes, tant de la part de
leur conjoint – phénomène universel et
attesté dans toutes les couches de la société,
quels que soient le statut et le niveau social des conjoints –,
qu’en raison de la pauvreté ou de la guerre,
lorsqu’elles sont violées, engrossées ou
torturées.

    « Changer le monde pour changer la vie
des femmes, changer la vie des femmes pour changer le
monde », la Marche mondiale des femmes s’est
donné là plus qu’un slogan: elle affirme une
volonté collective de lutter, et met tout en œuvre pour
que les femmes marchent ensemble aussi longtemps que nécessaire,
tout simplement parce que le monde n‘est ni supportable, ni
acceptable, pour la grande majorité d’entre elles –
mais aussi des hommes.

    Malgré les résultats
indéniables obtenus par les femmes au cours de ces cinquante
dernières années, il est évident qu’il reste
bien du pain noir sur la planche, bien des luttes à faire et
à refaire. Car une chose est sûre: rien en matière
d’égalité, entre femmes et hommes notamment, ne
sera jamais acquis tant que capitalisme et patriarcat – qui font
ensemble bon ménage – domineront nos vies. Et, ils ne
tomberont pas spontanément. La Marche mondiale des femmes, qui
lance cette année sa troisième action internationale
contre la pauvreté et les violences faites aux femmes, l’a
bien compris. C’est pourquoi, elle entend construire un mouvement
des femmes fort et déterminé pour ébaucher dans
ses luttes un autre monde, où solidarité,
égalité et droits pour toutes et tous ne soient pas de
vains mots.

Marianne Ebel