Irak: la différence entre «guerre», «libération» et «génocide»
Irak: la différence entre «guerre», «libération» et «génocide»
La guerre dIrak et son lien
avec la présence de bases militaires US dans divers pays fut le
thème central abordé par Medea Benjamin (du groupe
«CodePink»), le mardi 6 mars, lors dune
conférence de presse au Centre culturel de
lUniversité pontificale catholique dEquateur,
à loccasion de la «Conférence internationale
pour labolition des bases militaires
étrangères» (Quito-Manta, Equateur), du 5 au 9 mars
20071
En référence aux codes de couleurs utilisés par le
gouvernement américain dans la lutte antiterrorisme, des femmes
ont créé le groupe «CodePink».2
Ces féministes antiguerre veulent démontrer que la
manière la plus efficace pour obtenir la sécurité
nest pas la guerre, mais la recherche de formes pacifiques pour
résoudre les problèmes internationaux. Medea Benjamin
dirige ce groupe né avant linvasion de lIrak par
les Etats-Unis, avec lidée quil serait possible
darrêter la guerre grâce à
lorganisation du peuple.
La réalité de lIrak, constate M. Benjamin,
reflète lirrationalité de ce conflit: la vie des
Irakiens est pire que sous le régime dictatorial de Saddam
Hussein; ils nont ni électricité, ni eau potable,
ni soins médicaux adéquats et vivent entre la peur,
linsécurité et la mort. Des experts
évaluent les morts civils à plus de 650 000
chiffre nié par le gouvernement des USA. Dautre part,
plus de 3100 soldats de larmée US ont trouvé la
mort.
«Nous devons reconnaître que lune des raisons pour
lesquelles nous avons été attaqués le 11 septembre
2001 fut la présence de bases étrangères en Arabie
Saoudite, terre des lieux les plus sacrés pour les
musulmans», déclare M. Benjamin en expliquant
lampleur des conflits générés par la
présence militaire des USA dans le monde: en Irak seulement, il
existe 70 bases prévues pour durer ce qui
démontre lintérêt du gouvernement
américain pour une présence permanente dans un territoire
clé pour le contrôle du pétrole au Moyen-Orient.
Les bases militaires dans des pays comme lAllemagne contribuent
aussi au conflit irakien, en permettant une rotation des soldats:
Allemagne Irak Allemagne Etats-Unis.
Depuis le 11 septembre, ces bases servent à la détention
de prisonniers de guerre, que le gouvernement des USA considère
comme des terroristes3. Lexemple le plus connu est la
base de Guantanamo (Cuba), qui compte plus de 400 prisonniers (en
majorité musulmans), où les procédures judiciaires
démocratiques nexistent pas et où les droits
humains ne sont pas respectés. Autre exemple: Bagram, en
Afghanistan. Grâce aux accords entre gouvernements
légalisant la présence de ces bases
étrangères, il est difficile détablir le
caractère illégal des activités menées
à la dérobée par les troupes
nord-américaines dans la majorité de ces camps.
La voie pour arrêter la construction et le maintien des bases
militaires étrangères passe par lorganisation de
la population. Un exemple connu, cest la ville de Vicenza
(Italie), dont les habitants poursuivent la lutte contre la
construction dune base militaire.4
Les chiffres officiels du gouvernement des Etats-Unis signalent
lexistence de 737 bases militaires dans 130 pays du monde.
Pourtant, lambassade US en Equateur ne reconnaît
lexistence que de 34 bases, les autres sites relevant dun
autre type dinstallation militaire. Cela sappelle jouer
sur les mots, une manipulation du langage exemplaire de ce que le
gouvernement fait dans les médias américains. On
ny parle ainsi ni d«occupation», ni de
«guerre», mais de «libération». Une
rhétorique qui divise le monde entre bons et méchants.
La population des USA méconnaît la réalité
du réseau des bases militaires. Le conservateur américain
moyen pense quelles servent à la protection et à
la sécurité des pays où elles sont et
sinsurge contre les dépenses ainsi faites pour
protéger les autres. A partir de cette réaction, Medea
Benjamin estime possible une alliance contre les bases militaires
à létranger: «La droite ne veut pas payer
pour la sécurité des autres et la gauche sait bien que
ces bases ne servent justement pas la sécurité des
autres».
En novembre 2006, aux Etats-Unis, le peuple a usé pour la
première fois de son droit démocratique à voter
contre la politique de Bush, rendant possible une majorité du
Parti démocrate à la Chambre des représentants et
au Sénat. Cependant, les démocrates ont utilisé
cette opposition comme un tremplin politique et non pas pour mettre fin
à la guerre. Le 14 mars, ils se prononceront sur un
crédit de 93 milliards de dollars pour la lutte contre le
terrorisme. On estime généralement que ce crédit
sera accepté, avec quelques amendements.
Medea Benjamin a conclu en affirmant quil reste beaucoup
à faire aux Etats-Unis en matière
déducation contre le militarisme US. Il est fondamental
dessayer de changer lesprit des gens, parce que
linsécurité ira croissant dans la mesure où
lon continuera à voir «lautre» comme
un terroriste. Il faut aussi lutter pour construire un réseau
dalliés dans dautres pays, afin de renforcer les
actions de ceux qui, aux Etats-Unis, recherchent la paix et tentent de
changer lesprit des gens et la politique du gouvernement.
Trad. de lespagnol
par Hans-Peter Renk
- Version originale disponible sur le site officiel de la Conférence: http://movimientos.org/noalca/no-bases
- Groupe féministe anti-guerre, constitué avant
linvasion de lIraq et prônant laction
directe non-violente et laction communautaire, site internet: www.codepink4peace.org - Appelés «combattants illégaux» par les
USA, ce qui permet de ne pas leur appliquer les clauses des conventions
de Genève sur le droit de la guerre. - Avec les crédits pour les troupes italiennes en
Afghanistan, la base de Vicenza est à lorigine de la
récente crise politique italienne (cf. solidaritéS, no
103).