FranceLa résistance à l’ordre du jour

France
La résistance à l’ordre du jour

Avec Nicolas Sarkozy à la présidence de la
République, le programme du Medef s’incruste au pouvoir.
De nouveaux cadeaux fiscaux aux entreprises et aux plus riches, la
privatisation de nouveaux services publics, la chasse aux enfants sans
papiers, la remise en cause de droits sociaux et démocratiques
fondamentaux, comme le droit de grève ou le CDI [contrat de
travail à durée indétermininée,
réd.] sont dans l’agenda du nouveau président de la
République. L’État UMP dispose, une nouvelle fois,
du pouvoir politique central. Sarkozy, qui a participé aux
différents gouvernements du dernier quinquennat de Chirac, a
réussi à apparaître comme un candidat de rupture.
Une rupture qui sonne comme une accélération brutale des
attaques capitalistes.

Tous les grands groupes du CAC 40 et les autres peuvent se
féliciter. Non pas qu’ils aient eu peur d’une
victoire de la candidate socialiste, du point de vue de leurs
intérêts fondamentaux, mais parce qu’avec Sarkozy,
c’est l’intégralité du programme du patronat
qui va trouver un allié fidèle à la tête de
l’État. Ces multinationales dirigées par des
patrons amis du président, non contentes de diriger
l’économie, contrôlent également la plupart
des médias. Que reste-t-il de médias indépendants,
une fois que l’on a soustrait ceux contrôlés par
Bouygues, Lagardère, Dassault ou Pinault? C’est là
un véritable monopole du pouvoir, bien inquiétant et bien
loin des propos lénifiants sur l’État impartial. Le
danger Sarkozy, c’est également l’aspiration des
voix lepénistes, phénomène déjà
observé au premier tour et qui s’est confirmé au
second. Une droite musclée, désormais sans complexe,
développe un discours nationaliste autour de
l’identité nationale et du refus de la repentance…
à quelques jours de la commémoration de
l’esclavage!

La démagogie populiste utilisée dans cette campagne va
déboucher sur des mesures antisociales, sécuritaires et
antidémocratiques, qui ne manqueront pas de susciter des
mobilisations très larges. C’est à la construction
de ces résistances sociales et démocratiques que la LCR
entend désormais consacrer toutes ses forces. Il est
légitime de lutter, de manifester, de faire grève, pour
défendre ses droits, comme le font les salariés
d’EADS. Sarkozy va vouloir traduire sa victoire électorale
en infligeant une défaite au mouvement social. C’est
pourquoi la LCR propose que, face au programme ultralibéral et
ultrasécuritaire d’un Sarkozy, un front unitaire de toutes
les forces sociales et démocratiques soit immédiatement
construit pour organiser la riposte. Elle prendra toutes les
initiatives en ce sens dans les prochains jours.

La démonstration est également faite qu’une gauche
sociale-libérale – qui a tenté jusqu’au bout
une alliance avec l’UDF de Bayrou – n’est pas un
rempart efficace face à une droite dure et autoritaire. Les
appels du pied vers la droite n’auront servi à rien
d’autre qu’à contribuer à brouiller les
repères. À chaque fois que la gauche joue sur le terrain
de la droite, elle perd. Pourtant, au PS, c’est la petite musique
de la «rénovation» que l’on entend.
Rénovation, dans leur langage, veut dire droitisation, alliance
vers le centre-droit. C’est ce qu’a annoncé
clairement Dominique Strauss-Kahn, mais c’est également ce
qu’a défendu Ségolène Royal. […]

L’entre-deux tours vient de montrer la direction que prennent la
direction et l’appareil central du PS: celle de la recherche
d’une alliance à droite avec Bayrou, sur le modèle
italien de Romano Prodi. C’est un choix destructeur pour la
gauche en Italie, et qui ne pourrait que provoquer les mêmes
dégâts en France. Avec une all i a nc e a ve c l ’
UDF, on s’adapte encore plus au capi tal i sme, à l
’ Europe de Bruxelles; on renonce encore davantage à
s’attaquer aux inégalités et aux injustices
sociales. Les frontières entre sociaux-libéraux et
libéraux-sociaux s’estompent.

Raison de plus pour résister et reconstruire l’espoir
qu’un autre monde est possible. Plus que jamais, la construction
d’une force anticapitaliste puissante, implantée dans les
entreprises, les ser-
vices publics et les quartiers populaires, est urgente pour, dans la
rue comme dans les urnes, battre la droite et le Medef. C’est le
sens de la campagne qu’a menée la LCR et que nous
entendons poursuivre: rassembler les forces anticapitalistes en
indépendance complète vis-à-vis de la direction du
PS. C’est sur ces bases que la LCR se présentera aux
élections législatives, autour d’un programme
d’urgence social et démocratique. Nous comptons sur tous
et toutes pour faire entendre notre voix. Celle d’une gauche
anticapitaliste qui ne renonce pas à s’attaquer aux
profits des patrons.

Olivier Besancenot

Rouge du 11 avril 2007