Ce qui se mitonnerait dans la marmite «constituante»
Ce qui se mitonnerait dans la marmite «constituante»
Des raisons pour voter NON
Le 6 décembre, le parti radical
genevois tenait une assemblée qui plébiscitait le OUI
à la «constituante» genevoise le 24 février
prochain (cf. lédito de notre numéro
précédant pour la position de solidaritéS)
et annonçait fièrement quil mettait sur pied un
site Internet «totalement nouveau», sur le mode dun
«wiki
» interactif, pour préparer le terrain
à la révision totale de la constitution, grâce au
grain de sel de chacun-e, derrière son ordinateur. Encore une
fois, on nous sert une prétendue «page
blanche»
le parti radical se gardant bien
darticuler officiellement des propositions de réformes
concrètes.
Post lux tenebras
Nous sommes allés faire un tour sur le site en question. Plus de
six semaines après sa mise en ligne, la «page» reste
largement blanche. Les sympathisant-e-s radicaux nont pas mordu
à lhameçon. Mais quy trouve-t-on donc
alors? De bons sentiments et des platitudes bien sûr, sur le
fait, par exemple, sur le fait que la constitution devrait
«permettre à tous daccéder au
bonheur». Des intentions aussi, que ce parti bafoue au quotidien,
comme celle de mesurer la force de notre démocratie «au
bien être quelle peut offrir aux plus faibles de ses
membres».
On y trouve aussi des dispositions générales, allant du
rappel de la devise «Post tenebras lux», à
laffirmation surprenante que lEtat devrait être
«politiquement neutre». Gare donc aux élu-e-s qui
voudraient
faire de la politique, plutôt que de
laisser-faire les lois de la nature, au rang desquelles, du
côté des radicaux, sont érigés, on le sait,
du côté des radicaux les dogmes du capitalisme
néolibéral.
On y trouve des principes généraux, affirmés par
ailleurs dans le droit suisse et international, comme celui que
«Tous les êtres humains sont égaux en droits»,
principe contredit dans le même texte par le fait que cette
constitution radicale virtuelle prend la peine dexclure les
étrangers des droits politiques à léchelle
cantonale.
Grèves interdites, religion dEtat et gouverneur?
Au chapitre des «libertés» encore, on apprend que
«La loi peut interdire le recours à la grève
à certaines catégories de personnes», ou que la
grève ne serait «licite» que quand elle est
«conforme aux obligations de préserver la paix du
travail».
Citons encore en vrac le droit de formuler des pétitions, dont
les autorités devraient seulement «prendre
connaissance», ce qui est une régression par rapport
à la pratique actuelle, où elles se prononcent sur toute
pétition; ou pour lincongru le fait que
la loi «peut prévoir un enseignement obligatoire du fait
religieux
», avec une disposition qui stipule que
«toute personne qui entend enseigner une religion doit être
au bénéfice dune autorisation du Conseil
dEtat».
Au chapitre des institutions, le Grand Conseil serait réduit
à 80 député-e-s avec maintien du quorum
anti-démocratique de 7% , le Conseil dEtat
comprendrait 5 membres en charge de 5 départements, avec deux
Conseillers dEtat sans portefeuille qui seraient
«conseillers aux Etats à lAssemblée
fédérale». Et bien sûr
réforme
radicale revendiquée de longue date, le président du
Conseil dEtat «reçoit le titre de
gouverneur»! Pour enfin, tirer au clair les bisbilles
protocolaires entre président du Conseil dEtat et Maire
de Genève…
Liquidation du référendum cantonal
Une proposition antidémocratique de la plume des
«constituants virtuels» radicaux mérite cependant
dêtre relevée, tant elle est scandaleuse: en
matière cantonale, le délai référendaire
serait réduit de 25%. On passerait ainsi de 40 jours à un
mois, et simultanément, le nombre de signatures
nécessaires serait porté à 7% du total des
électeurs-trices, soit à 16 300 signatures,
près de deux fois et demi le seuil actuel de 7000.
Pour Genève seule, il faudrait ainsi près du tiers des
paraphes nécessaires pour faire aboutir un
référendum fédéral. Leffet
cumulé de la réduction du délai et de
laugmentation du nombre de signatures signifie quil
faudrait faire rentrer plus de trois fois plus de signatures par
jour… Ne serait-il pas plus honnête, Messieurs-dames les
radicaux, de supprimer tout simplement ce droit pour donner les pleins
pouvoirs à la majorité parlementaire et à ce
«gouverneur» dont vous rêvez?
Au PS, la dynamique social-libérale saffirme
Pendant ce temps, dans un autre registre, le PS genevois lui
aussi ardent partisan de la constituante ne reste pas les bras
croisés. Il a publié dans lun des derniers
numéros de son bulletin «Post-Scriptum»
un compte rendu enthousiaste dune
conférence-débat du 27 novembre «centrée
autour de la question de lorganisation de lEtat»,
à lenseigne de: «Faire ou faire faire: Etat
gérant ou état garant?».
A laffiche de cette soirée, il y avait notamment Ruth
Dreyfus, ancienne conseillère fédérale du PS, qui
soutient aujourdhui pour rester dans le sujet
les lois de lEntente et de lUDC pour
«dépolitiser» les Conseils dadministration
des HUG, SIG et TPG, au nom de son «expérience
fédérale» et de sa vision, justement
dun Etat «garant» et non pas
«exécutant», ce qui est lune des tartes
à la crème des privatiseurs de tous-poils
Lauteure du compte-rendu du bulletin du PS senflamme au
point de considérer que la soirée «a donné
des signes réjouissants de ce que pourrait être la
dynamique de Constituante.» Ceci, dit-elle, en
«dépassant une vision bi-polaire entre le
tout-à-lEtat providence et le spectre de la
privatisation à tous crins». Alors que cest
évidemment non pas lEtat providence, mais bien le minimum
de sécurité sociale existant, qui fait figure
aujourdhui de spectre de plus en plus pâle, et que les
privatisations fédérales de son collègue
Leuenberger, auxquelles Ruth Dreyfus a malheureusement
prêté la main, nont rien de fantomatiques, les
travailleurs-euses et usagers-ères de la poste et des
télécoms, notamment, en savent quelque chose!
Bref, du côté du PSG, on nous la rejoue la
«troisième voie» social-libérale, ouvertement
assumée
avec la mise en avant dun «tiers
secteur» associatif, dont on a vu lusage détestable
récemment, pour justifier le démantèlement des
emplois-temporaires pour les chômeurs-euses à
Genève. En effet, sans rapport de force social et politique
clair, cest ce type de soupe que risque de nous servir la
constituante-bidon quon nous promet. Une seule conclusion: Voter
et faire voter NON le 24 février!