Quel genre d'hommes ?
Quel genre dhomme ?
«Quel genre dhomme? Construction sociale de la masculinité, relations de genre et développement»: cet ouvrage*, questionne le modèle masculin occidental qui simpose dans le monde entier. Si les études sur le genre masculin sont récentes, celles sur «genre et développement» incluant cette approche sont encore rares. Doù le grand intérêt des 12 textes réunis par Christine Verschuur.
Des hommes pro-féministes du Sud et du Nord ont commencé à réfléchir ensemble sur le thème de la déconstruction de la masculinité. Plusieurs intervenants et auteurs viennent de pays avec des modèles masculins machistes marqués et une histoire politique violente: Norberto Inda, psychologue argentin, à lécoute des hommes qui souffrent de ne pouvoir se conformer au modèle dominant très exigeant, Adama Drabo, réalisateur malien, qui parvient par lhumour de ses films à provoquer les discussions sur les profondes inégalités de genre), par exemple.
Les origines de la domination des hommes sur les femmes restent toujours mystérieuses, Claude Meillassoux développe dans une hypothèse bien argumentée comment les hommes se sont progressivement emparés de la fonction reproductive des femmes, ne supportant pas dêtre confrontés à ce signe tangible de leur infériorité.
La campagne du Ruban blanc, lancée au Canada par des hommes pro-féministes qui disent non à la violence masculine, présentée par Roland Mayerl est un projet concret de mobilisation. Pourtant, elle peine à simplanter en Europe. 1
«Nouvelles approches des hommes et du masculin»
La référence en matière détude de la construction sociale de la masculinité, pour les pays francophones, revient toujours à Daniel Welzer-Lang, chercheur prolifique, directeur de recherches et responsable de collections «Féminin-masculin» dans plusieurs maisons déditions, dont celle de lUniversité où il travaille, à Toulouse.
Dans son dernier ouvrage, Nouvelles approches des hommes et du masculin2 il présente létat de la recherche sur la masculinité dans une perspective pro-féministe. Il pose le cadre et les premiers résultats de ces recherches, les liens entre la problématique pro-féministe et léveil dune nouvelle conscience «gaie» par une une vingtaine de textes de chercheurs, principalement Français et Québéquois.
Les recherches australiennes, états-uniennes et anglaises sont aussi présentes par des textes de Robert W. Connell, Terry Kupers, Michael Kimmel, Jeff Hearn, qui nous font prendre conscience du retard de la réflexion et de laction dans les pays francophones. Il est vrai quil est extrêmement difficile, en tant quhomme, donc représentant de lidéologie dominante, déchapper au conditionnement social et danalyser honnêtement le système dont on est issu. Il peine, dans une équipe mixte de ne pas prendre le commandement, à travailler vraiment sur des bases non-oppressives. «On ne naît pas homme, on le devient et on/je le reste» analyse finement Daniel Welzer-Lang. Le travail sur la violence des hommes par exemple a tendance à déboucher sur une analyse symétrique entre lopression des femmes et la souffrance des hommes.
Tant que durera la domination masculine, rien ne peut être considéré comme acquis, tout doit être passé au crible de la critique non-sexiste, dans un paradigme de lasymétrie. Et hommes et femmes doivent se remettre perpétuellement en question, sans occulter leur appartenances, pour élaborer de nouvelles relations .
En fin douvrage, on quitte les champs habituels de la sociologie et de lanthropologie pour donner la parole à des intellectuels dautres domaines: la psychodynamique du travail avec Christophe Dejours, la politique avec André Liepietz, le cinéma avec une analyse des films dAndré Techiné, dont les personnages masculins expriment bien la fragilité des hommes opprimés eux aussi par le patriarcat. Et en chapitre final, le livre présente une action possible pour les hommes qui veulent tangiblement prouver leur refus du sexisme et du patriarcat: la Campagne Ruban Blanc.
Qui parmi les hommes de solidaritéS portera le ruban blanc lors de la manifestation du 8 mars ?
* publié par lIUED
- Disponible gratuitement au Service des publications de lIUED, tel. 022.906.59.50 ou e-mail: publications@iued.unige.ch
- Edité en 2000 aux Presses universitaires du Mirail, Toulouse