NON au hold-up des assureurs privés sur la santé !

NON au hold-up des assureurs privés sur la santé !

Depuis le coup de force de la droite
pour faire échouer le compromis de la 2e révision de la
LAMal, l’UDC a fait aboutir une initiative de pur jus
néolibéral, visant une forte réduction des
prestations dans l’assurance de base et un financement aux mains
des seuls assureurs maladie. Dans un même élan, la
majorité du Parlement a voté fin 2007 comme
«contre-projet» un article constitutionnel inspiré
de cette initiative, bricolé à la hâte, qui propose
une concurrence généralisée dans le système
de santé sous la houlette des seuls assureurs. Satisfaite,
l’UDC a retiré deux semaines plus tard son initiative!

Avec la vague de fond néolibérale, les mécanismes
de marché dans la santé se sont renforcés dans
toute l’Europe, tant dans les systèmes nationaux de
santé (construits sur le modèle dit de
«Beveridge», assurant la gratuité via
l’impôt) que dans les systèmes d’assurance
maladie dit «bismarckiens», où la protection maladie
est financée par des cotisations sociales en lien avec
l’activité productive. La tendance de fond, à
travers les réductions budgétaires, vise à
transférer des collectivités publiques vers les individus
la charge du financement en brisant les solidarités, et à
réduire les dépenses par une réduction de
l’offre de prestations et par des modèles dits
d’incitation à l’économicité des
soins, tant dans le secteur public que privé.

Le système de santé en Suisse reste le plus proche du
modèle américain, à savoir le plus
«libéral» et socialement le plus injuste de
l’OCDE, avec son financement via les primes par tête.
Après le refus populaire de la caisse unique en 2007, la voie a
été ouverte pour une accélération de la
transformation du système de santé helvétique en
vaste champ d’opérations marchandes, où la
santé de la population n’est évidemment pas un bien
commun à protéger, lié à la
solidarité, mais un objet de consommation en fonction des seules
capacités financières individuelles: ainsi
l’inégalité devant les soins s’accroît
en effet chaque jour davantage.

Un article constitutionnel à la sauce UDC

Inscrire dans la Constitution un renforcement de la
responsabilité individuelle dans le domaine sanitaire et mettre
la concurrence au cœur du système de soins, telle est la
face visible de l’article sur lequel le peuple se prononcera le
1er juin. La face «cachée», ce qui est pourtant
clairement annoncé dans les travaux parlementaires de 2007,
c’est la suppression pour les caisses maladie de
l’obligation de contracter avec l’ensemble des prestataires
de soins, c’est-à-dire de rembourser selon les tarifs en vigueur
les prestations des professionnels de la santé, toute profession
confondue,  et de laisser aux seuls assureurs maladie le choix des
professionne-le-s et des hôpitaux qu’ils voudront bien
rembourser selon leurs seuls critères, à savoir le
moindre coût et le régime de l’arbitraire le plus
complet!

L’autre volet, qui a su faire contre lui l’unanimité
des responsables cantonaux des affaires sanitaires et des finances, est
la mise en place d’un seul agent payeur (dit système
«moniste»), à savoir toujours les assureurs maladie,
auxquels les cantons devront céder la part de financement
qu’ils consacrent à la couverture des prestations de
soins, évaluée à 8 milliards par an.

Le front du refus s’élargit!

La conférence suisse des directrices et directeurs cantonaux de
la santé (CDS) a en effet dénoncé en
février ce projet «qui vise à transférer
sans examen aux assureurs maladie des deniers publics et le pouvoir de
décision sur l’offre. Les cantons ne pourraient ainsi plus
remplir le mandat qu’ils ont de garantir la prise en charge des
soins.» «Ce transfert des fonds publics aux caisses
contredit en outre les principes fondamentaux de l’action de
l’Etat» poursuit le communiqué qui rejette un tel
«diktat des caisses-maladie».

Le ministre Couchepin, apportant le soutien du Conseil
fédéral, a cherché à minimiser la
portée des changements liés à ce contre-projet en
défendant un«oui constitutionnel», mais sans
réussir à convaincre l’ensemble des associations
professionnelles, de défense des consommateurs-trices, et encore
moins les autorités cantonales concernées.

Le front du refus n’a donc cessé de s’élargir
depuis lors, ralliant ainsi les faîtières des associations
médicales, d’infirmières, des
physiothérapeutes, des pharmacien-ne-s, des patient-e-s,etc. qui
se retrouvent ainsi unies contre un système de santé
soumis aux lois de la concurrence!

Le fait qu’à Genève, l’association des
médecins (AMG) ait réussi à se mobiliser avec les
médecins de familles et à faire défiler plus de
cinq cents praticien-ne-s dans la rue dénonçant le diktat
des caisses-maladie, est révélateur des contradictions
qui traversent actuellement le corps médical traditionnellement
«libéral». La défense de la liberté de
choix de son médecin par le-la patient -e est évidemment
un argument clé contre l’article soumis à votation,
démontrant l’attachement du corps médical à
la primauté du lien de confiance dans la relation
thérapeutique. Mais le rejet du diktat des caisses passe aussi
par un refus de la logique des seules mesures d’économie
dans la santé au détriment de la qualité des soins
et du système de santé.

Le succès en votation est possible

A Genève, le Forum Santé a pris l’initiative
d’un appel à la constitution d’un large
comité unitaire contre cet article constitutionnel,
comité actuellement en formation. La perspective d’un tel
rassemblement de force est une des garanties du succès en
votation.

Sur un terrain analogue, rappelons l’enjeu de la votation
cantonale genevoise pour le maintien d’un contrôle
démocratique sur les institutions HUG, TPG et SIG, afin de
garantir par ce contrôle la qualité des prestations des
services publics, et non pas la logique d’une «nouvelle
gestion publique», axée sur les dogme du «moins
d’Etat» et de la primauté du marché!

Notre mouvement doit en effet affirmer la défense
cohérente du contrôle démocratique sur le service
public, dans la perspective de la défense des prestations
proches des besoins des citoyennes et citoyens. Ce qui inclut la
défense d’un système de santé sous le
même contrôle démocratique pour la satisfaction des
besoins de soins de la population et non pas de la gestion des
restrictions budgétaires.

Gillles Godinat