Réponses à quelques questions concernant nos initiatives pour le droit à un salaire minimum

Réponses à quelques questions concernant nos initiatives pour le droit à un salaire minimum

1 Pourquoi ne pas avoir indiqué le montant du «salaire minimum» dans l’initiative?

•L’initiative vise à construire un rapport de forces
pour fixer, dans un premier temps, le principe constitutionnel
d’un salaire minimum qui garantisse des conditions de vies
décentes. Imposer la reconnaissance de ce principe d’abord
est à nos yeux la meilleure base pour discuter et faire adopter
ensuite des lois d’application plus précises qui en
fixeront le montant et les mécanismes de mise à jour en
fonction de différents éléments, notamment le
«coût de la vie». A terme, la bataille lancée
aujourd’hui dans plusieurs cantons (TI, VD, GE, VS, NE…)
devrait aussi être relayée au niveau suisse par des
mobilisations et une initiative fédérale…

2 Quel sera le montant du salaire minimum?

•Comme l’indique le libellé de l’initiative,
toute personne exerçant une activité salariée doit
disposer d’un salaire lui garantissant des conditions de vie
décentes. La déclaration universelle des Droits de
l’Homme énonce le même principe depuis plus de 60
ans. Avec cette définition, le salaire minimum devrait se situer
aux environs de 4000 Fr. bruts par mois. Aujourd’hui, 1
salarié-e sur 8 ne les gagne pas! Et pourtant, un salaire
inférieur ne permet pas de jouir de vivre dignement. Rappelons
encore une fois que le montant du salaire minimum devra être
fixé dans une loi d’application et que son niveau
dépendra de la capacité de mobilisation des
salarié-e-s et de leurs organisations au moment de la discussion
de cette loi.

3 L’existence d’un «salaire minimum» ne
risque-t-elle pas de tirer l’ensemble des salaires vers le bas?

•Cette idée a été défendue longtemps
par les syndicats allemands et par leurs cousins suisses. Mais les
expériences d’autres pays ont montré que cela
n’était pas le cas, bien au contraire: en Angleterre,
après l’introduction du salaire minimum en 1999, la
tendance a été l’inverse… C’est
pourquoi, aujourd’hui, les syndicats allemands ont changé
d’avis et réclament un salaire minimum légal.
D’ailleurs, 18 pays de l’UE sur 25 disposent
déjà un salaire minimum légal. Avec
l’introduction d’un salaire minimum légal en Suisse,
les syndicats seraient aussi encouragés à négocier
des salaires minimaux dans les conventions collectives, ce qui
n’est souvent pas le cas, et à prévoir des montants
supérieurs au minimum légal.

4 Le salaire minimum concerne-t-il tous les gens quel que soit leur lieu de résidence?

•Le salaire est lié au travail. Il rétribue une
prestation et ne se préoccupe pas du lieu de domicile. Ainsi,
tout travail sur le territoire du canton ou pour une de ses entreprises
pourra prétendre à un salaire au moins égal au
salaire minimum. C’est pourquoi, cette initiative concerne tous
les salarié-e-s, autant les Suisses que les
étrangers-ères, les résident-e-s que les
frontaliers-ères, les travailleurs-euses «en
règle» que les sans papiers… Elle permet à
l’ensemble des salarié-e-s de combattre ensemble le
dumping salarial.

5 Le salaire minimum a-t-il une influence quelconque pour le revenu des chômeurs-euses?

•Comme son nom l’indique le salaire minimum concerne celles
et ceux qui ont un emploi, puisqu’il s’agit d’un
salaire. Cependant, il est clair que le salaire minimum aura aussi une
influence sur les indemnités chômage qui sont
calculées à partir du montant du salaire. Par ailleurs,
il donnerait également des indications pour fixer des seuils
décents pour les mesures cantonales en matière de
chômage, comme les rétributions de l’économie
«sociale et solidaire» et les autres revenus de
réinsertion.

6 Et les gens qui sont dépendants de l’aide sociale?

•Comme l’initiative le définit, tout-e
salarié-e doit pouvoir jouir de conditions de vie
décentes. Pour celles et ceux qui ne peuvent travailler ou qui
ont épuisé leurs droits à des prestations de
sécurité sociale, il devrait en être de même,
par le biais d’un revenu minimum garanti. En fait, dans la
majorité des cas, l’aide sociale est inférieure aux
montants nécessaires à la couverture des besoins sociaux.
Elle se cantonne à la satisfaction du strict minimum vital. Il
est donc impératif de combattre la dynamique actuelle qui
consiste à réduire les prestations d’aide sociale
en défendant le principe d’un revenu minimum d’aide
sociale qui permette de subvenir à ses besoins et à ceux
de sa famille. Enfin, le premier effet, de l’introduction
d’un salaire minimum garanti sera de faire sortir de l’aide
sociale une fraction – certes limitée – des dossiers
qui en dépendent aujourd’hui pour cause de bas salaire. et
de permettre aux familles à faibles ressources de mieux
«joindre les deux bouts».

7 Si je gagne plus que le «salaire minimum», quel sera
l’effet de l’introduction d’un salaire minimum sur
mon salaire?

•Dans l’immédiat aucun. Il faut cependant
considérer que la présence d’un salaire minimum va
entraver la sous-enchère salariale que pratique la
majorité des entreprises. Or, cette sous-enchère affecte
l’ensemble des salaires. Plus concrètement, si vous tombez
au chômage, vous pouvez être contraint à accepter un
emploi moins bien rétribué. Dans ce cas, le salaire
minimum fixe une limite inférieure au dumping salarial. Enfin,
la fixation d’un salaire minimum concerne aussi l’ensemble
des contribuables, qui doivent actuellement financer des
compléments d’aide sociale pour les working poor, en
majorité des femmes, qui ne peuvent tourner avec le salaire dont
ils-elles disposent. Est-il normal que nous subventionnions ainsi
indirectement les entreprises qui sous-payent leur personnel?

8 Quel salaire minimum pour les personnes qui travaillent à temps partiel?

•Ce point doit être négocié dans les lois
d’application. Le plus simple consiste à fixer le salaire
minimum au pro rata du temps travaillé. Ainsi, un travail
à 50% devrait être payé au minimum à 50% du
salaire minimum d’un temps complet.  II
Jacques François