Une législation toujours plus inique…
Une législation toujours plus inique
Le Conseil fédéral a
annoncé, en janvier 2009, louverture de procédures
de consultation relatives à des modifications de la loi sur
lasile (LAsi) et la loi sur les étrangers (LEtr). Des
projets qui accentuent, sil est possible encore, la
brutalité de la politique helvétique vis-à-vis des
étrangers et étrangères et des
requérant·e·s dasile. Des projets qui se
situent exactement sur le même plan que la politique
prônée par lUDC : renforcement de la lutte
contre les abus et stigmatisation des étrangers
délinquants !
Le gouvernement, sous la houlette de la conseillère
fédérale Widmer-Schumpf, prétend
« opposer » à linitiative
populaire de lUDC « pour un renvoi des
étrangers criminels » (initiative sur le renvoi)
des modifications de la LEtr qui durcissent encore les dispositions
existantes, notamment sur les possibilités de révoquer ou
de ne pas prolonger des autorisations de séjours en cas
dinfractions graves ou répétées. Comme
lindique le Rapport explicatif publié en janvier 2009 par
lOffice fédéral des migrations (ODM), le
contre-projet indirect « reprend le souhait des auteurs de
linitiative sans entrer en contradiction avec les droits
fondamentaux garantis par la Constitution ni avec le droit
international public » (p. 2), en dautres
termes, rend juridiquement « acceptables »
les propositions discriminatoires de linitiative sur le renvoi
de lUDC.
Renvoi des étrangers
« délinquants » et intégration
« réussie »
Ce contre-projet fixe dabord une nouvelle condition à
loctroi dune autorisation détablissement,
celle dune « intégration
réussie ». En plus des conditions légales
déjà existantes, à savoir un séjour
dau moins dix ans et labsence de motif de
révocation des autorisations de courte durée ou de
séjour, lautorité pourra refuser cette
autorisation, si elle considère que létranger ou
létrangère na pas
« réussi » son intégration,
dans le cadre du regroupement familial également. Le Rapport
indique qu« une intégration réussie
suppose le respect de lordre juridique suisse,
ladhésion aux valeurs fondamentales de la Constitution et
la volonté daccéder au marché du travail et
à la formation », ajoutant que « les
connaissances dune langue nationale revêtent
également une grande importance » [
]
« il y a par exemple violation des valeurs de la
Constitution en présence dun comportement qui bafoue
clairement les principes fondamentaux de la démocratie, de la
tolérance, de lautodétermination ou de
légalité entre femmes et hommes »
(pp. 9 et 12). De quoi donner toute latitude aux autorités pour
décider, de manière totalement arbitraire, que le
comportement dune personne étrangère ne remplit
pas cette nouvelle condition ! Le second volet du durcissement
légal introduit une révocation systématique de
toutes les autorisations, quelle que soit la durée du
séjour, en cas de dépendance durable à
laide sociale. Aujourdhui, la personne au
bénéfice dune autorisation
détablissement, après quinze ans de séjour
en Suisse, ne peut pas voir son autorisation révoquée
pour ce motif. Pour le gouvernement, « en pratique, cette
disposition a eu pour conséquence que des étrangers
dépendants de laide sociale ne fournissent plus
defforts personnels pour subvenir eux-mêmes à leurs
besoins » (p. 14). On ne saurait mieux emboucher
les trompettes de la propagande xénophobe sur les
prétendus abus dans laide sociale
Enfin, la
révocation de lautorisation de séjour est
automatique lorsque létranger ou
létrangère a été condamné
à une peine privative de liberté dau moins deux
ans, ou à plusieurs peines privatives de liberté, ou
encore à plusieurs peines pécuniaires
sélevant au total à 720 jours ou 720 jours-amende
au moins en lespace de dix ans. Peu importe donc quun ou
plusieurs sursis aient été octroyés ou que les 720
jours correspondent à une addition de peines
légères liées à des infractions de peu de
gravité ! Le couperet de la révocation pourra
ainsi, par exemple, sabattre sur un jeune étranger qui a
multiplié les « bêtises » dans
une période très courte de son existence.
Le droit dasile réduit à une peau de chagrin
Réduire encore plus les possibilités de déposer
une demande dasile, accélérer encore plus les
procédures et faciliter encore plus les renvois, cette nouvelle
révision de la LAsi sinscrit dans toute une série
de modifications qui ont fait du droit dasile une sinistre
comédie : le but recherché par
lautorité est avant tout de dissuader les personnes qui
fuient la guerre et les persécutions et non de leur offrir une
protection. Le projet mis en consultation comporte de nombreuses
restrictions et atteintes toujours plus graves aux droits fondamentaux.
Relevons en particulier que la révision projetée
écarte du droit à lasile les personnes
exposées à des sérieux préjudices ou
craignant à juste titre de lêtre au motif de
lobjection de conscience ou de la désertion dans leur
pays dorigine. Elle supprime la possibilité de
présenter une demande dasile à
létranger, dans les ambassades helvétiques des
pays de provenance des personnes concernées. Ces ambassades
nont pourtant, dans leur grande majorité, guère
brillé par leur ouverture en cette matière ! Mais
le signal donné est clair : le Conseil
fédéral préfère que les
requérant·e·s dasile soient livrés
aux mains des passeurs, deviennent les victimes dun trafic
juteux et doivent entreprendre un périlleux voyage dans
lillégalité. Les demandes de réexamen
après un refus dasile vont être à
lavenir traitées à la hussarde, avec une
procédure simplifiée à lextrême. En
cas de rejet de la demande dasile, le ou la requérante,
frappé dune décision de renvoi, devra, pour
obtenir une décision dadmission provisoire, apporter la
preuve formelle et non plus rendre vraisemblable que
lexécution de son renvoi ne peut être exigée
pour des raisons personnelles, du fait par exemple de labsence
dun réseau social dans le pays dorigine ou de
limpossibilité daccéder à des
médicaments vitaux. Une exigence de procédure qui limite
fortement la possibilité dobtenir une telle
décision.
De Blocher à Widmer-Schumpf, de Koller à Metzler, tous
les conseillers fédéraux et conseillères
fédérales en charge de la politique migratoire en Suisse
sinscrivent dans le cadre dune continuité, celle
dune politique mettant en uvre, de manière
systématique, un racisme dEtat, offrant dès lors
un terreau favorable à tous les préjugés à
lencontre des étrangers et
étrangères !