Canton du Jura: 10 francs la journée de crèche ?

Canton du Jura: 10 francs la journée de crèche ?

L’étude publiée
par les bureaux de l’égalité romands
« Quand le travail coûte plus qu’il ne
rapporte » a fait grand bruit et commence de produire ses
effets. Le gouvernement jurassien a présenté un
avant-projet de loi qui prévoit un tarif de crèche de dix
francs par jour, quel que soit le revenu des parents.

Pour garantir la couverture des coûts d’une crèche,
le canton et les communes continueraient de participer au financement
à hauteur de 74 % et pour le compléter est
prévu un prélèvement sur les salaires de
0.07 % pour l’employeur et idem pour le salarié
(cela représente 3.50 par mois pour un salaire de 5000 francs)
qui devrait donner droit à un bon d’accueil d’une
valeur de 16 francs par jour où l’enfant est à la
crèche. Mais attention, il y a des conditions. Les deux parents
(si deux parents il y a) doivent travailler dans une entreprise du
canton du Jura : exit les chômeurs·euses, les
personnes à l’aide sociale et celles qui n’ont
trouvé un emploi qu’à l’extérieur du
canton.

    La proposition reste intéressante pour les
parents qui sont dans la cible, mais ce n’est qu’un
avant-projet, et il faut bien voir qu’il ne suffit pas d’un
prix attractif pour résoudre tous les problèmes :
un coût raisonnable est une chose, encore faut-il assez de
places. Un tarif très attractif va augmenter
l’intérêt, mais pas les places disponibles !
Or dans toutes les régions en Suisse, le manque de places est
criant et le canton du Jura ne fait pas exception. Sera-t-il prêt
à augmenter son budget pour répondre à la
demande ?

    Sur le fonds la proposition jurassienne
s’approche de ce que nous revendiquons : la
gratuité de l’accueil et de l’éducation, de
la crèche jusqu’aux universités. Elle abandonne le
principe du tarif en fonction du revenu, mais nous estimons que
l’éducation, quel que soit son niveau, doit être
gratuite pour chaque enfant. C’est la fiscalité qui doit
faire que les plus hauts revenus participent davantage au financement
de l’Etat.

    Dans le canton de Neuchâtel, une initiative
cantonale « un enfant une place » est
déposée depuis deux ans. Elle demande une place en
structure d’accueil pour tous les enfants, dès leur
naissance et jusqu’à la fin de la scolarité
obligatoire, donc l’ouverture de nouvelles crèches pour
répondre à la demande. A quand la votation
populaire ? Face à l’urgence, largement reconnue
dans le canton de Neuchâtel (amplement sous-doté en
crèches et structures d’accueil), le Parlement devrait
prendre les devants et promulguer une loi en s’inspirant du
modèle jurassien, mais en l’élargissant dans le
sens de l’initiative neuchâteloise : tout enfant
doit avoir le droit de trouver une place si ses parents le souhaitent
– y compris les chômeuses et chômeurs ou les
personnes qui se trouvent à l’aide sociale. Un tel projet
serait non seulement la meilleure façon de concevoir, dès
le plus jeune âge, une socialisation bienvenue des enfants, quels
que soient leur origine et leur milieu, mais participerait aussi
à la création d’emplois et de places
d’apprentissage nécessaires en cette période de
crise. C’est ce que nous allons proposer au Grand Conseil.

Marianne Ebel et François Konrad