Deux fronts... une mobilisation sociale

Deux fronts… une mobilisation sociale


Au lendemain de la grande manifestation de Londres du 28 septembre, un commentateur dans The Observer relevait que c’était communément considéré comme une folie que de tenter de mener une guerre sur deux fronts à la fois. Or c’est bien ce que Tony Blair a entrepris expliquait-il.



Le premier front c’est celui consistant à entraîner la Grande-Bretagne derrière Bush dans la guerre en Irak, le deuxième front c’est de pousser les privatisations trois crans plus loin encore, avec l’imposition du financement (et de la gestion!) privés dit PFI (Private finance initiative) à tous les niveaux: écoles, hôpitaux, etc. Avec aussi la volonté publiquement affirmée d’«individualisation» du service public, de remise en cause d’une école «égalitariste», de rejet du «modèle monolithique envisagé lors de la création de l’Etat providence en 1945», etc. On pourrait rajouter encore un troisième front celui du maintien des bas salaires dans le secteur public en s’opposant aux revendications légitimes des travailleurs-euses concernés qui conduit à un grand nombre de grèves…


Pour treize milliards de livres d’armes


C’est sans conteste la tentative de mener cette double, voire cet triple bataille, qui rend la position de Tony Blair difficilement tenable et qui – a contrario – dynamise et renforce l’opposition sociale à sa politique. La plupart des discours lors de la grande manif de Londres relevaient l’incongruité honteuse consistant à affirmer n’avoir pas les moyens d’investissements de la collectivité dans le secteur public, dans les écoles, dans les hôpitaux, dans les infrastructures communes indispensables, mais d’affirmer que les moyens sont là pour financer la guerre prévue et un programme de dépenses militaires comportant les augmentations les plus massives depuis 20 ans… 13 milliards de livres sterling sont prévus pour deux nouveaux porte-avions et de nouveaux avions de combat!


Payer les pompiers ou les incendiaires


Les pompiers britanniques se battent pour des augmentations de salaires qu’on leur refuse. La Grande-Bretagne n’a pas les moyens de payer ceux qui éteindront les incendies dans ses villes et dans ses campagnes, elle aurait par contre les moyens d’envoyer des incendiaires à des milliers de kilomètres pour bouter le feu en Irak?


Voilà les questions concrètes que se posent les gens en Grande-Bretagne, voilà entre autres aussi pourquoi une douzaine de grands syndicats nationaux ont soutenu la manifestation du 28 septembre… La plus grande mobilisation syndicale sur une question internationale depuis les grandes maifestations contre le régime d’Apartheid en Afrique du Sud.


Blair battu chez lui


A la conférence annuelle même du New Labour, à Blackpool le lundi suivant la manifestation les délégué-e-s travaillistes ont infligé une défaite marquante de Blair, dans sa propre citadelle, en votant à plus de deux contre une résolution demandant un réexamen «indépendant» de la politique de financement privé des services publics. Près de 40% des délégué-e-s à cette même conférence ont en outre voté pour le refus total de toute action militaire contre l’Irak…


Sur le terrain de la manifestation le double rejet de la guerre et de la politique antisociale de Blair était matérialisé concrètement par une mélange étroit des slogans et des placards anti-guerre, de solidarité avec les Palestinien-ne-s, avec les requérants d’asile et des banderoles de sections syndicales, du secteur public en particulier!


Un fleuve humain


La composition «matérielle» de cette manifestation était en outre parlante et manifestait l’origine «d’en bas» de la mobilisation, son caractère «capillaire». Pas de grands tronçons d’organisation, mais un grand fleuve humain structuré par de petits groupes en particulier syndicaux, formés de quelques dizaines de personnes, autour d’une ou deux banderoles, venues ensemble d’une petite ville, d’un quartier ou d’un lieu de travail… une diversité extrême d’âge, de nationalité, de couleur, de profession.


Socialisme au rendez-vous


Sur le plan politique, la présence la plus marquante – même si elle n’était naturellement pas la seule – était incontestablement celle du Socialist Workers Party, dont nous rencontrons les représentant-e-s aux réunions de la Gauche anticapitaliste européenne. Impossible en effet de participer à la manif sans s’être fait proposer plusieurs dizaines de fois leur journal, comme ussi celui de la Socialist Alliance, ainsi que la signature de leur pétition contre la guerre… Pour les anglophones parmi nos lecteurs-trices: allez jeter un coup d’œil sur leur site www.swp.org.uk comme bien sûr sur celui de la coalition anti-guerre:


www.stopwar.org.uk


Le 31 octobre, la Coalition contre la guerre appelle à des rassemblements sur ou près des lieux de travail avec des départs en manif, à des occupations de lieux d’enseignements et le soir à des protestation au centre de toutes les localités avec sit-ins et blocages du trafic… Nous couvrirons évidemment cette mobilisation là aussi!


Pierre VANEK