Emploi et chômage

Emploi et chômage : L'observatoire sur la loi sur l'aide social et l'insertion réplique à Isabel Rochat

En réponse à la conférence de presse du 26 août  de la Conseillère d’Etat PLR en charge du Département de la Solidarité et de l’Emploi (DSE), Isabel Rochat, l’Observatoire de la LIASI (OASI) et de la LMC (Loi en matière de chômage), auquel solidaritéS participe, a tenu à rendre compte de ses observations sur le terrain. Nous lui donnons ici la parole.

Aujourd’hui, au moment où Isabel Rochat tire un bilan positif de la politique de sa gestion du chômage et de l’emploi, nous tenons à faire apparaître une autre réalité que celle de ses statistiques et discours volontaristes sur la réinsertion.

 

Individualisation du problème et sous-enchère salariale orchestrée

Il est demandé à l’Office cantonal de l’emploi (OCE) de faire d’avantages d’efforts en termes de surveillance et d’analyse du marché du travail. Or l’OCE est en surcharge et n’arrive plus à assurer une intervention personnalisée. Mme Rochat préconise également de mettre plus de pressions sur les de­man­deur·euse·s d’emploi afin qu’ils·elles se « mobilisent » et se « responsabilisent » d’avantage. Une fois de plus, l’OASI constate qu’on ne fait reposer le problème du chômage pratiquement que sur la personne en niant le problème structurel qu’est la crise de l’emploi.

Mme Rochat a bloqué au nombre de 800 les Emplois de solidarité (EDS) mais annonce d’avantage de « stages de requalification » (STARE). Ceci laisse présager une exploitation abusive des qualifications des de­man­deur·euse·s d’emploi et une sous-enchère salariale au profit de l’économie privée faisant fi des conventions collectives de travail auxquelles toutes ces personnes n’ont pas accès.

Quant aux Allocations de retour en emploi (ARE), certaines associations mettent en relation des petits employeurs en difficulté et des chô­meur·euse·s fragilisé·e·s. Résultat, au terme du soutien étatique qui dure en général un an, l’employé·e est licencié·e ou forcé·e de donner son congé. L’OASI préconise la pérennité des ARE subventionnée par l’Etat mais demande que les entreprises faisant appel aux ARE soient soumises à des critères de stabilité. Nous souhaitons également que ces em­ployé·e·s puissent bénéficier d’une formation qualifiante et certifiante.

 

Réalité du chômage occultée et précarisation croissante des chômeurs

Le taux de chômage officiel ne reflète pas la réalité. Il ne prend en compte que les de­man­deur·euse·s d’emplois inscrit·e·s au chômage. Il ne tient pas compte des étu­diant·e·s fraîchement di­plô­mé·e·s qui ne trouvent pas d’emploi et qui doivent attendre 6 mois avant de s’inscrire au chômage, pas plus que des personnes en recherche d’emploi ayant épuisé leurs indemnités de chômage ou n’y ayant pas droit qui émargent à l’Hospice général. Ceci sans compter les tra­vail­leur·euse·s frontaliers qui n’ont pas droit au chômage à Genève.  Sans parler de celles et ceux qui ne figurent nulle part, soit les chô­meur·euse·s arrivant en fin de droit mais qui n’ont pas droit à l’aide sociale car ils·elles sont hors barèmes. Pour ces der­niers·ères, il n’existe aucune statistique. Cette politique les laissant dans un no man’s land social dont on ne mesure pas l’ampleur des dégâts mais dont on sait qu’elle participe largement à la précarisation et à l’appauvrissement de nombreuses familles de notre canton.

La détérioration du marché de l’emploi complique la tâche des caisses de chômage qui n’arrivent plus à rendre une décision rapide. Les personnes qui se retrouvent ainsi sans ressources financières se tournent vers l’HG pour demander une avance qui leur est souvent refusée et sont renvoyées à l’OCE qui n’a pas les moyens de faire des avances. On assiste à un déni de droit des personnes précarisées qui selon l’art 28 de la LIASI oblige l’HG à intervenir en octroyant aux de­man­deur·euse·s d’emploi une aide financière provisoire ne serait-ce que pour subvenir à leurs besoins vitaux. Les diverses associations en lien quotidien avec ces personnes voient des situations dramatiques de précarisation pouvant, par exemple, amener à voir leur bail résilié.

 

Il faut créer de vrais postes de travail!

Concernant les seniors, l’OCE délègue à des boîtes temporaires leur placement se déchargeant de son rôle. De plus, les stages de « re­qualification » sont très rarement attribués aux chô­meur·euse·s de plus de 50 ans car dans ce cas l’Etat devrait les indemniser 6 mois de plus.

Aussi, notre Observatoire se basant sur l’expérience des associations et organismes œuvrant auprès des chô­meur·euse·s, quel que soit leur statut, et des bénéficiaires de l’aide sociale constatent que les mesures développées par le DSE ne répondent pas aux besoins des personnes désinsérées professionnellement. Pire, dans le cadre de la politique d’austérité actuellement en vigueur à l’Etat, elles compensent des emplois supprimés dans le secteur public ou subventionné par des postes de stages ou d’emplois de réinsertion.

Ainsi, les personnes en processus de réinsertion professionnelle devien­­nent-­elles captives d’un système qui leur fait le reproche de ne pas trouver d’emploi et qui pourtant les emploie gratuitement ou à bon compte. L’OASI constate qu’une politique de l’emploi digne de ce nom consisterait plutôt à réhabiliter ces stages en véritable postes de travail et à investir les moyens nécessaires au développement d’un suivi de qualité et de formation pour des postes de réinsertion répondant véritablement à cette vocation.

 

Pour l’OASI : Anne-Marie Peysson et Gérald Crettenand

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