La police neuchâteloise veut poursuivre les lanceurs de tracts solidaires des Palestiniens
Mercredi 13 août, une pluie de tracts dénonçant l’exportation d’armes suisses et l’achat par l’armée suisse de drones israéliens testés à Gaza ont été lancés à Neuchâtel sur le défilé militaire. SolidaritéS, qui soutient pleinement cette action, a rencontré un des riverains, Samuel Crettenand, qui trouvait insupportable d’avoir à subir une parade militaire à l’heure où des drones israéliens bombardent intensément Gaza.
Comment cela s’est-il organisé ?
SC : C’est comme simples citoyens et citoyennes que nous avons réagi et décidé de ne pas rester muets face à ce défilé militaire qui passait sous nos fenêtres. J’ai effectué des recherches archéologiques en Syrie, puis collaboré à des événements culturels à Gaza. J’ai des amis en Israël et en Palestine et je suis très préoccupé pour eux. Le 31 juillet, alors que je téléphonais à l’un d’eux, à Gaza, une énorme explosion a interrompu notre conversation. J’ai bien cru avoir assisté à la mort de mon ami en direct, heureusement ce ne fut pas le cas, mais le missile est tombée à 20 mètres de lui. J’ai ouvert une page sur Facebook (/samuel.crettenand). Quand on a appris que l’armée allait défiler dans notre quartier, on a décidé d'attirer l'attention sur deux pétitions (petition-proche-orient.ch et bds- info.ch) qui dénoncent l’exportation et l’importation d'armes au Proche-Orient. Ce sont une vingtaine de personnes qui ont spontanément accepté de soutenir notre action.
Comment ce lancer de tracts s’est-il déroulé ?
L’idée était d’envoyer ces tracts depuis les toits, sans que l’on voie précisément d’où, pas pour nous cacher, mais un peu à la manière furtive des drones. Mais le vent en a décidé autrement ! Le jour du défilé il y avait une forte tempête. On a fait un test et on s’est rendu compte que nos feuillets s’envolaient au loin. On s’est donc déplacés aux abords du défilé pour lancer les tracts en l’air. Le vent a fait le reste : il a emporté et dispersé nos feuillets partout. Pas besoin d’une catapulte pour arroser les autorités et les hauts gradés installés sur les tribunes. La tempête nous a bien aidés !
Comment votre action a-t-elle été reçue ?
J’ai vu un homme qui cherchait à ramasser les feuillets pour que personne ne puisse les lire, mais il a vite compris que son geste était inutile : nos petits tracts volaient en nombre et il y en avait partout, sur la route, dans les arbres, dans les buissons, sur le gazon… Les gens se sont précipités pour lire les tracts. A notre surprise, de nombreux spectateurs ont ramassé les tracts et les ont conservés. On voyait que notre message les touchait. La police nous a ensuite interpellés. Ils ont annoncé qu’ils nous dénonceraient au ministère public. Si c’est le cas, nous ferons opposition. Que nous reprochaient-ils au juste ? Ils n’ont pas pu le dire. On exprimait librement notre opinion sans empêcher le déroulement de ce défilé. En quoi nos feuillets les gênaient-ils ? A part sur le fond, bien sûr… La place a été ensuite méticuleusement nettoyée afin qu’aucune trace ne subsiste.
Comment évaluez-vous votre action ?
Notre message a bien passé. Nous ne sommes rattachés à aucun parti, mais des gens de droite comme de gauche nous ont témoigné leur soutien et trouvent choquant que l’armée suisse achète des drones israéliens testés à Gaza. On a fait la une de la presse locale. Le résultat dépasse tous nos espoirs.
Propos recueillis par Marianne Ebel