Le patronat veut dicter l'agenda politique

A peine les élections cantonales passées, les organisations patronales, celles des propriétaires immobiliers et des grands agriculteurs et viticulteurs ont présenté aux médias un programme de 23 pages, appelant à une orientation à droite toute de la politique vaudoise.

Le but  de la manœuvre paraît clair: en présentant une liste de revendications ultralibérales maximalistes, il s’agit d’obtenir que les traditionnels compromis gouvernementaux entre le Parti libéral–radical (PLR) – relais traditionnel des revendications patronales – et le Parti socialiste (PS) penchent le plus à droite possible. Les organisations d’employeurs auraient tort de se priver, du reste, vu la disponibilité du PS pour de tels marchandages, comme l’a montré l’an passé l’alliance en faveur des allégements fiscaux pour les actionnaires des grandes entreprises. Accessoirement, le maximalisme des revendications patronales permet à certains élus PLR de se poser en représentants d’une droite modérée, prêts à négocier pour promouvoir une partie de ces mesures en douceur. Le chef des finances cantonales P. Broulis a ainsi réagi dans la presse en «prenant bonne note de ces propositions. Mais je constate qu’il n’y a aucune projection chiffrée. C’est une listeww de souhaits, comme les syndicats en font souvent en demandant l’impossible pour avoir quelque chose.» (24 Heures du 24 août)

Conséquences

Reste que la mise en œuvre même partielle de ces propositions aurait des conséquences dramatiques pour la population du Canton, de même que pour l’environnement. Ainsi, sur le plan fiscal, les allégements proposés en faveur des contribuables les plus riches (réduction de l’impôt sur le revenu et la fortune ainsi que de l’impôt foncier, suppression de l’impôt sur les successions en ligne directe, etc.) entraîneraient environ 800 millions de pertes annuelles pour l’Etat et les communes, qui s’ajouteraient aux quelque 600 millions liés au volet cantonal de la réforme de l’imposition des entreprises: de quoi entraîner des plans d’austérité de grande ampleur.

Concernant le personnel de la fonction publique, la potion patronale amènerait une précarisation accrue et une pression à la baisse sur les salaires: ainsi par exemple de la proposition visant à transformer l’hôpital cantonal en un établissement autonome régi par un conseil d’administration, ce qui ferait perdre aux plus de 10 000 salariés de l’établissement les droits garantis par la Loi sur le personnel de l’Etat ainsi que les minima salariaux en vigueur.

Enfin, le programme patronal constituerait un recul grave en matière écologique. Son chapitre «infrastructures», en particulier, paraît tout droit sorti des années 1960, à moins d’avoir été directement rédigé par le PDG de LafargeHolcim: il réclame en effet des investissements massifs dans les routes cantonales, le développement des dessertes autoroutières, un accès facilité pour les poids lourds dans les centres-villes et la construction de nouveaux parkings en zone urbaine.

Hadrien Buclin