Cap sur Day Zero pour 4,5 millions de Sud-Africain·e·s

Vous préférez prendre une douche de cinq minutes? faire une lessive? ou tirer votre chasse d’eau cinq fois et faire votre vaisselle à la main? Depuis le 1er février, les 4,5 millions d’habitant·e·s du Cap sont confrontés chaque jour à ce choix, à l’approche du Day Zero, où 75 % des habitations de la ville seront privées d’eau courante.

Les autorités ont pour l’instant fixé la limite à 50 litres par personne et par jour pour repousser l’échéance. Et comme 45 % de la population ignore les restrictions, le Day Zero risque d’arriver en mai. La cause? Trois années de sécheresse liées au réchauffement climatique et au phénomène El Niño, une absence d’action politique et une mauvaise gestion de l’eau. Sans parler de la consommation excessive de nombreux ménages blancs.

La situation actuelle avait été prédite dès les années 1990 mais aucune mesure sérieuse n’a été prise pour contrer la baisse continue du niveau des barrages. Ce sont donc les citoyen·ne·s, et d’abord les plus pauvres, qui font les frais de politiques désinvoltes et injustes.

Car la gestion de l’eau au Cap est révélatrice du classisme et du racisme minant le pays. D’après le Daily Maverick, la consommation d’eau des quartiers pauvres, principalement noirs, est limitée depuis 2007, alors que celle des quartiers riches, surtout blancs, ne l’est que depuis août 2017. En 2010, la ville décidait d’augmenter les tarifs de l’eau pour les ménages utilisant moins de 50 000 litres par mois, autrement dit de faire payer davantage les plus précaires, qui consomment moins.

Aujourd’hui, ce sont encore les ménages les moins fortunés qui vont le plus souffrir des conséquences de la sécheresse. Les autres investissent dans le forage, dans des techniques de dessalement de l’eau de mer ou dans des toilettes chimiques. Parallèlement, l’agriculture est durement touchée: le prix des denrées alimentaires augmente et 37 000 personnes ont perdu leur emploi dans le secteur.

Une catastrophe écologique qui rappelle que la distribution de l’eau est avant tout un enjeu politique et social.

Ursula Rouge