Water Resources Group

Water Resources Group : Nestlé, l'eau et la Confédération suisse

De l’eau rouge comme du sang clapotant dans des bouteilles en plastique où s’affichaient des étiquettes «Nestlé» ou «$». Tel était l’accueil que des activistes de Multiwatch et attac réservaient aux actionnaires de Nestlé lors de leur AG le 12 avril 2018 à Lausanne.

La critique des militant·e·s visait à la fois l’offensive de Nestlé pour la privatisation de l’eau et le soutien de la Direction du développement et de la coopération suisse (DDC) à ce commerce de l’eau qui se chiffre en millions.

Le Water Resources Group (WRG) a été fondé il y a dix ans au World Economic Forum (WEF). Il a pour mission d’avoir «un monde avec assez d’eau sûre pour couvrir les besoins des gens, des écosystèmes et de l’économie » (2030wrg.org). Rien d’étonnant à ce qu’il entende travailler prioritairement avec des «partenaires» de l’économie privée, des gouvernements, des institutions internationales et même, soutient-il, des représentant·e·s de la «société civile».

Parmi les six entreprises partenaires du secteur privé, on trouve les leaders de l’eau en bouteille: Coca-Cola, Pepsico et Nestlé. La multinationale suisse y tient un poids particulier, vu que les conseils d’administration du WRG et de Nestlé ont le même président. En 2017, Nestlé a fait un profit d’un millard rien qu’avec le commerce de l’eau.

La Banque mondiale est l’un des «partenaires globaux» important. Sa politique visant à pousser des villes à privatiser l’eau, comme ça a été le cas en Afrique du Sud, a des conséquences dramatiques pour celles et ceux qui se voient privés d’accès à l’eau faute de moyens économiques suffisants. Certain·e·s parlent d’une «apartheid de l’eau».

La Confédération figure parmi ces partenaires. Non seulement, la DDC a fait des dons de plusieurs millions de francs, mais elle a aussi réservé au WRG une plateforme importante au Swiss Pavillon lors du forum mondial de l’eau de cette année au Brésil.

Comme le constate un journaliste de la Wochenzeitung : présenté comme ‘plateforme large’, le WRG se révèle être plutôt «un arrangement pour faciliter les contacts entre les grandes entreprises, les représentant·e·s des autorités et les banques de développement. Les entreprises veulent avant tout garder leur modèle de commerce et accéder sans entraves à l’eau».

Des voix de la société civile se font entendre à travers d’autres canaux que le WRG. Lors du Forum alternatif mondial de l’eau (FAME), une trentaine d’organisations travaillant sur l’eau au Brésil ont signé une lettre qui s’adresse à la DDC. Elles remettent en question le soutien de la DDC au partenariat public-privé dans le secteur de l’eau et louent les réseaux de distribution d’eau et d’assainissement de la Suisse. En outre, 27 organisations et partis suisses ont signé une lettre critique qui va dans le même sens et conclut avec la revendication «de prendre des mesures pour renforcer le contrôle démocratique de l’eau comme bien public».

Béatrice Schmid