L'urgence climaquoi?

Le 28 mai, le Grand Conseil vaudois a rejeté par 71 voix contre 69 l’initiative présentée par Yvan Luccarini, au nom d’Ensemble à Gauche. Elle proposait une nouvelle loi pour orienter l’action publique face à la crise climatique. Après une heure trente de débat, le parlement vaudois a préféré les déclarations creuses à l’action concrète.

Manifestation pour le climat, Lausanne, mars 2019. Photo: Gustave Deghilage

Manifestation pour le climat, Lausanne, mars 2019. Photo: Gustave Deghilage

Voici comment le député Yvan Luccarini rend compte de ces débats, souvent virulents, sur le blogue de Décroissance-Alternatives (les intertitres sont de la rédaction):

«Au cours du débat, les propositions du texte ont été qualifiées d’extrémistes et d’idéologiques, en les réduisant à un soi-disant programme électoraliste et communiste. Cette initiative a aussi été assimilée à une prise d’otages qui ne laissait aucune marge de manœuvre au parlement, un député PLR a même annoncé qu’il préférait déménager en Corée du Nord si une pareille loi venait à être acceptée…

Plus grotesque encore, l’une des mesures, qui proposait trois repas végétariens par semaines dans les structures gérées par l’État, a suscité par trois fois des réactions virulentes. Doit-on en déduire que certain·e·s député·e·s ont un problème dogmatique avec la consommation de fruits et de légumes?

La question de l’intégration du temps de trajet dans le temps de travail a également fait l’objet de deux interventions niant le rapport entre le climat et cette proposition. Peut-être faudrait-il rappeler à ces député·e·s que la mobilité est l’une des deux premières sources d’émission de COâ‚‚ dans notre canton, et que cette mesure méritait d’être envisagée, parmi d’autres.

Mesures « liberticides »

Enfin, la droite a attaqué le caractère obligatoire de certaines mesures en les considérant comme des propositions liberticides. Pourtant, bon nombre de celles-ci avaient plutôt un caractère incitatif. De plus, le projet de loi prévoyait que le plan de mesures soit largement débattu au sein de la population puis soumis au référendum obligatoire. Ces interdictions et limitations auraient donc été socialement construites et confirmées dans une perspective de préservation du bien commun, comme le sont par exemple la limitation de vitesse sur les routes ou l’interdiction de la publicité pour l’alcool et la cigarette.

Une faible majorité du parlement a finalement décidé d’enterrer cette initiative plutôt que d’en débattre en commission et notre proposition de renvoi immédiat n’a été soutenue par aucun groupe. Le Conseil d’État, quant à lui, a affirmé son souhait de garder seul la compétence d’élaborer le plan climat en déclarant qu’une loi n’était pas nécessaire. Proposera-t-il des mesures permettant au canton de Vaud de faire sa part pour limiter à 1,5° C le réchauffement climatique, comme le préconise le GIEC? Peut-on vraiment penser qu’un nouveau compromis à la vaudoise, comme le Conseil d’État en a l’habitude, suffira à répondre à l’urgence climatique?

Abandonner les énergies fossiles

Nous condamnons fermement l’arrogance de la droite du parlement qui a montré qu’elle avait peur non pas du réchauffement climatique, mais du nécessaire changement de paradigme, vers une décroissance choisie qui est, à notre sens, la seule voie permettant de résoudre la crise climatique. […]

La loi fixait notamment comme objectifs généraux l’abandon complet du pétrole, du charbon et du gaz naturel dans un délai de 20 ans, ainsi que l’atteinte de la neutralité carbone d’ici 2030 pour apporter une réponse au dernier rapport du Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC) de l’ONU. […]

Des objectifs spécifiques et des actions concrètes se déclinaient dans différents domaines: mobilité et transports de marchandises ; chauffage des bâtiments ; énergie ; agriculture ; travail et production ; finances publiques ; consommation.

La mise en œuvre de ces objectifs et actions aurait été définie à travers le ‹ Plan climat vaudois ›. Ce catalogue de mesures était assorti de délais pour chacune d’entre elles et leur financement assuré par de nouveaux prélèvements. L’ensemble de cette stratégie aurait fait l’objet d’une large information au public et, une fois finalisé, le ‹ Plan climat vaudois › aurait été soumis au référendum obligatoire ».

L’inaction choisie et la morgue de la droite rendent d’autant plus nécessaire la mobilisation de toutes et tous pour faire avancer la lutte contre le dérèglement climatique. Et tant pis pour les fossiles qui défendent les énergies de même origine.

Texte complet d’Yvan Luccarini