Une fiscalité forte contre l’accroissement des inégalités sociales

L’enquête d’Unia sur les écarts salariaux 2020 relève un creusement des inégalités ainsi que l’accroissement du versement de dividendes. Une occasion de rappeler les vertus d’une fiscalité redistributive, grande absente des conclusions de l’étude syndicale.

Ouvrier de Lafargeholcim
Le groupe LafargeHolcim a distribué 1,2 milliard de dividendes en 2020 alors que l’entreprise a bénéficié du chômage partiel en Suisse.

Basée sur trente-sept groupes suisses dont trente-trois cotés en Bourse, l’étude démontre que l’appropriation de la richesse créée par les salarié·e·s va en s’accroissant malgré la crise occasionnée par la pandémie. Ainsi, les écarts entre les salaires les plus bas et les plus élevés sont passés d’un ratio de 1 : 142 en 2018 à 1 : 148 en 2019. Le versement de dividendes a lui-même augmenté durant cette période pour se situer à un montant de 63 milliards de francs suisses. Enfin, la part d’entreprises qui versent plus d’argent aux actionnaires qu’à leurs propres salarié·e·s a également progressé, passant de trois à cinq entreprises de l’échantillon, dont la société Ems-Chemie aux mains des filles Blocher.

L’enquête publiée lève également le voile sur les sociétés qui ont profité du système d’indemnisation par le chômage partiel mis en place suite à la crise du Covid-19, tout en ne renonçant pas à verser des dividendes à leurs actionnaires pour un total d’environ 4 milliards de francs. Parmi elles, on retrouve notamment les groupes ABB et LafargeHolcim ou encore le groupe chocolatier Lindt & Sprüngli. Non contentes de spolier la richesse créée par leurs salarié·e·s en temps normal, ces sociétés assument ainsi parfaitement de mettre à contribution la collectivité publique durant la crise pour payer leurs actionnaires.

Défendre une imposition redistributive

Si l’on ne peut que suivre le raisonnement d’Unia sur les risques liés à un accroissement des inégalités sociales au regard de la crise ouverte par le Covid-19 et soutenir l’appel contre les licenciements liés au coronavirus, on a toutefois de la peine à oublier son manque de courage face au vote de la RFFA, sur lequel le syndicat avait opté pour la liberté de vote, fermant ainsi les yeux sur une baisse de l’imposition moyenne des entreprises de 14 % à 8 %. 

Aujourd’hui comme hier, l’impôt reste pourtant le meilleur outil de redistribution de richesses pour une société plus juste et égalitaire. Dénoncer le creusement des inégalités c’est bien, agir c’est mieux. C’est fort de ce constat que solidaritéS Genève a participé au lancement de l’initiative « Halte aux privilèges des grands actionnaires », qui vise à taxer l’intégralité des dividendes perçus. Des contre-offensives devraient être lancées partout où cela est possible pour faire payer directement aux bénéficiaires de la RFFA les sommes dont cette réforme a privé la collectivité.

Evelyne Wirthlin