Appel des mouvements sociaux adopté au Forum Social Mondial
Appel des mouvements sociaux adopté au Forum Social Mondial
Au FSM il y a eu des réunions quotidiennes de l«assemblée des mouvements sociaux», avec des altermondialistes du monde entier. Dans ce cadre ont eu lieu des débats: sur le bilan de Cancun, pour jauger les forces et faiblesses de la mobilisation et préparer le prochain sommet de lOMC à Hong Kong, sur le fonctionnement du réseau des mouvements et les moyens de lélargir, notamment en y intégrant les luttes en Inde et en Asie. Enfin, lAG finale conjointe avec celle du mouvement anti-guerre, a adopté la déclaration ci-dessous et des objectifs de mobilisation, dont le 20 mars contre la guerre et loccupation. (pv)
Nous, mouvements sociaux réunis en assemblée à Mumbai, en Inde, partageons les luttes du peuple indien, de même que celles des peuples asiatiques, et réitérons notre opposition au système néolibéral qui engendre crises économiques, sociales, écologiques et conduit à la guerre. Nos mobilisations contre les guerres et les profondes injustices sociales et économiques ont permis de démasquer le néolibéralisme.
Nous nous sommes réunis ici pour organiser la résistance et lutter pour la construction dalternatives au capitalisme. Nos résistances, nées au Chiapas, à Seattle et à Gênes, nous ont conduits à limmense mobilisation mondiale contre la guerre en Irak, le 15 février 2003, qui disqualifia la stratégie de guerre globale et permanente du gouvernement des Etats-Unis et de ses alliés, et à la victoire contre lOrganisation mondiale du Commerce à Cancun.
Loccupation de lIrak a révélé au monde entier le lien entre le militarisme et la domination économique des entreprises transnationales. Elle a en outre confirmé les raisons qui ont motivé notre détermination à nous y opposer.
En tant que mouvements sociaux, nous réaffirmons notre engagement à lutter contre la globalisation néolibérale, limpérialisme, la guerre, le racisme, les castes, limpérialisme culturel, la pauvreté, le patriarcat et toutes les formes de discrimination et dexclusion économique, sociale, politique, ethnique, de genre ou sexuelle, ainsi que notre volonté de voir respecter les orientations sexuelles et lidentité de genre de chacun-e. Nous nous opposons à la discrimination des personnes dotées de capacités différentes et des personnes souffrant de maladies incurables, en particulier celles atteintes par le virus HIV et le SIDA.
Nous luttons pour la justice sociale, le droit aux ressources naturelles (la terre, leau, les semences), les droits humains et citoyens, la démocratie participative, le droit des travailleurs et des travailleuses tels quénoncés par les traités internationaux, les droits des femmes et le droit des peuples à lautodétermination.
Nous sommes partisans de la paix et de la coopération internationale et défendons des modèles sociaux soutenables, capables de garantir les droits élémentaires et les biens et services publics aux personnes. Nous rejetons la violence sociale et patriarcale faite aux femmes.
Nous appelons à nous mobiliser le 8 mars prochain, journée internationale pour les droits des femmes.
Nous luttons contre toute forme de terrorisme, y compris le terrorisme dEtat, de même que nous nous opposons à lutilisation de la prétendue «lutte contre le terrorisme» pour criminaliser les mouvements populaires et les militants sociaux. Aux quatre coins de la planète, les dites lois contre le terrorisme restreignent les droits civils et les libertés démocratiques.
Nous faisons nôtre la lutte des paysans et des paysannes, des travailleurs et des travailleuses, des mouvements populaires urbains et de toute personne menacée de perdre son foyer, son travail, sa terre et ses droits. Partout se multiplient les luttes destinées à empêcher les privatisations, à inverser la logique qui les promeut, et à protéger les biens communs et leur caractère public – telles les luttes menées en Europe pour défendre les retraites et la sécurité sociale. La victoire du peuple bolivien et de sa gigantesque mobilisation pour défendre ses ressources naturelles, la démocratie et sa souveraineté témoigne de la force et de la puissance de nos mouvements, alors que simultanément se développent les luttes paysannes contre les transnationales et les politiques agricoles néolibérales, avec pour exigences la souveraineté alimentaire et une réforme agraire démocratique.
Nous appelons à lunité avec les paysans et paysannes lors de la mobilisation mondiale du 17 avril, journée internationale de lutte paysanne.
Nous nous identifions aux luttes des mouvements et organisations populaires indiens, et condamnons avec eux les forces politiques et les idéologies qui encouragent la violence, le sectarisme, lexclusion, et le nationalisme en sappuyant sur la religion et lethnicité. Nous condamnons les menaces, arrestations, tortures et assassinats de militants sociaux qui organisent les communautés dans leur lutte pour la justice globale, et nous dénonçons la discrimination fondée sur les castes, les classes, la religion, le genre, lorientation sexuelle et lidentité de genre. Nous condamnons la perpétuation de la violence et de loppression contre les femmes par le biais de modèles et de pratiques culturelles, religieuses et de traditions discriminatoires.
Nous soutenons les efforts des mouvements et organisations populaires qui encouragent, en Inde et en Asie, la lutte des peuples pour la justice, légalité et les droits humains. En particulier les luttes des Dalits, des Adivasis et des secteurs les plus opprimés et réprimés de ces sociétés. La politique néolibérale du gouvernement indien accentue la marginalisation et loppression sociale dont le peuple des Dalits a souffert au cours de lHistoire et quil subit encore aujourdhui.
Pour toutes ces raisons, nous soutenons les luttes de tous les exclus de la planète et appelons à nous joindre à lappel qui sera prochainement lancé par les Dalits en faveur dune journée de mobilisation pour linclusion sociale.
Le capitalisme, en réponse à la crise de légitimité quil connaît, utilise la force et la guerre pour maintenir un ordre économique impopulaire. Nous exigeons des gouvernements quils mettent fin au militarisme, à la guerre, et quils mettent un terme aux dépenses militaires. Nous exigeons également la fermeture des bases militaires nord-américaines, où quelles se trouvent, parce quelles constituent une menace pour lhumanité et la planète. Nous devons suivre lexemple de la lutte du peuple portoricain, qui a obtenu la fermeture de la base militaire états-unienne de Vieques. Lopposition à la guerre globale reste notre terrain commun de mobilisation, partout dans le monde.
Nous appelons les citoyens et citoyennes du monde à se mobiliser le 20 mars prochain, pour une journée internationale dopposition à la guerre et à loccupation de lIrak imposée par les gouvernements des Etats-Unis, de Grande-Bretagne et leurs alliés.
Les mouvements contre la guerre élaboreront leurs propres mots dordre et tactiques afin dassurer la plus large participation aux mobilisations. Nous exigeons le retrait immédiat des troupes doccupation de lIrak et soutenons le peuple irakien dans ses droit à lautodétermination, à la souveraineté et aux réparations pour les dommages causés par lembargo et la guerre.
La «lutte contre le terrorisme» ne sert pas seulement de prétexte pour maintenir létat de guerre et loccupation de lIrak et de lAfghanistan; elle est également utilisée pour menacer et agresser les peuples. Alors que parallèlement, le blocus criminel imposé Cuba est maintenu, tout comme la stratégie de déstabilisation du Venezuela.
Nous appelons à soutenir avec force la mobilisation en faveur du peuple palestinien, et tout spécialement le 30 mars, journée de la Terre en Palestine, pour revendiquer le droit des réfugiés au retour et manifester notre opposition à la construction du mur.
Nous dénonçons limpérialisme qui suscite à son profit les conflits religieux, ethniques, raciaux et tribaux, excitant la haine, la violence, et accentuant la souffrance des peuples – comme ce fut le cas pour plus de 80% des 38 conflits armés qui ont ensanglanté la planète en 2003, touchant principalement les peuples dAsie et dAfrique.
Nous dénonçons lutilisation coercitive, par les gouvernements, les transnationales et les institutions financières internationales, de lendettement insoutenable des pays pauvres. Nous répudions cette dette illégitime et exigeons son annulation inconditionnelle, ainsi que la réparation des dommages économiques, sociaux et écologiques, qui constitue une condition préalable à la pleine satisfaction des droits des peuples du Tiers Monde. A cet égard, nous soutenons tout particulièrement la lutte menée par les mouvements sociaux sur le continent africain.
Nous opposons notre voix aux réunions du G8, du FMI et de la Banque mondiale, principaux responsables de la spoliation des peuples.
Nous rejetons limposition daccords régionaux ou bilatéraux tels que lALCA, le NAFTA, le CAFTA, lAGOA, le NEPAD, lEuro-Med, lAFTA et lASEAN.
Nous sommes des millions à mener la lutte et à unir nos mobilisations contre un ennemi commun: lOMC. Les peuples indigènes luttent contre tout brevetage du vivant et toute atteinte à la biodiversité, à leau, à la terre, à lenvironnement, à léducation et à la santé. Nous sommes des millions à nous opposer à la privatisation des services publics et à partager nos luttes avec les jeunes et les étudiants qui revendiquent leur droit à lenseignement public et à un emploi digne leur assurant un avenir sans pauvreté ni violence.
Nous appelons chacune et chacun à se mobiliser pour leau, droit fondamental et source de vie à écarter de toute privatisation. Nous appelons en outre à reprendre le contrôle des biens communs et des ressources naturelles qui ont été livrés aux mains des intérêts privés et transnationaux.
Lors de la bataille victorieuse de Cancun, la mort du paysan Lee a incarné la souffrance de millions dautres paysans et celle des secteurs populaires exclus par le «libre marché». Son immolation symbolise la détermination qui nous anime et que nous opposerons à toute tentative de ressusciter lOMC.
Lagriculture, lalimentation, la santé, leau, léducation, les ressources naturelles et les biens communs hors de lOMC!
Cest avec la même détermination que nous appelons tous les mouvements sociaux du monde à se mobiliser contre la prochaine conférence ministérielle de lOMC, quelle se tienne à Hong Kong ou ailleurs, et à unir nos efforts dans la lutte contre les privatisations, pour défendre les biens communs, lenvironnement, lagriculture, leau, la santé, les services et léducation.
Pour toutes ces raisons, nous réaffirmons notre ferme volonté de renforcer le réseau des mouvements sociaux, afin de renforcer notre capacité de lutte.