Pride de Nuit et de demain

Un manifestant avec une pancarte "Sous les paillettes, la rage"
Geneva Pride 2021

L’événement qui se tiendra le 2 juillet à Lausanne, une manifestation suivie d’une soirée festive, est la culmination du travail d’environ un an d’une base militante forte et vénère qui souhaite se réapproprier les discours autour de ce que l’on appelle le « queer ». Face à des discours de plus en plus lissés et assimilés au capitalisme, qui visent le plus souvent à notre intégration dans la force de travail sans remettre en question les dynamiques sous-jacentes du néolibéralisme, le collectif a su développer une pensée politique forte retranscrite dans son manifeste (extraits en page 3).

Mais discutons stratégie. Si l’on ne saura que le 2 juillet si cet appel large à une radicalité

queer portera ses fruits, comment envisager le rapport aux questions queer dans les espaces politiques ? La tentation de parler de convergence

des luttes est sur toutes les lèvres. Fantastique. Bientôt, chaque thématique aura son mouvement social dédié et nous irons touxtes dans la même direction : celle de l’anticapita­lisme et de la révolution. 

Mais en termes d’organisation politique, ce n’est probablement pas suffisant pour les questions queer. En effet, si la convergence des luttes présuppose le plus souvent une adoption presque spontanée des autres luttes dans nos milieux, elle thématise rarement le rapport de force. À parler convergence des luttes, on risque de reproduire des schémas habituels : laisser les questions queer aux personnes concernées, rajouter éventuellement entre parenthèses les personnes LGBTQIA+ après les femmes sur nos programmes politiques. Mais ne pas intégrer de nouvelles théories politiques dans nos analyses. 

Car la convergence des luttes ne peut être le seul outil utilisé. Elle ne suffit pas à elle seule à créer suffisamment de conscience de classe qui passerait d’un collectif à un autre et permettrait un mouvement de masse. La réalité est qu’elle ne fait le plus souvent que créer l’intersection d’un diagramme de Venn. Je m’explique : le plus souvent, la convergence des luttes ne mobilise que les camarades investi·e·x·s déjà partout sans mobiliser la base totale. 

Au contraire, c’est le rapport de pouvoir qu’il faut mobiliser ici. Aux dépens d’une idée spontanéiste, la politique se construit au sein de nos espaces, et pas toujours de manière confortable. Car la réalité c’est qu’il faut bousculer, mettre mal à l’aise, se battre, avoir des conflits pour atteindre un réel changement. Bien souvent, on est bien content·e·x de simplement laisser aux collectifs en charge d’un sujet la marge de nos espaces plutôt que de travailler à laisser le rapport de pouvoir se former. C’est particulièrement vrai des questions queer, parce qu’elles sont bizarres, choquantes, transformatrices. 

Nous demandons que soit intégré dans la pensée politique de nos mouvements la construction sociale du sexe biologique, la remise en question de la famille, l’explosion des mœurs sexuelles et qu’on laisse les transpédégouines faire leur politique. 

Du coup, si une base politique queer est désormais construite, nous annonçons d’ores et déjà qu’il faut que plus rien ne soit comme avant. Nous sommes queer, nous sommes ici et nous ne quitterons pas la lutte.

Seb Zürcher