Retour sur les rencontres internationales

Du 24 au 30 juillet dernier, 26 militant·e·x·s et sympathisant·e·x·s de solidaritéS, ainsi que deux de nos camarades de Solidarité & Écologie ont participé aux 37e rencontres internationales des jeunes (RIJ) à Vieure en France. Notre délégation a également accueilli un camarade brésilien, membre du MES (Movimento Esquerda Socialista). 

Les Rencontres Internationnales

Les RIJ sont une semaine de discussions et formations auto-­organisée par et pour des jeunes appartenant à des organisations membres de la Quatrième Internationale – secrétariat unifié. Il s’agit d’une occasion unique pour de jeunes militant·e·x·s anticapitalistes et internationalistes de se rencontrer et d’échanger sur leurs différentes expériences de lutte. C’est également une opportunité de se former à des concepts issus des théories écosocialistes, féministes, anti-impérialistes ou marxistes qui forment notre base d’analyse commune de la société. C’est finalement la possibilité de dessiner ensemble le temps d’une semaine, par une organisation autogestionnaire et solidaire, les contours d’une société hors des rapports de domination, d’exploitation et d’appropriation du capitalisme globalisé. 

La semaine est ainsi divisée en journées thématiques : écosocialisme, féminisme et luttes queer, anti-impérialisme, anti-racisme, la place de la jeunesse dans la lutte des classes et enfin la question de la stratégie politique pour les partis et mouvements auxquels nous appartenons. Cette organisation permet de mettre en lumière l’importance de construire un anticapitalisme internationaliste, antiraciste, féministe, écosocialiste, qui ne hiérarchise pas les luttes et considère au contraire qu’elles se répondent et se nourissent les unes les autres.  

Mettre à contribution les savoirs de touxtes

Les journées débutent par une plénière matinale, qui fait office d’introduction à la journée et accueillent des intervenant·e·x·s plus agé·e·x·s, membres ou sympathisant·e·x·s de la IV. Le reste des discussions et du contenu – divisé entre ateliers, rencontres inter-délégations, commissions permanentes et espaces en mixité choisie pour les personnes sexisées, les personnes queer et les personnes non-blanches – est organisé et assuré par des participant·e·x·s. L’objectif : mettre les savoirs de tou·te·x·s, théoriques et pratiques, à contribution de la formation collective. 

À titre d’exemple, les espaces en mixité choisie sont des lieux où les personnes qui expérimentent au quotidien des oppressions et des violences systémiques en raison de leur identité de genre, de leur orientation sexuelle ou de leur « race », peuvent échanger et chercher à construire des réponses collectives et solidaires face à ces systèmes d’oppression. 

Les commissions permanentes, étaient organisées cette année autour de trois thématiques : l’écosocialisme, la lutte contre le fascisme et la solidarité avec l’Ukraine et avec les opposant·e·x·s russes au régime de Poutine. Ces commissions nous poussent à prendre conscience des différences entre chaque contexte local, mais aussi de l’interdépendance des différentes luttes. Elles permettent également de thématiser la responsabilité des pays des centres d’accumulation capitaliste, dont la Suisse, dans la destruction de la planète, la montée en puissance des autoritarismes et le développement d’une économie de guerre impérialiste.

Durant cette semaine, notre délégation a proposé plusieurs ateliers thématiques (voir encarts). Nous avons également assuré l’animation d’un espace fermé féministe avec l’objectif de renforcer les liens entre les différents mouvements féministes présents notamment en Europe et en Amérique centrale. Participer activement à l’élaboration des ateliers proposés durant la semaine est un moyen pour nous de partager et de faire vivre, au-delà de nos frontières, les réflexions et les luttes concrètes dont nous faisons l’expérience quotidiennement au sein de solidaritéS. 

Expérimentation politique

Cette semaine de rencontres est une occasion unique pour les jeunes militant·e·x·s de se former politiquement à travers un échange d’expériences et de connaissances extrêmement enrichissant, mais également humainement en tissant des liens d’amitié et de camaraderie. C’est également un moment privilégié pour les membres de nos différentes sections de se rencontrer et d’échanger sur l’organisation dont nous faisons partie, sur les perspectives de lutte en Suisse pour les mois et années à venir, et de renforcer les liens qui nous unissent ; sur une durée plus longue que les quelques heures généralement allouées à nos réunions interrégionales. 

  Dans un espace qui tente de prendre en compte au mieux les disparités économiques entre les différentes délégations, avec une participation financière différenciée selon le pays d’origine, les jeunes miliant·e·x·s sont amené·e·x·s à prendre en charge les tâches quotidiennes sur le camp et l’intégralité des traductions, mais également à assurer des espaces pour touxtes. 

Cette expérimentation politique demande régulièrement des ajustements et des discussions pour tenter d’améliorer nos modes de fonctionnement. Nous organisons donc des rencontres avec chaque délégation en amont, pendant et après le camp pour organiser collectivement une perpétuelle redéfinition en prenant en compte les critiques et manquements. 

Expériences du passé et luttes de demain

Bien qu’imparfaites, les RIJ sont un lieu précieux dans lequel un futur alternatif est possible, où le rêve révolutionnaire devient, le temps d’une semaine, réalité permettant ainsi à chacun·e·x de repartir avec toute la motivation, l’envie et la rage nécessaires pour entamer une nouvelle année militante, où tout est à construire. Elles nous permettent également de mettre concrètement en pratique les solidarités internationalistes que nous défendons en approfondissant nos connaissances, en partageant des luttes communes et en élaborant des projets concrets. 

Par exemple, à travers la commission dédiée à la situation en Ukraine, nous avons pu nous accorder sur une déclaration en solidarité avec la résistance du peuple ukrainien au nom des jeunes de la 4e Internationale. 

Il est essentiel pour de jeunes militant·e·x·s d’échanger sur les expériences du passé et de débattre ensemble des luttes de demain, et des enjeux tactiques et stratégiques auxquels nous devront faire face pour imaginer construire ensemble des alternatives futures radicalement anticapitalistes, écosocialistes, féministes, queer, antiracistes et internationalistes. La semaine des RIJ donne ainsi corps à la citation de Daniel Bensaïd, qui a été avec d’autres à l’initiative des premières rencontres des jeunes : « Nous avons eu davantage de soirées défaites que de matins triomphants… Et, à force de patience, nous avons gagné le droit précieux de recommencer. »

Effe Deux    Digital Nomade

La quatrième internationale

Les RIJ sont organisées depuis les années 1980 par la Quatrième Internationale dont solidaritéS est membre observateur. Elle est née dans le tumulte des années 1930 de la persécution et de la résistance à la centralisation autoritaire menée par Staline et ses alliés. 

La Quatrième Internationale a traversé le 20e siècle, coincée entre les feux des États bourgeois et des Partis communistes d’obédience stalinienne. Après plusieurs scissions, elle s’est partiellement recomposée en 1963, créant le Secrétariat Unifié, sa forme actuelle. 

L’Internationale a fondé les Instituts Internationaux de Recherche et de Formation à Amsterdam, Islamabad et Manille, qui organisent des formations politiques internationales.

Les Rencontres Internationnales avec Solidarités

Les ateliers présentés par solidaritéS

Violences genrées et anti-carcéralisme

Dans le cadre de cet atelier organisé avec le NPA, nous avons brièvement rappelé le caractère structurel des violences de genre. Nous sommes revenues sur les origines du féminisme anticarcéral aux USA et sur les débats qui ont traversé le mouvement féministe sur le rapport aux institutions juridiques et carcérales. 

En conclusion, nous avons présenté différentes alternatives à la justice punitive existantes aujourd’hui. Pour une introduction au sujet, voir l’ouvrage de Gwenola Ricordeau Pour elles toutes, femmes contre la prison (2019). NR

La création de la pride de nuit à Lausanne

Pourquoi avons-nous décidé en tant qu’activistes de prendre part à l’organisation d’une Pride ? Le constat est que les organisations LGBTQIA+ institutionalisées, globalement incapables ou réfractaires de se positionner plus à gauche, n’ont pas su capitaliser sur la force d’autres mouvements sociaux. 

Nous avons donc tenté d’expliquer comment une base théorique queer et anticapitaliste a permis l’émergence du mouvement Pride de Nuit et quels impacts cette base a eu sur notre manière de nous organiser et de viser un public large. SZ

La précarité des jeunes : grèves des livreurs

Le but de cet atelier était de présenter la grève des livreur·x·euses de SMOOD et de l’analyser sous le prisme de la gig economy, de la précarité au travail et de l’insécurité qu’elle génère. La chronologie de la grève, du contexte qui l’a précédée à la situation aujourd’hui, a permis d’articuler ces concepts autour d’un cas concret. 

L’atelier s’est conclu sur les conséquences de ce type d’emploi précaire sur les jeunes travailleur·x·euses, en termes de santé mentale et physique ainsi que pour leur parcours de vie. FB

Écosyndicalisme

Andreas Malm terminait une intervention précédant notre atelier en disant en substance que face à la catastrophe, il croyait davantage aux jeunes des mouvements climatiques qu’aux travailleur·euse·x·s.

Il donnait ainsi malgré lui la meilleure justification à la tenue de cet atelier : Refuser la « division du travail militant » entre activistes écolos qui défendent le climat ou l’environnement et syndicats qui défendent les travailleur·euse·x·s, sortir de la fausse alternative « climat ou emploi » et développer des luttes écologistes par et avec les travailleur·euse·x·s. GM