Teuf triste

Film choc, Sirāt est un road-movie philo­sophique à travers le désert au son de la techno.

Une image du film Sirāt
Image du film Sirāt

Dans le désert, un père et son fils sillonnent les fêtes clandestines à la recherche de Mar, sa fille disparue depuis plusieurs mois. Leur quête les amène à suivre un groupe de fêtard·es vers une ultime rave dans les terres brûlées où musique, errance et tension se mêlent dans une atmosphère à la fois sensorielle et apocalyptique.

Sirāt est l’une des œuvres qui a le plus secoué le festival de Cannes cet été. Un long métrage, reparti avec le prix du Jury, salué pour sa mise en scène inspirée, un montage brillant, un traitement sonore millimétré et une photographie splendide. Toutefois, en plus de sa forme filmique remarquable, c’est bien dans le fond que l’œuvre excelle.

La narration est structurée comme un road-movie philo­sophique, infusant une atmosphère musicale techno des plus prenantes. L’œuvre parvient, avec finesse et justesse, à porter une charge antimilitariste et antiautoritaire en suivant un collectif marqué par les stigmates sociaux et psychologiques. 

Une œuvre aux allures de manifeste libertaire racontant la lutte d’un groupe pour s’affranchir des chemins imposés et des souffrances infligées par les structures. Une quête de liberté qui se voit cependant rattrapée par la réalité violente de la guerre. 

Un film pessimiste dans lequel la teuf est traitée comme une manière de s’extirper temporairement des violences systémiques, mais qui reste un sursis dérisoire face à l’inéluctabilité de l’effondrement de notre système.

Sirāt est une œuvre puissante qui base l’entièreté de la transmission de son message sur sa mise en scène. Le film résonne comme un écho, un avertissement face à la trajectoire mortifère que nos sociétés empruntent avec une inquiétante précipitation.

Luca Califano