Manifestation le 5 juin à Genève: NON à la Loi contre les étrangers!

Manifestation le 5 juin à Genève: NON à la Loi contre les étrangers!

Avant même le débat parlementaire, début mai 2004 au Conseil national, Christophe Blocher a fixé la priorité et l’orientation du Conseil fédéral, à savoir la «lutte contre l’immigration illégale». Le discours xénophobe et sécuritaire de l’UDC devient celui du gouvernement. Et toute la discussion sur la politique migratoire, autour du projet de nouvelle loi sur les étranger (LEtr) comme sur la révision de la loi sur l’asile (LAsi), est menée sous l’angle de la prétendue équation «immigration = insécurité». La priorité est alors donnée à la traque aux abus, au renforcement du contrôle des frontières et à l’accélération des procédures de renvois. Christophe Blocher a annoncé qu’il allait du reste encore durcir les projets de loi en discussion, notamment en préparant dans les semaines qui viennent de nouvelles dispositions dans ce sens, pour le débat qui doit se dérouler au Conseil des Etats.

Etrangers = délinquants? Equation démagogique et xénophobe!

En 1994, l’Office fédéral de la statistique (OFS) a publié un rapport intitulé «De la nationalité des détenus». Ce rapport partait du constat que les personnes de nationalité étrangère étaient sur-représentées parmi la population carcérale. Or, on ne saurait tirer aucune conclusion simpliste d’un tel constat. Comme le relève l’OFS, «dans le cas des étrangers non-résidents, les infractions qui viennent à la première place (48%) sont des infractions que les Suisses ne peuvent pas commettre, puisqu’il s’agit de violations des dispositions de la LSEE ou de l’art. 291 du Code pénal (contravention à une décision d’expulsion du territoire de la Confédération ou d’un canton)».

En ce qui concerne les condamnations pour d’autres motifs, force est de relever que, statistiquement, les personnes de nationalité étrangère sont sur-représentées dans les catégories sociales potentiellement plus touchées par la transgression de normes pénales. En effet, le profil statistique du délinquant est celui d’être un homme, d’être jeune et d’origine sociale modeste. La proportion de cette catégorie est bien plus importante chez les migrants que chez les Suisses. Cette différence se retrouve donc dans la nationalité des détenus. La sur-représentation criminelle des étrangers ne constitue dès lors qu’un indicateur de la précarité et des discriminations sociales qu’ils subissent au quotidien.

Les détentions préventives sont ordonnées, de manière significativement plus importante, pour les prévenus non suisses. Selon l’OFS, «alors que 8 % environ des condamnés de nationalité suisse étaient en détention préventive en 1991, la proportion des condamnés de nationalité étrangère non résidents était cinq fois plus élevée (près de 39 %). Le fait qu’il y ait plus d’étrangers que de Suisses en détention préventive ne s’explique ni par le risque de récidive, ni par la gravité des délits. En effet, si dans 44 % des cas, les infractions commises par les Suisses placés en détention préventive ont effectivement été sanctionnées par des peines privatives de liberté, 28 % seulement des prévenus étrangers ont été condamnés à une peine de prison ferme».

Pour comprendre cette sur-représentation en détention préventive des personnes étrangères, il faut rappeler que l’un des critères déterminants qui la justifie est le risque de fuite, risque que les autorités judiciaires, instruisant les affaires pénales, jugent beaucoup plus élevé pour les étrangers que pour les Suisses.

Un débat parlementaire placé sous le signe du tout répressif

Le Groupe socialiste de l’Assemblée fédérale, à l’issue des débats du Conseil national, a publiquement affirmé qu’ «une avancée prudente vers une politique de l’immigration tournée vers l’avenir» avait été réalisée. Ce n’est nullement le cas et il est illusoire de prétendre que «une ouverture réaliste s’affirme progressivement». Au contraire, on assiste à un durcissement systématique des mesures répressives, pour les rendre prétendument plus efficaces. L’inscription dans la loi des critères de la circulaire Metzler de décembre 2001 pour l’obtention d’un permis humanitaire en faveur des sans-papiers ne constitue pas une «avancée» réelle. Cette circulaire ferme, dans les faits, la porte à une réponse globale à la situation des sans-papiers en Suisse, rejetant toute régularisation collective de leur statut de séjour. Prétendant répondre au cas par cas, elle n’octroie aucun droit aux sans-papiers et sert de véritable miroir aux alouettes.

Face à la détermination de Christophe Blocher, il ne sert à rien de tergiverser! Une politique respectueuse des droits des étrangers-ères vivant et travaillant en Suisse, quel que soit leur statut et leur origine, ne pourra se définir et prendre corps que par la construction lente et déterminée d’un rapport de force social. Jusqu’à l’adoption définitive par les Chambres de la nouvelle loi sur les étrangers, au cours de l’année 2005, il s’agira de mettre le plus d’atouts possibles de notre côté, par un travail d’information large et de discussion publique, pour permettre le lancement d’un référendum contre une législation unique, répressive et discriminatoire.

Dans l’immédiat, la manifestation du samedi 5 juin prochain à Genève (14h30, zone piétonne Mont-Blanc, devant la gare) marque une première étape dans notre refus d’une loi qui fait des immigrés-es un bouc émissaire, une loi à la sauce de Christophe Blocher, produisant toujours plus de sans-papiers!

Jean-Michel DOLIVO