Des mobilisations contre le démantèlement de l’Uni

Des mobilisations contre le démantèlement de l’Uni

Samedi 15 janvier les associations de l’immigration italienne sont montées à plus de 500 manifestant-es au château en défense de l’enseignement de la langue italienne. Lundi 17 janvier, c’étaient les étudiant-e-s de grec, aidés par des personnalités prestigieuses qui mobilisaient tout Neuchâtel en défense du grec ancien lors d’une soirée spectacle-débat au Théâtre du Passage. En parallèle, des étudiants en biologie refusant la disparition de leur discipline, faisaient signer eux aussi une pétition contre les «visions» que le rectorat avait espéré glisser par la petite porte, juste avant Noël, par un vote arraché au Conseil de l’Université (7 abstentions, 6 pour, 5 contre). Le 18 janvier, jour du Sénat, c’était au tour de La FEN (Fédération des étudiant-e-s neuchâtelois) d’appeler elle à une grande manifestation de toutes et tous. Dans le collimateur, le rectorat, qui prend ses décisions sans consulter ni les étudiant-e-s ni les professeur-e-s!

Discours connu: mondialisation libérale oblige, l’heure est aux économies: il faut «couper», «réorganiser», «développer des centres de compétence». Mais qui décide où couper, comment et combien? Selon quels critères?

Prétextant qu’il faut s’adapter rapidement au processus dit «de Bologne», le canton s’est doté en 2003 d’une nouvelle loi sur l’université. Le projet issu du Département d’instruction publique prévoyait de mettre à la tête de l’institution un «top manager» avec pleins pouvoirs (engager, licencier, fermer des instituts,…). Nous sommes intervenus au Grand Conseil pour barrer la route à ce projet, mais, minoritaires, nous n’avons pu que réduire les dégâts. Suite à une lourde bataille d’amendements, le Conseil d’Etat a dû arrondir les angles de la loi, mais l’esprit est resté: l’Université, conçue comme une institution indépendante de l’Etat, s’est dotée d’une direction qui, sans être toute puissante, se comporte aujourd’hui comme telle.

La nouvelle loi sur l’université (trop autocratique à notre goût) ne l’est apparemment pas assez aux yeux du nouveau rectorat qui a présenté «ses visions» sans consulter les Facultés concernées (alors que la loi l’y obligeait!), et évidemment sans rien demander non plus aux étudiant-e-s (auxquels il avait pourtant cherché à plaire en les saluant tout spécialement, cet automne, le jour de son entrée en fonction). Mais lorsqu’il s’agit de prendre des décisions, les premiers intéressés pourraient ne pas être d’accord, alors autant les éviter…

Après plusieurs coupes imposées en sciences, le temps est venu selon le recteur de rayer l’italien et le grec ancien des programmes universitaires neuchâtelois. D’autres enseignements ne perdent rien pour attendre.

Dans le mot «université», il y a universel

Une université n’est pas seulement une école professionnelle qui forme des cadres dont la société a besoin. C’est un lieu où se focalise l’héritage, la réflexion, la recherche de l’avenir; l’université est en interaction avec la société qui l’entoure. Certes, des choix doivent être faits. Mais tous ensemble!

Avant toute chose il faut associer avec respect toute la communauté universitaire – du corps enseignant aux étudiant-e-s – à toutes les décisions qui transforment l’Alma Mater. Supprimer une chaire ne saurait se réduire à une décision arrachée au Conseil de l’Université. Les professeurs, le corps intermédiaire et les étudiant-e-s doivent être les partenaires de premier ordre dans ce débat, mais pas seulement. Le monde politique et associatif, les partenaires sociaux, les citoyennes et les citoyens doivent être de la partie.

L’actuelle Loi sur l’Université est certes plus restrictive que ce que nous demandons ici, mais peut-on raisonnablement laisser démanteler pièce à pièce une institution de cette importance? Décidément NON.

Des solutions nationales et romandes devront être trouvées, mais concertées, et avec le maintien d’une université cohérente dans notre canton. Le premier pas pour engager cette discussion, c’est de retirer les projets de démantèlement en cours. C’est cette position que nous défendrons au Grand Conseil où nous sommes malheureusement encore trop peu nombreux pour l’imposer. La mobilisation citoyenne, toute la communauté universitaire et la rue nous y aideront.

L’Université de Neuchâtel est en danger. Nous la défendrons avec détermination, car nous ne voulons pas que notre région devienne une sorte de banlieue-dortoirs avec des usines qui s’implantent ou délocalisent au gré du cours de la bourse et de l’intérêt de l’économie néolibérale.

Marianne EBEL