Comptes de la Confédération: Merz maintient la pression
Comptes de la Confédération: Merz maintient la pression
Le 31
janvier, Hans-Rudolf Merz présentait les comptes 2005 de la Confédération. Étonnement
le
prestidigitateur sort un lapin du chapeau. Ces comptes présentent un
résultat «meilleur» de 1,7 milliard par rapport à ce
qui avait été prévu au budget, alors quil y a
quelques semaines ce même Merz pleurait encore misère, pour réussir à tromper
le personnel de la Confédération, qui na obtenu pour 2006
quune «allocation unique» de 0,5%, bien en deçà de
ce qui a été obtenu sur le plan salarial dans le privé.
Au
final, le déficit fédéral pour 2005 sera donc de 100
millions sur un budget dune cinquantaine de milliards
bref,
les comptes sont équilibrés! Par rapport au budget 2005, déjà vissé par
le «frein à lendettement» et contenant de nombreuses
coupes antisociales, cest de plus dun milliard que les dépenses
de la Confédération ont reculé lan dernier. Tout
en respectant ce même «frein», la Confédération
aurait pu dépenser 1,8 milliard de plus, dans le social, la formation,
le logement, pour lenvironnement, contre le chômage
A contrario,
cest la destruction demplois dans le secteur public
qui a, en particulier, été massive en 2005. La baisse des effectifs
du personnel fédéral a été de 2,5% lan dernier,
soit léquivalent de 865 postes à plein temps. Et ce nest
quun début, dans le cadre du programme d«abandon
des tâches» de la Confédération ce sont encore 4000
postes quil est prévu de supprimer dici 2010!
Si lon
ne tient pas compte des dépenses de transfert, en particulier
de la hausse des rentrées de la redevance sur les poids lourds, reversée à un
fonds pour les grands travaux ferroviaires et aux cantons, les dépenses
de la Confédération nont augmenté en 2005 que de
1,2%, alors que la croissance du PIB a été chiffrée à 2,8%.
La droite garde son cap: la part de lÉtat recule face au marché et
au secteur privé.
Déséquilibre orchestré
Commentant «son» résultat
Merz, a parlé de «surprise
réjouissante». Remake un peu éculé! Les comptes
2004 sétaient en effet déjà traduits par un «mieux» de
1,8 milliard par rapport au déficit budgété. Mais, comme
lexplique Merz aux médias: «Il faut faire attention
de ne pas relâcher la pression! Si 2005 a tous les aspects dune
belle histoire, il reste encore beaucoup de travail pour assurer léquilibre
durable de nos finances.» En réalité, cest
bien plutôt pour assurer le «déséquilibre» perpétuel
des finances de la Confédération que Merz et ses compères
travaillent de manière diligente, les «caisses vides» permanentes,
ou plutôt vidées en permanence, étant la condition pour
garder le cap des coupes antisociales et du «moins dÉtat.»
Au
lendemain de la publication des comptes 2005 équilibrés,
lUDC blochérienne est montée au créneau pour rappeler
son exigence, «même si cela fait mal», de 3 milliards
de coupes budgétaires supplémentaires dici 2008, conformément à la
motion du radical Schweiger, adoptée lan dernier par la majorité du
National.
Mais, avec des comptes équilibrés, comment justifier
des coupes aussi massives? En continuant à tourner la manivelle des
baisses de recettes de la collectivité, à coup de «réformes» de
la fiscalité et de cadeaux aux nantis.
Ainsi, si le 31 janvier Merz présentait
ses «bons» comptes,
le 1er février son département communiquait que «compte
tenu de la dynamique de la concurrence fiscale internationale» et
même si «plusieurs études comparatives attestent lattrait élevé de
la fiscalité de notre pays
» «La Suisse pourrait
perdre à terme cet avantage fiscal si elle ne fait rien pour le conserver
» Ainsi
de nouvelles «mesures fiscales» (traduisez cadeaux fiscaux)
simposent, «surtout en faveur des bases fiscales particulièrement
mobiles.»
Favoriser le capital au détriment du travail
Suit le catalogue des allégements fiscaux à lordre
du jour, notamment les nouveaux cadeaux aux actionnaires au travers de la «réforme
de limposition des entreprises» et des orientations pour
les «réformes fiscales au long cours». À ce
chapitre, on retrouve du classique, la «flat tax», un
basculement accru vers limpôt sur la consommation (TVA), socialement
injuste, mais aussi un «impôt dualiste sur le revenu.»
Kézaco?
Et bien, comme nous lexplique doctement le DFF: «La
principale caractéristique de limpôt dualiste sur le revenu
est que le barème nest pas le même pour les revenus de
lactivité lucrative et pour les revenus du capital. En effet,
alors quon continue dimposer le revenu de lactivité lucrative à un
taux progressif, on impose le revenu de la fortune à un taux proportionnel
plus bas […] Limpôt dualiste sur le revenu tient explicitement
compte de la différence de mobilité entre le travail et le capital;
il est donc spécialement avantageux dans le cadre de petites économies
ouvertes.» À la poubelle les principes de légalité,
même formelle, devant limpôt. Selon que vous soyez capitaliste
ou salarié vous payerez moins ou plus dimpôt pour le même
revenu!$
Qui doit revenir sur terre?
Face à cette machine de guerre, le PSS a
réagi
avec une
inanité particulière. «Les coupes aveugles nont
aucune raison dêtre!» titre-t-il dans son communiqué,
signalant ainsi son accord avec des coupes
raisonnables. «La
majorité bourgeoise du parlement doit maintenant revenir sur terre et
agir de manière raisonnable et responsable en matière de politique
financière.» déclare Hans-Jürg Fehr, président
du PSS. Le conseiller national socialiste Jean-Nöel Rey rajoute dans Le
Matin: «Notre politique dassainissement était une bonne
solution. Néanmoins, aujourdhui, il ne faut pas aller au-delà de
cette rigueur budgétaire. Toute autre attitude serait irresponsable.»
En
fait, ce qui est irresponsable aujourdhui, cest de ne pas
prendre la mesure de lampleur et de la profondeur de loffensive
néolibérale au service du capitalisme mondialisé, de la
nécessité non pas de prétendre en rendre ses tenants plus «raisonnables»,
mais de construire une opposition qui ait en effet «les pieds sur
terre», dans le terrain des luttes sociales qui se mènent à léchelle
de lEurope entière, le seul terrain sur lequel puisse sélaborer à terme
des projets alternatifs réels, en matière de fiscalité,
de services publics, de prestations sociales, etc.
Pierre VANEK