La police tue, la justice acquitte et la Municipalité protège

Durant le mois d’août, la ville de Lausanne a été secouée par la mort de Marvin, les incidents de Prélaz et les révélations sur la police municipale. Face à une police gangrenée par le racisme et les discriminations, les politiques et la justice ne peuvent se dédouaner de leurs responsabilités de longue date!

Un manifestant tient une pancarte "abolish the police"
Marche en souvenir de Michael Kenechukwu Ekemezie et contre les violences policières, Lausanne 7 juin 2025

L’été 2025 a été un rappel brutal du racisme, de la violence et du caractère discriminatoire de la police lausannoise. Trois personnes ont perdu la vie dans les mains de la police: Michael Kenechukwu Ekemezie, un homme noir décédé après une interpellation violente, Camila, une adolescente de 14 ans, et Marvin, un jeune noir de 17 ans, tous les deux décedé·es lors de courses poursuites en scooter avec des agents lausannois. Mentionnons également le cas de Siraj Mohamed Nur, un homme noir battu à mort par le personnel du restaurant Le Vaudois. La police et le Ministère public ont relâché le meurtrier quelques heures après son arrestation, là où elle retenait bien plus longtemps en garde à vue des jeunes qui avaient brûlé des poubelles. Ces événements troublants, loin d’être anodins, sont les conséquences de décisions politiques bien réelles.

Une politique raciste de lutte contre le deal de rue

Le trafic de drogues est à l’avant de la scène médiatique ces dernières années. Les médias bourgeois s’empressent de le dénoncer, accusant les dealers de rue, qui ne sont pourtant que la pointe de l’iceberg du réseau de narcotrafic. Pour y faire face, les autorités lausannoises et vaudoises suivent une logique répressive. En octobre 2024, le municipal chargé de la sécurité, Pierre-Antoine Hildebrand (PLR), a annoncé le triplement des effectifs de police employés dans la répression du deal. Une stratégie incapable de lutter contre le problème et dont la mort de Michael nous rappelle le fond raciste: s’en prendre aux dealers de rue, comme les opérations Strada au niveau cantonal, c’est se concentrer sur le côté visible du trafic de stupéfiants. Les autorités n’essaient pas de démanteler les réseaux de narcotrafic par le haut, mais s’attaquent au bas de l’échelle, souvent des personnes noires sans statut légal, exploitées et précaires. Pour ces personnes, le deal est une source de revenu indispensable et non pas un simple acte malveillant. 

Cette politique entretient et s’appuie sur le profilage racial, comme le révèlent des entretiens avec des agent·es ancien·nes ou en exercice. Elle conduit ainsi au harcèlement des personnes noires dans les rues de Lausanne, ainsi qu’à des interpellations violentes, voire mortelles, comme celles de Mike Ben Peter en 2018 et de Michael en mai 2025. Par conséquent, à la place d’amener des réponses concrètes au trafic des stupéfiants et à leur consommation, les autorités optent pour une stratégie discriminatoire, répressive et in fine létale.

Omerta face aux discriminations systémiques

En plus de cette posture raciste dans leur politique sur les drogues, il a été révélé en août que les autorités vaudoises et lausannoises entretiennent l’omerta depuis 2019 vis-à-vis du racisme et du sexisme endémiques dans la police. 

Cette année-là, elles avaient pris connaissance d’un rapport alertant sur des comportements racistes, sexistes et autoritaires dans l’Académie de police de Savatan et les rangs de la police. Elles n’ont jamais considéré sérieusement les témoignages du rapport, qui n’a pas vu le jour. 

Le scandale a éclaté cet été autour des révélations d’échanges racistes, sexistes, validistes, voire néonazis sur des boucles WhatsApp composées de dizaines d’agent·es de la police lausannoise. La Municipalité donne l’impression de lutter contre le problème en licenciant huit agents et en dénonçant un «racisme systémique». En réalité, elle protège l’institution en ne mettant pas en œuvre des réformes de fond, comme elle a fermé les yeux sur les graves problèmes dont elle a eu connaissance ces dernières années. Or si les alertes avaient été prises au sérieux, peut-être que Nzoy, Michael, Camilla et Marvin seraient encore en vie. 

Face au racisme, la résistance!

De nombreux collectifs, comme Kiboko ou Justice pour Mike, luttent au quotidien pour dénoncer le racisme systémique au sein de la police et des autorités politiques et judiciaires vaudoises. solidaritéS exprime tout son soutien aux familles des victimes et se tient au côté de ces organisations. 

En appui à leurs luttes, nos élu·es d’Ensemble à Gauche Lausanne proposent depuis des années au Conseil communal des mesures pour combattre le racisme systémique et pour éviter plus de morts inutiles. Pour n’en citer que quelques-unes, nous avons demandé la création d’une instance indépendante pour le dépôt de plaintes (2009), un récépissé à chaque interpellation (2017), l’interdiction du plaquage ventral (2022) et la suspension immédiate des policier·ères impliqué·es dans des affaires graves (2025). 

Comme par le passé, ce n’est que sous la pression de la rue que la Municipalité commencera à mettre en place ces mesures qui permettraient de sauver des vies et de limiter l’impunité policière. Il est plus que jamais crucial de renforcer le mouvement antiraciste!

Ph. K.