Droits des habitants, Rhino se défend

Droits des habitants, Rhino se défend

Sur les ondes de la Radio suisse romande, le 3 février,
le procureur général genevois Daniel Zappelli a tenu des propos
inquiétants.
Le Tribunal administratif de Genève venait de contrecarrer ses velléités
d’agir de manière contraire au droit. Sous prétexte d’un «trouble à l’ordre
public», inventé de toutes pièces, il voulait en effet évacuer
manu militari les habitant-e-s du squat «historique» Rhino. solidaritéS
a réagi par cette déclaration, intitulée: «C’est
Zappelli qu’il faudra expulser… du Palais de Justice!»

Monsieur
Zappelli a osé affirmer ce soir que les habitant-e-s de Rhino
s’étaient «tiré une balle dans le pied» en
déposant – et en gagnant! – leur recours contre sa décision
arbitraire les concernant. Ainsi, une attitude citoyenne consistant à faire
valoir ses droits, devant les tribunaux, est présentée par le
procureur comme devant entraîner de sa part des mesures de rétorsion.

Dans
ce sens, Daniel Zappelli a annoncé que les occupations de logements
vides seraient désormais traitées par lui comme une «situation
purement d’ordre pénal»
, en affirmant qu’il allait «faire
comprendre ce que tout le monde avait oublié a Genève, que les
squats, à la base, c’est une violation de domicile réprimée
par le code pénal!»

Non, Monsieur Zappelli, ce que «tout
le monde», sauf vous, a en
effet bien compris à Genève, c’est que les squats «à la
base» sont une réponse légitime à la pénurie
de logements, quand des logements ou logements potentiels sont maintenus vides
par leurs propriétaires à des fins spéculatives.

Les «squatters» occupent
des logements vides, ils ont raison de le faire, ils ne «violent» le
domicile de personne!

Le parti de Monsieur Zappelli, comme les autres partis
de l’Entente,
ont fait campagne récemment sur le thème «les squatters
ne feront pas la loi» pour convaincre les citoyen-ne-s de ne pas soutenir
le référendum lancé par les occupants du Carlton, qui
réclamaient des logements plutôt qu’un hôtel de luxe!

Ces
partis n’ont pas été suivis par une majorité de
la population qui a compris que, dans ce cas-là comme dans bien d’autres,
les occupant-e-s avaient fait œuvre utile en exigeant de faire primer
le droit au logement – inscrit dans la Constitution genevoise – sur
le droit des propriétaires.

Cette possibilité de faire primer
le droit au logement en situation de pénurie est d’ailleurs inscrite
jusque dans nos lois qui prévoient
l’expropriation de logements laissés abusivement vides!

En annonçant,
sa décision, de nature à «troubler
l’ordre public», d’évacuer immédiatement tout
nouveau logement occupé, ainsi que ceux déjà occupés,
avec une lecture du droit qui se réduit à ceux des propriétaires,
Monsieur Zappelli démontre qu’il est n’est pas à la
hauteur du poste qu’il occupe…

Marie-Eve TEJEDOR


A la suite des déclarations provocatrices de Zappelli,
le Conseil d’État genevois
a réagi. Citant la Constitution genevoise,
la loi sur l’organisation judiciaire
et la loi sur la police, le socialiste Laurent Moutinot a dû rappeler
au procureur
que c’est le Conseil d’État qui disposait
de la force publique dans de tels
cas et que Zappelli n’avait pas autorité
pour instaurer de son chef une quelconque «nouvelle politique»,
dans un
domaine lié à la crise du logement.

Le député libéral Luscher, a quant à lui
annoncé que
son parti déposerait un
projet de loi donnant au procureur «la
base légale nécessaire à son intervention.»

Reconnaissance,
certes, que celle-ci reposait jusqu’ici sur du vent, mais
annonce également d’une volonté de
confrontation qui demande que les
défenseurs de Rhino se remobilisent, sur le terrain… À suivre,
donc!