Si la pauvreté explose, c'est la faute aux pauvres!
Si la pauvreté explose, c’est la faute aux pauvres!
Cest
ce dont certains voudraient convaincre le reste de la population, les contributeurs
quon oppose aux bénéficiaires de laide
sociale pour casser les solidarités. Accréditer les préjugés,
affirmant que les pauvres sont responsables de leurs conditions de vie, quil
suffit de vouloir pour pouvoir, sert à légitimer les diminutions
de laide sociale et les nouvelles contraintes dont elle est assortie.
La
face visible locale de la crise économique et sociale est le prétexte
pour les autorités politiques du canton à «ordonner
la charité» et à remettre les pauvres à leur
place dans une organisation sociale faisant le choix de ne plus lutter contre
la pauvreté, mais de la gérer.
Quelques chiffresSelon lOffice fédéral de la statistique en 2003 en Suisse près de 1/8 des 20 à 59 ans étaient touchés par la pauvreté. En incluant les autres catégories, peut-être se rapprocherait-on de lestimation de CARITAS selon laquelle 1 Suisse sur 7 vit dans la pauvreté. En décembre 2005, Genève comptait 22692 demandeurs demploi pour 340 offres et le taux de chômage officiel était de 7,3%. Laide sociale a vu le nombre de dossiers croître de 17,5% en 2004. Depuis 1990, la progression a été de 213%. En incluant les chômeurs et les chômeuses en fin de droits du RMCAS, on atteint 243%. |
Ainsi, mis en demeure de sortir «à tout
prix» de
laide sociale et sous la pression accentuée dun minimum
vital réduit, les bénéficiaires de laide sociale
iront soit rejoindre les rangs du volant de main-duvre à bon
marché ainsi créé, soit se résigneront à un
salaire dexclusion.
Les élu-e-s de solidaritéS au Grand
conseil, trop souvent seuls, se sont évertués lors de la dernière
législature à dénoncer
et combattre la mise en coupe réglée de laide sociale.
Mais les vertus dont lautorité a paré ses initiatives
et récemment laide sociale version 2006, ont abusé nombre
de ceux qui auraient dû sopposer à lavènement
de la gestion par procédures de la détresse humaine et à linstitutionnalisation
de lexclusion.
Aujourdhui, sous prétexte de «redynamiser» les
bénéficiaires de laide sociale qui auraient, prétendument,
tendance à se complaire dans le giron de lassistance publique,
on sapprête à introduire à Genève dès
juillet 2006 les normes de la Conférence suisse des institutions daction
sociale (CSIAS), abaissant brutalement le montant du minimum vital et soumettant
loctroi de forfaits complémentaires à la réalisation
dobjectifs fixés en conséquence.
Or si loctroi de
laide sociale repose de longue date sur la mise
en place dun projet qui vise la réinsertion sociale ou financière,
cest un objectif au long cours dont les étapes ne se définissent
pas en fonction de procédures justifiant mois par mois loctroi
dune prime. Aujourdhui, dinstrument dynamique, lobjectif
devient un carcan, pour le bénéficiaire comme pour le professionnel,
les deux devant rendre compte chaque mois dun objectif réalisé.
De là à définir des objectifs alibis ou à pénaliser
lusager, il ny a quun pas.
Enfin, prévue dabord
pour juillet 2005, lintroduction
des normes CSIAS a été repoussée à juillet 2006.
Mais pour les tenants de lappauvrissement des pauvres ou pour les résignés
de laccroissement de leur nombre, pas question de renoncer aux millions
déconomies
Ainsi, le Conseil dÉtat a édicté de
nouvelles directives dassistance qui suppriment dores et déjà différentes
prestations. Là, trop cest trop! Le 9 février, à linitiative
des syndicats, des usagers et usagères ont largement participé à une
assemblée pour dénoncer les réductions de prestations
daide sociale, un livre blanc est en gestation
Gageons quil
ne sagit que dune première étape et que les sans-voix
reprendront dorénavant la parole. À eux, à nous, dagir
pour quelle ne reste pas sans réponse!
Jocelyne
HALLER