Salaire minimum, initiative invalidée: grand guignol ou grand conseil?
Salaire minimum, initiative invalidée: grand guignol ou grand conseil?
12 juin, le Grand Conseil genevois statuait sur la recevabilité de
notre initiative « Pour le droit à un salaire minimum ». Il sagissait
pour la droite de « démontrer » quelle était « manifestement non
conforme au droit supérieur », pour linvalider et éviter de la
soumettre au peuple. A la manuvre, comme rapporteur de majorité, le
libéral et premier secrétaire du Groupement des banquiers privés
genevois Cuendet, qui a affirmé quen ce qui concerne linitiative :
« Rien que le titre est contraire au droit supérieur », que dailleurs
son « but est déjà atteint » par le droit actuel.
Le libéral Jornot
prétendra que linitiative incarnerait « une véritable politique
économique » digne de la Corée du Nord, qui « propose de passer à une
économie planifiée… » Et dexpliquer qu« il est exclu en raison de
la répartition des tâches entre cantons et Confédération quun canton
soit compétent pour décider de passer à une économie planifiée. »
Bertinat, de lUDC, plaidera que le texte viole « la négociation
« libre » des salaires entre employeurs et travailleurs », libres
daccepter des salaires ne permettant pas de vivre dans des conditions
décentes. Il mentira en affirmant que « 94 % des secteurs sont couverts
par des CCT qui imposent des salaires minimums. » LUDC Catelain
prétendra – au rebours du droit – qu« il y a au minimum doute sur la
recevabilité, donc on doit sabstenir ou refuser ».
Barillier, des
syndicats patronaux, vantera le «dispositif fédéral complet» protégeant
dit-il contre toute sous-enchère salariale… Des bancs du MCG,
Stauffer se montrera platement libéral, ressassant la rengaine
patronale selon laquelle « tout le monde serait payé au minimum » et
que linitiative « paupériserait la population genevoise ». Il
claironne que le MCG la combattra énergiquement, mais a voté pour
linvalider… et ne pas avoir à le faire. Son comparse Jeanneret dira
qu« une réglementation obligatoire desservirait les travailleurs »…
En effet : « Les femmes de ménages gagnent mieux que les vendeuses au
bénéfice dune CCT à cause du respect du travail existant en Suisse »
et du fait de leur rapport « individuel entre adultes » avec leur
employeur !
Longchamp, au nom du gouvernement, donne son « assurance
que le Conseil dEtat combattra linitiative « dune seule voix »
devant le peuple », après avoir uvré pour que le celui-ci nait rien à
dire. Un Grand Guignol que la bonne prestation de la rapporteuse de
minorité, la socialiste Emery-Toracinta na pas réussi à élever au rang
de débat sérieux.
Prochaine étape juridique pour linitiative, notre
recours au Tribunal fédéral. Au plan politique, nous rappellerons aux
citoyen·ne·s cet automne qui a poignardé dans le dos le droit à un
salaire « garantissant des conditions de vie décentes ».
Pierre Vanek