Elections vaudoises

la majorité de droite se renforce

Les singulières illusions de ceux et celles qui rêvaient tout haut d’une double majorité de gauche au parlement et au gouvernement vaudois n’ont pas fait long feu. Les élections ne se résument pas à la logique mathématique des projections, elles traduisent d’abord la réalité d’un rapport de force sociopolitique.

Dans un canton souvent atone sur le plan des luttes sociales et des mobilisations politiques, à l’image du pays tout entier du reste, le léger renforcement de la droite (prioritairement de l’UDC) et la poussée des «centristes» de la gauche (les Verts), n’ont fondamentalement rien de surprenant. L’effondrement de la députation A Gauche toute !, qui passe de douze à cinq députés mérite quelques explications supplémentaires.

Sans pouvoir se livrer à une analyse plus exhaustive des résultats compte tenu des délais de bouclage du journal et des carences inouïes du site de l’Etat de Vaud – dont la maintenance est désormais en mains privées – on constate d’une part que l’UDC est devenue le deuxième parti de la droite (26 sièges et 17,3% des élus) derrière les radicaux, pourtant affaiblis (29 sièges et 19,3%), mais devant les libéraux (22 sièges et 14,7%). A gauche, le PS est stable (39 élus et 26%), les Verts progressent (24 sièges et 16%) et le POP & Gauche en mouvement régresse (5 élus, 3,3% des sièges). En tenant compte du «centre chrétien» (PDC, PEV, UDF) et de la scission radicale de Riveria libre, la majorité de droite est de 82 sièges contre 68 à la gauche. Ajoutons que la campagne des Verts («Pour que les belles idées vivent, il faut garder le sens de la mesure») fut fidèle à leur positionnement «ni gauche, ni droite, mais devant».

Quelques raisons du recul d’AGT

Aux élections cantonales de 2002, A Gauche toute! n’existait pas. Les résultats électoraux furent donc ceux du POP & Gauche en mouvement. La comparaison en terme de suffrages laisse apparaître une très légère croissance au niveau cantonal (4,92% contre 4,46%), due pour l’essentiel à une présence plus dense dans les arrondissements. Le nouveau découpage électoral a toutefois dilué certains «bastions» (Renens dans l’Ouest lausannois, p. ex.), entraînant moins des pertes de voix que d’abord des pertes de sièges. Contrairement à ce qui était attendu, les nouveaux arrondissements n’ont pas favorisé «A Gauche toute!» ou la gauche en général, même s’ils ont bien affaibli le Parti radical.

Au-delà de ces questions «techniques», des raisons politiques doivent être évoquées. Focalisée par la lutte pour le Conseil d’Etat, la campagne médiatique a été polarisée: union de la droite contre union de la gauche. Le mécanisme de la liste unique au 1er tour – à laquelle solidaritéS s’était opposée – à pleinement joué pour gommer toute différence politique de fond entre Josef Zysiadis et les deux candidat-e-s du PS. Le bon score de Pierre-Yves Maillard, premier socialiste à être élu au Conseil d’Etat au premier tour, s’explique par sa capacité à se donner une posture «de gauche» (campagne médiatique pour la caisse unique aidant) tout en revendiquant fièrement la part de la gauche à la politique d’austérité du canton. La campagne d’AGT pour le Grand Conseil ne pouvait seule contrebalancer cette prise en tenaille dans logique sociale-démocrate. Par ailleurs, on peut aussi constater que ce sont surtout les régions dans lesquelles le POP possédait encore une force d’inertie «historique», sans présence sociale et politique actives autre qu’institutionnelle, qui reculent (comme le Nord vaudois ou Nyon). A Lausanne – où notre camarade Jean-Michel Dolivo a été fort bien élu – pourtant bastion de Pierre-Yves Maillard, la résistance est meilleure (11,24% des suffrages pour AGT). Ajoutons encore deux remarques complémentaires. L’éviction des anciens parlementaires, générale dans tous les partis, traduit non seulement une volonté de renouvellement de l’électorat, mais aussi le fait qu’à la gauche de la gauche, une simple présence institutionnelle, même de bonne qualité (comme celle de Jean-Paul Dudt, spécialiste des finances et de la fiscalité), ne suffit pas. Une présence sur le terrain social et politique est absolument nécessaire, voire même prioritaire. Enfin, n’oublions pas qu’en 2002 plusieurs listes du POP & Gauche en mouvement, en particulier dans l’arrière-pays, étaient en fait des listes communes POP-Les Verts. D’où un effet probable de surreprésentation électorale.

Cela dit, si ce résultat marque certainement une pause dans la construction d’AGT, il n’en signifie pas l’arrêt. Même si la discussion sur les rapports avec le Parti socialiste et les Verts doit être menée, elle ne fera pas obstacle à la poursuite du développement d’un front antilibéral résolu. Les voies de sa progression se situeront simplement sur un autre plan que celui des élections et de la présence institutionnelle et c’est tant mieux.

Daniel Süri

 

Conseil d’Etat: une liste à trois pour battre la droite au 2e tour !

L’Assemblée cantonale de A Gauche toute! (POP & Gauche en mouvement et solidaritéS) s’est tenue à Lausanne ce 12 mars 2007. Elle a choisi de participer à une liste commune avec le PS et les Verts au second tour des élections pour le Conseil d’Etat vaudois afin d’opposer à l’offensive néolibérale une majorité de gauche et écologiste au gouvernement. En ce sens, à la quasi-unanimité, A Gauche toute! (AGT) a décidé de présenter au deuxième tour son candidat Josef Zisyadis avec la candidate socialiste Anne- Catherine Lyon et le candidat Vert François Marthaler.

A la majorité de 62 voix contre 24 et quelques abstentions, l’assemblée a également décidé de signer le projet de mesures prioritaires pour le programme de législature 2007 – 2012. Ce projet avait déjà été accepté à la fin 2006 par les congrès des Verts et du PS. La minorité, représentée essentiellement par solidaritéS, était partisane de ne pas le signer et de présenter Josef Zisyadis sur la base du programme d’A Gauche toute!, considérant que seul ce programme permettait de s’opposer à la politique néolibérale menée par le gouvernement en place lors des dernières législatures. AGT mènera sa campagne au second tour pour une gauche 100% à gauche, qui refuse d’inscrire ses propositions dans le cadre des politiques d’austérité et des caisses vides, qui se bat contre les licenciements, qui lutte contre les inégalités sociales et les discriminations, qui s’oppose fermement à la remise en cause des services publics. Bref, une vraie gauche de gauche!