Retour en emploi des chômeursLe privé s’en chargera!

Retour en emploi des chômeurs
Le privé s’en chargera!

François Longchamp, conseiller d’Etat chargé du
départementde la Solidarité (sic!) et de l’Emploi,
a annoncé, il y a quelques jours à la presse, le
succès du programme de reclassement des chômeurs-euses de
longue durée réalisé par une entreprise
privée, Hestia Parteners. Ce succès est estampillé
par l’incontournable Yves Flückiger, caution universitaire
et scientifique de tous les projets de la république qui, sous
couvert d’une réorganisation de l’Etat, visent tous
à une diminution des prestations de l’Etat.

Programme de réinsertion…

Ce programme de retour en emploi comprend deux groupes de 100
chômeurs-euses de longue durée choisis au hasard, Hestia
Parteners s’occupant d’un groupe, l’ORP (office
régional de placement du département de M. Longchamp) de
l’autre. Sans entrer dans les détails, les principaux
résultats peuvent s’énoncer de la manière
suivante:

  • Après six mois 30% (30 personnes) du groupe Hestia a
    retrouvé un emploi contre 20% (20 personnes) pour le groupe de
    l’ORP.
  • Le coût de l’opération est plus
    élevé de 66% pour le groupe Hestia que pour le groupe de
    l’ORP.
  • L’emploi retrouvé est un emploi à plein temps
    pour 62% du groupe Hestia et pour 83% du groupe ORP, avec environ 60%
    d’emploi à durée indéterminée pour
    l’ensemble des emplois.

Vu sous cet angle, Hestia Parteners fait un peu mieux que l’Etat
avec cependant un prix nettement plus élevé.

La différence du nombre de placements (10) entre Hestia et
l’ORP a nécessité l’intervention d’Yves
Flückiger pour donner un verni scientifique à ces
résultats. Pourtant, la première question qui vient
à l’esprit n’est pas posée. L’ORP
parviendrait-il au même résultat si on lui allouait les
mêmes ressources financières par chômeur
qu’à Hestia? Ce n’est là qu’une
question parmi d’autres:

  • Hestia avait chargé un groupe de 6 personnes de
    s’occuper de leurs 100 chômeurs-euses. On sait qu’un
    seul placeur de l’ORP accompagne en moyenne plus de 100
    chômeurs-euses. Comment s’est réellement
    organisé le travail à l’ORP pour ce programme?
  • Le dispositif d’Hestia s’applique-t-il de
    manière égale à l’ensemble du groupe ou un
    premier tri a-t-il été fait pour mettre l’effort
    sur les employé-e-s les plus faciles à placer?
  • Quel rapport Hestia entretient-il avec les chômeurs-euses? Aide réelle ou pression?
  • Aucun élément dans le rapport sur les salaires et
    la qualité des emplois retrouvés. Correspondaient-ils
    à l’attente des chômeurs-euses?
  • La méthode Hestia n’est pas divulguée.
    Bizarre! Quel secret méthodologique possède-t-elle qui ne
    serait connu de l’ORP?
  • Le placement des 100 premiers chômeurs-euses de
    l’expérience peut-il fournir des indications pour le
    placement des milliers de chômeurs-euses qui attendent un
    travail?

Ces questions n’ont guère embarrassé les
journalistes pour qui ce projet démontre une fois de plus la
supériorité du privé sur le service public. En
particulier, le journaliste de la Radio Romande n’a pas eu le
moindre doute, ni la moindre question pertinente sur ce projet, la
démonstration de l’efficacité du privé
étant à ses yeux éclatante. Merci Monsieur
Longchamp.

… et aide au licenciement

C’est vrai que Hestia Parteners possède une certaine
expérience dans le domaine de l’emploi, puisque sur son
site (www.hestiaparteners.com), on trouve pour les chefs d’entreprise la publicité suivante:

« Lorsque les Dirigeants prennent
conscience que les conditions économiques et sociales ne
permettent plus de valoriser le travail des hommes de façon
pérenne, nous intervenons à deux niveaux:




Préventif: pour aider les
Dirigeants à identifier ce qui permettra de minimiser voire
d’éviter l’impact social, et en tout cas de le
rendre plus acceptable par la collectivité.Curatif: afin que la
transition se passe au mieux… »

En résumé, nous Hestia, nous vous aidons à
licencier sans bruit et sans vague! Bientôt, nous prendrons
nous-mêmes en charge la remise en emploi de ces
travailleurs-euses au moyen d’un programme payé par
l’Etat.

Tout cela plaît énormément à Monsieur
Longchamp qui vient de lancer un appel d’offre pour continuer ce
type de programme, mais de manière plus large. Il pourra alors
compter sur un nouveau rapport de Monsieur Flückiger truffé
de «toutes choses étant égales par ailleurs»
alors que «rien n’est égal, ni par ici, ni par
ailleurs». Mais qui s’en soucie?

Jacques François