Agir pour les droits des migrants

Agir pour les droits des migrants

Toute discrimination est inacceptable. Celles et ceux qui vivent et
travaillent en Suisse doivent pouvoir disposer des mêmes droits,
quel que soit leur statut ou leur pays d’origine.
Indépendamment de la nationalité, les droits de chaque
être humain doivent être déterminés par le
choix de s’établir sur un territoire avec
l’intention d’y séjourner durablement.

Lutter contre un nouveau système d’apartheid!

La nouvelle loi contre les étrangers (LEtr) entrera en vigueur
en janvier 2008. Elle fixe un nouveau régime d’apartheid
légal qui a pour nom, la préférence
européenne. Ses conséquences seront redoutables, en
matière de séjour en Suisse, pour toutes les personnes
non titulaires d’un passeport helvétique et non
ressortissantes d’un Etat de l’Union européenne,
c’est-à-dire en fait pour tous les ressortissant-e-s des
Etats du quatre cinquième de la planète. Quelles en sont
les caractéristiques essentielles? Le droit à une
autorisation d’établissement après 10 ans de
séjour a été supprimé et le droit au
regroupement familial réduit à la portion congrue –
il doit être demandé dans un délai de cinq ans
dès l’installation en Suisse et ne concernera plus que les
enfants de moins de douze ans. L’officier d’état
civil pourra refuser de célébrer un mariage sur simple
soupçon que le mariage serait blanc. Il aura même le
pouvoir de requérir des renseignements auprès
d’autres autorités et de tiers. Le statut de saisonnier
ayant été supprimé, il est remplacé par une
autorisation de séjour de courte durée, octroyée
pour un séjour limité au maximum à une
année.

Elle sera réservée aux cadres, aux spécialistes et
aux travailleurs qualifiés et pourra être prolongée
jusqu’à une durée totale de deux ans. Un changement
d’emploi et de canton ne sera possible
qu’exceptionnellement et dans des cas motivés. Il
n’existera aucune possibilité de transformer
l’autorisation de courte durée en une autorisation de
séjour stable. Cette dernière sera accordée pour
un séjour de plus d’une année, mais restera de
durée limitée et étroitement liée à
un but déterminé. Elle pourra en outre être
assortie de conditions, par exemple pour une étudiante admise
dans le seul but de se former. Son titulaire n’aura pas droit
à une prolongation. L’autorité garde un pouvoir
discrétionnaire d’appréciation: elle prendra
notamment en compte, dans ses décisions,
«l’évolution socio-démographique de la
Suisse» – nouvelle formule qui remplace celle de la
«surpopulation étrangère» – ainsi que
«les intérêts de l’économie
suisse».

En excluant les ressortissant-e-s des Etats des quatre
cinquièmes du monde de toute possibilité d’obtenir
une autorisation de séjour, la Loi sur les étrangers
(LEtr) les illégalise, les transformant, bien malgré eux,
en «délinquants». Par définition leur
séjour est contraire à la loi!

La LEtr fabrique des sans-papiers, dans la mesure où des
secteurs comme l’hôtellerie, la restauration,
l’économie domestique, l’agriculture ont besoin
d’une main d’œuvre non qualifiée, venant
immanquablement au-delà des frontières de l’Union
européenne. Des travailleuses et travailleurs sans statut
légal (près de 150 000) vivent ainsi dans des conditions
extrêmement précaires, avec en permanence la peur au
ventre de se faire dénoncer, de tomber sur un contrôle
policier, puis d’être renvoyés. Les sans-papiers
sont soumis à l’arbitraire des autorités
policières et livrés, souvent, à une exploitation
éhontée de la part de certains employeurs sans scrupule.
De plus les sanctions pénales à leur égard ont
été encore alourdies: dans le cadre la révision du
Code pénal entrée en vigueur en 2007, la
Conférence des autorités de poursuite pénale de
Suisse a édicté de nouvelles recommandations en
matière de répression d’infractions liées au
séjour des étrangers-ères.

Entrer sans visa peut coûter entre 10 et 20 jours amende,
séjourner jusqu’à 12 mois sans autorisation, entre
20 et 90 jours amende, le refus de sortir, lorsqu’un délai
de départ a été fixé, de 20 à 40
jours amende, la facilitation de l’entrée illégale
de membres de sa famille, de 20 à 60 jours amende. Ces peines
sont totalement disproportionnées par rapport à celles
qui sanctionnent, par exemple, un chauffard mettant en danger, par son
comportement sur la route, la vie et l’intégrité
corporelle d’autrui. Il est indispensable que la Suisse
s’engage sur la voie d’une régularisation collective
des sans papiers, comme l’ont fait tout récemment les
Pays-Bas!

Toutes et tous ensemble, sans concession contre le racisme

Les actes et réactions racistes se multiplient autour de nous.
Du fait de la couleur de leur peau, de leur origine nationale ou de la
consonance étrangère de leur nom, des femmes et des
hommes subissent des discriminations, notamment à
l’embauche, dans les conditions de travail ou dans la recherche
d’un logement. La Constitution fédérale
prévoit pourtant, à son article 8 al. 2, que nul ne doit
subir de discrimination du fait de son origine ou de sa race. Or il
n’existe à ce jour aucune loi d’application
permettant de mettre en œuvre ce principe constitutionnel.

Ce vide juridique est significatif de l’absence de volonté
politique de garantir véritablement
l’égalité de traitement entre ressortissant-e-s
helvétiques et étrangers-ères dans les
différents domaines de la vie sociale, tels que
l’éducation, la formation professionnelle, l’emploi
ou l’accès aux prestations de service public. Les
étrangers-ères sont très souvent, en toute
impunité, insulté-e-s et méprisé-e-s, en
particulier dans la rue ou sur les lieux de travail. Ils-elles font
l’objet de contrôles policiers «au
faciès».

L’UDC revendique, au nom de son combat «contre le racisme
à l’égard des Suisses», l’abrogation de
l’article 261bis du Code pénal qui réprime la
discrimination raciale, la dissolution de la Commission
fédérale contre le racisme, la dénonciation de la
Convention internationale sur l’élimination de toutes les
formes de discrimination raciale ainsi que l’interruption du
soutien aux associations de lutte contre le racisme. L’article
261bis du Code pénal ne constitue sans doute pas un instrument
très efficace de lutte contre les discriminations
infligées par le droit des étrangers ou par la condition
d’étranger-ère en Suisse. Mais son abrogation, voir
l’affaiblissement de sa portée, mis en discussion
actuellement par le Département fédéral de justice
et police, s’inscrivent totalement dans cette perspective. Comme
du reste, la mise en scène d’une délinquance
ethnique, orchestrée par le conseiller fédéral UDC
Christoph Blocher, qui alimente les préjugés, en
particulier à l’égard des musulmans, des Noirs ou
des personnes d’origine balkanique. C’est le retour
d’une politique ouvertement fondée sur une
prétendue supériorité de la «race
blanche». L’initiative UDC contre la construction de
minarets est à la pointe de cette croisade.

Défendre le droit d’asile ainsi que le droit d’être là!

Comme la plupart des autres pays européens, la politique
helvétique par rapport aux étrangers-ères et
à l’asile est marquée par le renforcement permanent
de mesures de contrôle, de répression, de dissuasion et de
restriction. La contrainte se généralise à
l’encontre de toutes les catégories
d’étrangers. Ainsi, par exemple, dans la nouvelle LEtr, la
«le renvoi informel» permet aux autorités de police
de renvoyer de Suisse, sans exigence de forme, l’étranger
qui n’a pas d’autorisation alors qu’il y est tenu ou
qui ne remplit plus les conditions d’entrée pendant un
séjour non soumis à autorisation. Sur demande
immédiate, l’autorité compétente rend une
décision. Tout recours contre cette décision doit
être déposé dans les trois jours après sa
notification. Il n’a pas d’effet suspensif.
L’autorité de recours décide dans les dix jours de
la restitution de l’effet suspensif. Un véritable machine
à expulser, sans aucun respect des droits
élémentaires de procédure! Sous couvert de
“chasse aux abus”, les autorités en viennent
même à promouvoir la violation de conventions
internationales et des droits humains! Le droit d’asile est
vidé entièrement de son contenu. Le Conseil
fédéral vient ainsi non seulement de répondre
négativement à la demande faite par le Haut commissariat
aux réfugiés des Nations unies d’accueillir 500
réfugié-e-s en provenance d’Irak, mais il a encore
annoncé son intention de renvoyer les requérants irakiens
venant des provinces kurdes. Une provocation de plus, lorsque
l’on sait l’ampleur des déplacement de
réfugié-e-s en provenance d’Irak dans les pays
limitrophes, comme la Jordanie (750 000 Irakiens accueillis sur une
population de 5,7 millions). De surcroît il est quasi certain que
ces renvois seront irréalisables. Leur annonce est avant tout un
gage de plus, donné par le conseiller fédéral UDC
à ses futurs électeurs-trices en vue des élections
fédérales de cet automne. Concrètement il
impliquera l’exclusion pour ces Irakiens provenant des provinces
du Nord de toute aide sociale depuis le 1er janvier 2008. Quant
à la clause de la non-entrée en matière (NEM) en
cas d’absence de papiers d’identité, elle constitue
un déni d’asile si flagrant que même l’Office
suisse d’aide aux réfugiés (OSAR) a
dénoncé, en juillet 2007, le fait que «(…)
l’entrée en matière est souvent soumises à
des exigences beaucoup trop strictes. Sont notamment concernées
des personnes ayant fait valoir un viol ou une mutilation
génitale ou ayant fuit face à une situation de guerre
(…)».

La politique migratoire, terrain d’essai pour les politiques neoliberales!

La politique migratoire constitue un laboratoire pour les politiques de
régression sociale: précarité extrême des
conditions de travail, absence de protection sociale, chasse aux
prétendus abus en matière de prestations sociales. Sur
les traces de l’UDC, tous les partis gouvernementaux ont repris
cette propagande, sous une forme ou une autre. La lutte contre les
soi-disant abus, en matière d’asile et
d’immigration, constitue en fait une forme “d’arme de
destruction massive” qui se tourne contre tous les droits des
salariée-s. On ne parle d’abus que quand il s’agit
de pauvres, de chômeurs-euses, d’invalides ou de personnes
malades! Jamais pour qualifier les agissements des dominants…

Jean-Michel Dolivo

Agir collectivement contre toutes les initiatives racistes et xénophobes

Créer une plateforme d’action, de réflexion et
d’échange Il y a un an, le très large mouvement de
toutes les sensibilités opposées à
l’exclusion et à la xénophobie nous a réuni
contre la Loi sur les étrangers et la révision de la Loi
sur l’asile. Nous savions déjà qu’il fallait
se préparer à lutter contre une aggravation de ces
phénomènes.

En août 2003, l’UDC entamait sa campagne électorale
avec un publi-reportage contre la «délinquance
ethnique». A la veille des élections nationales 2007, elle
a fêté le 1er août en lançant
l’initiative «Pour plus de sécurité »
pour expulser les «délinquants étrangers».
Une image illustre sa campagne: les Suisses, des moutons blancs,
s’unissent pour expulser le Noir.

Le 9 août, modification de l’image: les trois moutons
blancs ne sont plus que deux. Le 3e est mort poignardé. Un
survivant semble sonné. L’autre – l’UDC?
– sait que faire: il expulse le Noir, responsable bien
évidemment du meurtre du mouton blanc. Comment ne pas faire un
lien entre cette campagne et l’agression de néonazis
contre des Africains à Genève jeudi 9 août 2007?

Trois initiatives viennent d’être lancées pour
mettre  «la question des étrangers» au coeur
des élections nationales 2007. Deux d’entre elles sont
lancées par l’UDC et ses amis. Elles manipulent les
ressorts du racisme en stimulant les comportements qui le renforcent
– la peur, les préjugés. Il s’agit des
initiatives «Contre la construction de minarets»
et «Pour le renvoi des étrangers criminels (initiative sur
le renvoi)». Les Démocrates suisses, eux, prolongent la
campagne de l’UDC pour l’abolition de la norme antiracisme
avec l’initiative «Pour la liberté d’expression – non aux muselières!»

Pour autant qu’elles réunissent les signatures
nécessaires, ces initiatives ne seront soumises au vote que dans
plusieurs années. Ce qui importe à leurs auteurs
c’est d’imposer le racisme et la xénophobie au coeur
des élections nationales. L’initiative de l’UDC
«Pour des naturalisations démocratiques» a
déjà réuni les signatures nécessaires.
L’UDC s’efforcera d’obtenir du Parlement qu’il
la soumette au vote populaire.


Depuis les années 1970 nous
nous sommes régulièrement réunis en comités
pour appeler à refuser les initiatives xénophobes.
Pouvons-nous encore, aujourd’hui, attendre pour agir la campagne
de votations? Nous ne le pensons pas.

Voilà pourquoi nous vous proposons de constituer dès
aujourd’hui une plate-forme d’action de réflexion et
d’échange, un comité ou collectif regroupant des
individus, des associations et divers mouvements pour engager la lutte
contre ces quatre initiatives xénophobes en lien avec toutes les
mobilisations en cours (Assises, Mouvement des 2 barques, Etats
généraux, etc.) Nous serons heureux de prendre
connaissance de vos réactions et, d’ores et
déjà, nous vous invitons à participer à une
première séance pour en discuter:


Lundi 3 septembre 2007 • 20h15 au Buffet de la gare de Lausanne

Christine Clément, Jean-Michel Dolivo, Karl Grünberg, Mazyar Yosefi