Des bombes thermobarbares... aux exécutions sommaires assistées par ordinateur!

Des bombes thermobarbares… aux exécutions sommaires assistées par ordinateur!



La sale guerre américaine
contre un peuple irakien martyrisé est un laboratoire du
démantèlement des droits humains, de violation de normes
légales élémentaires… et des instruments
techniques et matériels d’une politique orwellienne de
fichage et de répression, qui gangrène le monde entier au
nom de la prétendue «guerre contre le terrorisme».

Le Washington Post du 1er décembre 2007 consacrait un article
enthousiaste à une femme qui est aux avant-postes de ce combat
douteux. Anh Duong, soeur d’un pilote de l’armée de
l’air sud-vietnamienne, âgée aujourd’hui de 47
ans, est venue aux USA comme réfugiée après la
libération de Saigon en 1975. Elle a gagné au Pentagone
le sobriquet de «Bomb Lady» et est, selon Thomas A. Betro,
directeur du Naval criminal investigation service (NCIS) l’un-e
des «plus importantes développeurs-euses d’armements
de l’ère moderne».1

Et, en effet, son palmarès est impressionnant.
Après de brillantes études, elle a dirigé pendant
une décennie l’ensemble des efforts de recherche et de
développement de la marine US en matière
d’explosifs. Avec à son actif: «le
développement de 10 nouveaux explosifs et leur incorporation
dans 18 différents missiles, bombes, torpilles ou autres
projectiles.» Son exploit le plus «glorieux» est venu
après le 11 septembre et a été la mise au point,
avec son équipe, en un temps record de 67 jours plutôt que
les 3 ans prévus, de nouvelles bombes dites
«thermobariques», extraordinairement puissantes, capables
de pénétrer les cavernes des montagnes
d’Afghanistan… et d’y tuer les ennemis de
l’Amérique.

Merci pour la guerre du Vietnam

Sa motivation, la gratitude: «Ma vie sert à repayer ma
dette…», une dette envers les «héros
américains» de son enfance, qui ont ravagé le
Vietnam. Elle explique: «Je suis ici parce qu’au Vietnam
nous avons manqué de munitions. Je ne veux plus jamais
être dans cette situation…» Mais attention, elle se
présente comme étant contre la guerre et la violence,
puisqu’elle fabrique seulement des «armes de
dissuasion» que les USA doivent utiliser «quand on les
provoque»… et que ses enfants ne sont pas autorisés
à regarder des dessins animés violents. A la question du
Washington Post de savoir si elle n’est pas inquiète sur
un mauvais usage éventuel de «ses bombes». Sa
réponse est touchante: «Il faut avoir foi en nos
dirigeants.»

Mais aujourd’hui, Anh Duong a changé son fusil (ou
plutôt ses bombes) d’épaule. Diplômée
en informatique, comme en chimie, elle travaille au Pentagone et
s’est occupé du développement de systèmes
d’identification des «terroristes». En effet, en Irak
les troupes d’occupation US alimentent en permanence une base de
données biométrique, située en Virginie, mais tout
ceci de manière encore «artisanale» jusqu’ici,
on évoque l’ordre de grandeur d’un demi million
d’Irakien-ne-s fichés, avec 4 à 5 mille
«entrées» par semaine dans le système, avec
empreintes digitales, scans de rétine, etc.

Labos mobiles «antiterroristes»

L’innovation la plus récente, en train d’être
introduite par Anh Duong en la matière sont des laboratoires
mobiles de 6 m2, équipés de générateurs et
de communications directes par satellite avec les USA2. Et
ce n’est qu’un début, des unités
miniaturisées, portables à dos d’homme, sont en
train d’être développées… pour un fichage
et un contrôle, qui va pouvoir prendre une ampleur sans
précédent.

Des organisations de défense des droits humains aux USA –
dont Human Rights Watch – ont d’ailleurs,
l’été dernier déjà, interpellé
le Département de la défense étasunien, sur le
caractère illégal, au regard du droit international et
des droits humains, du profilage et du fichage de centaines de milliers
d’Irakien-ne-s, en évoquant également le risque
ultérieur d’utilisation de ces bases de données
comme outil de «violences génocidaires» possibles.3

Mais redonnons la parole à Anh Duong, citée par le
Washington Post: «Un soldat qui arrête un suspect doit
pouvoir savoir à la minute s’il est sur une liste de
terroristes […] il doit pouvoir trancher entre trois
possibilités: Est-ce que je le laisse partir, je le garde ou je
l’exécute sur le champ?»

C’est à cette manière de rendre la
«justice» que travaille ouvertement cette employée,
méritante – exemplaire et décorée – du
Pentagone! Avec toujours la référence vietnamienne:
«Nos gars au Vietnam n’avaient pas ce genre
d’outils» pour effectuer des exécutions sommaires…
«qui ne tuent pas des inocents» dit-elle.

Vers une surveillance permanente de tous

Mais ces activités de laboratoire en Irak ne sont que la pointe
émergée d’un iceberg. Le FBI vient de lancer le
projet NGI (Next Generation Identification) doté – pour
commencer – d’un budget d’un milliard de dollars sur
dix ans et destiné à collecter de manière
illimitée et préventive des données
biométriques de tous types, à une échelle sans
précédent, sur tous et toutes. Comme le dit Barry
Steinhardt, directeur du projet «Technologies et
liberté» initié par l’Union des
libertés civiles américaines «Cela permettra une
surveillance permanente de la société.»

Dans son édition du 22 décembre, le Washington Post
toujours, explique par exemple que: «Le FBI planifie un service
qui permettra aux employeurs de lui transmettre, pour les stocker, les
empreintes digitales de leurs employés, pour que si ceux-ci sont
arrêtés leurs employeurs puissent en être
informés.»

Sur le plan technique aussi on n’arrête pas le
«progrès». Le Centre pour la recherche sur les
technologies de l’identification (CITeR) de
l’Université de Virginie de l’Ouest travaille
à la mise au point de systèmes capables de lire et
d’enregistrer les rétines des gens à 4 ou 5
mètres de distances et d’enregistrer les données
nécessaires à une «reconnaissance faciale»
à plus d’une cinquantaine de mètres. Ceci pour que
ces opérations puissent s’effectuer en public à
l’insu de ceux qui en sont l’objet. Big Brother à
côté, c’était de la petite bière!

Et en Suisse? Bons élèves des USA et avec une longue et
historique tradition du fichage, notre pays n’est sans doute pas
en reste. Signalons à ce sujet que, dans le bref
communiqué-testament de Christophe Blocher, publié par
son ex-département le 28 décembre et portant sur le bilan
de sa législature, au chapitre de la lutte «contre le
terrorisme» et du maintien de la «sécurité
intérieure», le fait que le «Projet biométrie
06» ait «progressé sans heurts» figure en
bonne place! Nous y reviendrons…

Pierre Vanek


1    V. aussi le Newsweek du 8.12.07
2    Système dit «JEFF» (Joint Expeditionary Forensic Facilities)
3    V. à ce sujet le site http://epic.org (Electronic Privacy Information Center)