NON à une constituante « à froid » pour Genève !

NON à une constituante « à froid » pour Genève !

Le 24 février les électeurs-trices genevois – sans
les étrangers-ères résidents qu’ils soient
de première ou de deuxième génération
– auront à se prononcer sur le principe de la
révision «totale» de la constitution genevoise. Le
projet de loi à cet effet prévoit une
«Assemblée constituante», dont
l’élection aurait lieu en octobre 2008. Cette
Assemblée aurait alors quatre ans pour élaborer son
projet de nouvelle constitution, soumis ensuite au suffrage populaire.

Le projet de loi initiant ce processus a été
adopté en mai dernier par le parlement genevois, ceci par un
large spectre de partis allant du PS aux libéraux, chacun
s’autofélicitant du consensus et de l’absence de
confrontation ayant présidé aux débats et à
ses travaux préparatoires.

Mais sur le plan du contenu de la révision projetée,
aucune lumière n’a été apportée par
ces débats, au-delà des platitudes et des
généralités crasses. Il s’agit de
«moderniser» le texte, de le «réécrire
dans un langage plus clair», de le purger des
«détails qui ne devraient pas se trouver dans une
constitution»… Certes l’inflation des formules ronflantes
n’a pas manqué, d’aucuns veulent
«redéfinir le contrat social», «revoir
l’équilibre des différents pouvoirs»,
«prendre en compte l’agglomération»…

On a assisté au degré zéro du débat
politique. L’avocat libéral Christian Luscher se
félicite même de ce vide, il lui semble comme à son
parti «attrayant», que la constituante «parte avec
une feuille blanche».

Et, en effet, on comprend l’attrait pour la majorité
d’effacer cette constitution et de «repartir à
zéro». La constitution genevoise actuelle de 1847 est
issue d’une révolution populaire radicale, qui a
jeté aux orties le texte précédant. Elle a
été «révisée» en permanence par
voie d’initiatives populaires, avec plus d’une centaine de
modifications, dont les plus importantes sont toutes issues de larges
débats publics et mobilisations sociales et populaires
significatives. Ceci dans un contexte ou le rapport des forces sociales
et politiques était largement plus favorable que dans le reste
du pays.

De l’inscription des dispositions concernant le droit au logement
et la protection des locataires, à l’article
antinucléaire sur l’énergie… cette constitution
contient des avancées significatives. La dernière
votation du 16 décembre a, par exemple, adopté des
dispositions constitutionnelles prévoyant un monopole de service
public en matière d’eau et
d’électricité, qui est l’anti-thèse
absolue du cours néolibéral dominant.

Bien sûr, il faut chaque fois se battre pour faire appliquer ces
droits et ces dispositions progressistes, nous en savons quelque chose
et c’est évidemment – au-delà des textes
– la question essentielle! Mais, ils constituent un point
d’appui pour les mobilisations sociales nécessaires, qui
sont la seule voie pour avancer.

On comprend donc bien l’intérêt pour les milieux
dominants d’effacer cette ardoise, au nom de
considérations cosmétiques, l’intérêt
notamment de renvoyer de la constitution aux lois ordinaires telle ou
telle disposition, qui pourra ensuite être caviardée par
un parlement de droite sans que les citoyen-ne-s ne puissent se
prononcer, sauf par le lancement d’un référendum de
plus dans cette série épuisante qu’on nous impose.

solidaritéS Genève a donc adopté le 20
décembre – à l’unanimité – un
mot d’ordre de NON à cette prétendue
«constituante»! Nous pensons que le processus de
révision constitutionnel «à froid»
qu’elle propose est fondamentalement vicié. Si un parti ou
tout groupe pense que la constitution doit être
révisée sur tel ou telle question: qu’il le dise,
qu’il dise quel disposition il veut supprimer ou introduire.
Qu’il affronte le débat public en lançant une
initiative…

Quant à nous c’est ce que nous ferons: pas plus tard que
le 24 février les citoyen-ne-s se prononceront sur une
initiative populaire que nous avons contribué à lancer
pour la gratuité des transports publics! Initiative que le PS et
les Verts tous deux combattent d’ailleurs avec
l’argument-choc que «la gratuité ça
n’existe pas». Inquiétant, non? alors qu’il
proposent de «moderniser» une constitution qui garantit par
exemple une gratuité de l’école primaire, qui
devrait bien sûr être étendue à
l’ensemble des études jusqu’à
l’Université. Ce que prévoit d’ailleurs une
initiative populaire en cours lancée par les associations
d’étudiant-e-s (CUAE).

Mais, au-delà, il y a – en effet – toute une
série de propositions auxquelles solidaritéS travaillera,
de l’institution du principe d’un salaire minimum
légal, comme le contient la constitution jurassienne et qui
constitue une réponse indispensable au dumping salarial en
cours… au droits politiques pour les étrangers-ères
à l’échelle cantonale, en passant par nombre de
mesures en matière de santé, de social, de défense
de l’environnement, il y a du pain sur la planche! Mais aucune de
ces réformes progressistes possibles ne se fera sans constituer
un rapport de force social sur le terrain…

Quant à la révision totale de la constitution, nous
pensons que la meilleure méthode est celle appliquée
jusqu’ici à Genève par les radicaux de
l’époque de James Fazy: une révolution! Mais les
conditions n’en sont pas aujourd’hui réunies…

Pierre Vanek