Les bads Girls acquittées, une victoire politique et collective
Les Bad Girls acquittées
une victoire politique et collective
Le 8 mars à Lausanne, les femmes ont fêté le verdict, mais restent mobilisées, dautres combats sont encore à mener.
Malgré la pluie et le froid, elle était belle, dynamique et pleine de joie, la manifestation du 8 mars à Lausanne qui fêtait la victoire des Bad Girls et de leur comité de soutien. Les quatre inculpées ont été acquittées, le jugement a décrété que les accusations contre elles étaient sans fondement. La mobilisation des féministes, des syndicats, des groupes politiques, des associations, mobilisation large et variée, a permis cette victoire.
Le 2 mars 2001, trois jours avant la tenue du procès des quatre membres du groupe féministe Bad Girls Go Everywhere de lUniversité de Lausanne pour «diffamation, calomnie et tentative de contrainte», le professeur plaignant a retiré sa plainte pénale déposée en 1997 et les deux parties ont signé une déclaration commune: le professeur ne conteste pas la légitimité de la lutte contre le harcèlement sexuel menée par le groupe des Bad Girls. Les inculpées en prennent acte et affirment quelles navaient pas voulu viser le professeur lors de la campagne de 1997 à lUniversité de Lausanne et navaient pas dautre but que linformation et la prévention générales à propos du harcèlement sexuel. Finalement, elles donnent acte au professeur quil a été libéré de laccusation de harcèlement sexuel.
Poursuivie doffice
Cependant, malgré le retrait de la plainte, le procès des Bad Girls sest tout de même tenu le 6 mars. Lune des quatre inculpées, accusée de tentative de contrainte, était poursuivie doffice. Ce curieux procès opposait finalement deux protagonistes de légalité : une dame pleine de bonnes intentions, organisatrice dune journée sur légalité des chances pour le personnel de la Confédération, qui commet la gaffe dinviter comme conférencier le professeur soupçonné de harcèlement sexuel (!) et une Bad Girl. Ces deux personnes ont quelques échanges téléphoniques. Voilà la raison de mois de procédure. «Cest une futilité!» tempêtait une féministe durant le procès. Cest que la dame sest affolée et a fantasmé quune foule de manifestantes hurlant leur colère bouleverserait sa tranquille journée. La Bad Girl a pu tranquillement affirmer que ce nétait pas du tout lintention du groupe. Le juge a plaisamment résumé la situation à laccusée: «Vous êtes victime de la force dévocation de la raison sociale de votre groupe!»
Sans même ajouter le terme «vilaine fille», le seul adjectif assumé de «féministe» aurait pu déjà jeter le discrédit sur ce petit groupe détudiantes et dassistantes. Une nouvelle guerre contre les femmes qui osent se rebeller contre lordre établi du patriarcat, de la bourgeoisie et de lhétérosexualité se développe en ce moment en Suisse romande. Criminaliser les activités féministes en est une preuve, nous en voyons dautres dans lhystérie contre la tenue de la Gay Pride à Sion, loffensive des psychiatres de «Pro Fa» qui attaquent les campagnes de prévention des violences domestiques, le référendum contre la libéralisation de lavortement, toutes les attaques basses et grossières contre les femmes défendant les libertés des femmes, les nombreux articles ridiculisant le féminisme dans la presse, qui déstabilisent jusquaux camarades politiques qui devraient objectivement soutenir la cause des femmes.
Subversif
Devons-nous forcément nous plaindre que le féminisme sente à nouveau le souffre et le scandale et sorte du long fleuve tranquille qui est censé nous apporter tout «naturellement» légalité entre femmes et hommes? Le féminisme redevient subversif! Peut-être y gagnera-t-il en force!
Une nouvelle étape de lutte commence maintenant avec le soutien affiché à lassistante harcelée. Lune des rares victoires de la grève des femmes du 14 juin 1991, a été ladoption en 1996 dune loi prônant légalité et condamnant le harcèlement sexuel! Il sagit maintenant de retourner le backlash (dénoncé justement en 1991 par la journaliste américaine Susan Faludi) et de combattre la réaction machiste, qui sort du bois.
- «Médecine et Hygiène» No 2339, 21 mars 2001, larticle sur le «sexo-terrorisme» du docteur Hurni.