Bush relance le nucléaire, le Conseil fédéral aussi !


Bush relance le nucléaire,
le Conseil fédéral aussi !


S’encolonnant derrière Bush, les radicaux et l’UDC rejettent les engagements suisses de réduction du CO2 et la taxe ad hoc. Le Conseil fédéral quant à lui milite pour le nucléaire.

par Pierre Vanek

Il faut souligner qu’aux USA l’équipe de Bush travaille à relancer à coups de millions la construction de nouvelles centrales atomiques (ou la remise en service de vieux réacteurs arrêtés) sous prétexte de la crise électrique californienne, produit de politiques néolibérales dont l’avatar suisse est la LME.


Fin mars, le Conseil fédéral publiait quant à lui son message pour vendre sa loi atomique (LENu) et refuser les initiatives pour Sortir du nucléaire sur lesquelles nous voterons d’ici deux ans. Ce message pronucléaire s’intègre pleinement dans la logique de libéralisation/privatisation du secteur électrique combattue par les antinucléaires conséquents. Il vaut le détour, au moment où le XVe anniversaire de Tchernobyl est venu rappeler les risques et le coût humain et écologique incalculable d’une catastrophe qui se poursuit…


Tchernobyl : un risque …antinucléaire!


Pour le Conseil fédéral «L’acceptation de l’initiative permettrait certes d’échapper aux risques liés à l’utilisation de l’énergie nucléaire.» Il «…estime toutefois que cela ne compenserait pas les inconvénients de l’abandon prématuré de cette technique.»(p.3) Ceux-ci sont surtout à ses yeux que «…l’initiative Sortir du nucléaire affecterait sensiblement la bonne marche de l’économie suisse». L’idée qu’un accident atomique «affecterait sensiblement» la vie de millions de gens lui est étrangère! Parlant d’accident possible un risque évoqué est que: «D’une manière générale, le rejet du nucléaire par la population pourrait encore s’intensifier si de nouveaux incidents comme ceux de Three Mile Island (USA), Tchernobyl (Ukraine), Tokaimura (Japon) ou Sellafield (GB) devaient se produire.» (p.27) Le risque, c’est les antinucléaires et la Tchernobyl est ravalé au rang d’«incident»!


Pour ce qui est des «dommages d’origine nucléaire» liés à un tel «incident» le gouvernement veut nous (r)assurer. Mais: «Le montant assuré est limité à 1 milliard de francs…» «S’il y a lieu de prévoir lors de grands sinistres, que les moyens financiers dont disposent la personne responsable, l’assureurs privé et la Confédération ne suffiront pas […] l’Assemblée fédérale établira un régime d’indemnisation spécial; au besoin, elle pourra verser des contributions supplémentaires pour les dommages non couverts.» (p.19)


Ainsi le grand principe bourgeois: tout se ramène au fric …et la collectivité passe à la caisse en cas de casse est étendu de manière cynique au nucléaire. A signaler, pour rester dans le registre comptable, que, selon un rapport de la protection civile,1 un tCHernobyl helvétique pourrait provoquer des dommages d’un coût ….dépassant 4200 milliards. Environ 100 fois le budget annuel de la Confédération!


Propriété et profit avant tout


Quant à un vote populaire qui arrêterait l’exploitation d’une centrale, cela «…constituerait une limitation de propriété qu’il faudrait probablement assimiler à une expropriation matérielle, donnant droit à un dédommagement. En effet, il ne s’agirait pas d’éviter un danger sérieux et immédiat.» (p.51) Pas de danger sérieux, mais aucun assureur ne veut couvrir le risque!


Le Conseil fédéral est forcé de reconnaître que «Les centrales les plus anciennes furent construites sur la base des connaissances scientifiques et technique de l’époque. Elles ne peuvent donc pas satisfaire aux exigences auxquelles doivent répondre aujourd’hui les nouvelles installations.» (p.22) Mais, dans le contexte de la LME, le Conseil fédéral indique que: «Grâce à des coûts variables peu élevés la plupart des centrales existantes sont concurrentielles et capables de couvrir la charge de base […] les propriétaires s’efforceront donc de les exploiter le plus longtemps possible» (p.27) …avec la bénédiction des autorités. Même si «Les plus anciennes d’entre elles prévoient d’abaisser les coûts de production de l’électricité» par des «mesures de rationalisation» qui dégraderont encore leur «sécurité». (p14)


Vers de nouveaux réacteurs


Le gouvernement a un «Scénario de référence qui prévoit la poursuite à long terme de l’exploitation» (p.28) avec 60 ans de vie pour Gösgen et Leibstadt (p.29) Et: «A la fin de la période considérée, il faudra impérativement passer de nouveaux contrats d’importation ou construire en Suisse des centrales de la nouvelle génération.» (p.34) De plus: «La preuve du besoin n’a plus de raison d’être sur un marché libéralisé» (p.76)


Par contre, le développement de notre première source d’énergie renouvelable, soit l’hydroélectrique se présenterait moins bien: «L’énergie hydraulique présente encore des possibilités de développement, notamment à travers l’augmentation du volume d’eau utilisé ou l’amélioration du rendement des installations lors du remplacement des turbines. Cependant ces mesures augmentent généralement les coûts de production de l’électricité» (p.24)


D’ailleurs l’abandon du nucléaire aurait des inconvénients. Morceaux choisis: Il induit par exemple «une perte de savoir faire dans ce domaine. […] Or ces compétences sont indispensables, en particulier dans l’optique de la désaffection des centrales nucléaires.» (p.59). Ainsi si vous voulez désaffecter les réacteurs, il faut continuer à les exploiter ad infinitum! En outre, l’initiative «impliquerait la commercialisation rapide d’appareils et d’installations énergiquement efficaces ainsi que la réintroduction à l’échelon fédéral du régime de l’autorisation pour les chauffages électriques fixes.» (p.30) Rappelons qu’à Genève avec l’art. 160 C de la Constitution, nous avons survécu à l’interdiction du chauffage électrique qui est un non-sens sur les plans énergétique et écologique.


OMC-nucléaire même combat


«L’initiative Sortir du Nucléaire prévoit d’admettre le courant en fonction de la méthode de production (ni les centrales nucléaires, ni les installations alimentées aux énergies fossiles sans récupération de chaleur n’étant admises). Or la jursiprudence du GATT et de l’OMC interdit de longue date de distinguer dans les importations les produits fabriqués selon des méthodes différentes, mais identiques quant au résultat. (..) Le refus du courant d’origine nucléaire (..) risque de violer l’interdiction de discrimination.» (p.61) Le Conseil fédéral souligne d’ailleurs qu’à ses yeux «l’électricité est une marchandise» comme une autre! En combattant cette «marchandisation» de l’électricité les référendaires anti-LME, comme les militant-e-s anti-OMC, amènent de l’eau au moulin antinucléaire.


Pour conclure nous vous invitons, bien sûr à renforcer le front antinucléaire: par exemple en participant à la manif de ContrAtom du 14 juin contre les silences de l’OMS sur les questions nucléaires (Tchernobyl, Uranium appauvri) dus à ses liaisons dangereuses avec l’office pronucléaire onusienne qu’est l’AIEA et à participer à l’AG de ContrAtom le 30 mai.




  1. Bundesamt für Zivilschutz (BfZ) 1995 – Katastrophen und Notlagen in der Schweiz