Travail de nuit: l'exception ne doit pas devenir la règle !
Travail de nuit: lexception ne doit pas devenir la règle !
Un premier jugement vaudois précise les limites au travail de nuit. Malheureusement, cet arrêt arrive tard pour les travailleuses/eurs qui ont déjà effectué des heures de nuit. Cest tout le problème des voies de recours et du contrôle a posteriori qui est posé.
Le Tribunal administratif du canton de Vaud (TA), dans un arrêt du 30 avril 2001 a admis le recours déposé par le Syndicat COMEDIA – Syndicat des médias et lUnion syndicale vaudoise (USV) – contre une décision du Département de léconomie (DECO) rejetant le recours interjeté par ces associations contre la décision du Service de lemploi du 25 mai 2000, délivrant une autorisation temporaire de travail de nuit à lentreprise Säuberlin & Pfeiffer SA à Vevey.
Dans les considérants de larrêt, le Tribunal administratif critique le raisonnement du DECO qui fondait son autorisation notamment sur le «caractère absolu des contraintes économiques issu de la situation actuelle du marché du travail et de la concurrence» (consid. 5 lit. b) de larrêt, p. 10). En particulier, le Tribunal administratif souligne que lentreprise concernée na pas apporté la preuve que les retards pris par suite de pannes de machines nauraient pas pu être rattrapés par une planification du travail différente, par une modification de lorganisation du travail de jour qui aurait pu y remédier efficacement (consid. 5 lit.b) de larrêt, p. 11).
Comme le relève le TA, «une planification différente ou la modification de lorganisation diurne et de la coordination entre les secteurs dactivité de lentreprise auraient peut-être permis de faire face aux retards accumulés et de combler ces derniers rapidement et surtout durablement». Lautorité de recours considère dès lors que la décision du DECO «procède dune interprétation trop souple de la notion de besoin urgent et qui contrevient au caractère exceptionnel des dérogations à linterdiction du travail nocturne». Comme le relève le TA, «même en admettant que Säuberlin & Pfeiffer aient démontré la survenance imprévue de travaux supplémentaires impossibles à différer et dus aux pannes de machines, rien de permet daffirmer quaucune planification ou mesure organisationnelle naurait permis dexécuter ces travaux de jour pendant les jours ouvrables».
Cet arrêt fixe ainsi des limites précises face à lextension du travail de nuit temporaire. Dune part, il souligne que cest à lemployeur détablir lexistence «du besoin urgent», condition pour obtenir une dérogation à linterdiction du travail de nuit. Dautre part et surtout, on ne saurait interpréter de manière trop extensive la notion même de besoin urgent: faute de quoi le principe, posé par la loi, de linterdiction du travail de nuit serait vidé de son contenu. Or ce principe est lié au but même de la législation sur le travail, à savoir la protection des salarié-e-s, eu égard aux effets négatifs du travail de nuit, sur leur santé ainsi que sur leur vie familiale et sociale.
A son art. 16, la Loi sur le travail (LTr) définit une règle, celle de linterdiction du travail de nuit. A son art. 17, la LTr fixe les conditions des dérogations à cette règle, notamment celle concernant le travail de nuit temporaire «en cas de besoin urgent dû-ment établi» (art. 17 al.3 LTr). LOrdonnance 1 relative à la Loi sur le travail (OLT1) précise en outre à son art. 27 par ce quil faut entendre par «besoin urgent».