Politique cantonale de l’asile: trois pièces au dossier de l’accusation

Politique cantonale de l’asile: trois pièces au dossier de l’accusation

Récemment encore, le chef du
Département de l’intérieur, Philippe Leuba, se
vantait publiquement de la qualité, pour ne pas dire de
l’excellence de la politique cantonale en matière
d’asile. Nous publions ci-dessous trois informations qui
relativisent pour le moins cette fanfaronnade.


Un refuge contre l’arbitraire est urgent !

Après avoir occupé, mardi 12 octobre, les locaux de
l’église Saint-Jacques à Lausanne, le collectif
Droit de rester poursuit sa lutte pour obtenir un vrai refuge pour les
requérants en instance de renvoi. Provisoirement, les locaux de
la pastorale des migrant·e·s, Point d’Appui,
servent de refuge, alors que les négociations avec les Eglises
réformée et catholique se poursuivent. Faisant mention de
l’arrestation, dans les locaux du SPOP, d’une femme de 62
ans, vivant en Suisse depuis 2004, le collectif souligne que
« la protection d’un refuge est d’autant plus
urgente que le contexte de répression
s’intensifie ». Les autorités
prévoient de renvoyer cette personne en Arménie, un pays
dont elle parle la langue, mais où elle n’a jamais
vécu !

Une pétition en ligne, protestant contre cette politique
répressive et soutenant la demande d’un refuge
peut-être signée ici :

http://droit-de-rester.blogspot.com

Régularisation des débouté·e·s:
quels sont les critères du Conseil d’Etat ?

L’article 14 al.2 de la Loi fédérale sur
l’asile (LAsi) prévoit que le canton peut octroyer une
autorisation de séjour aux personnes déboutées du
droit d’asile à trois conditions : un séjour
d’au moins cinq ans en Suisse, un lieu de séjour toujours
connu des autorités et l’existence d’un cas de
rigueur grave en raison de l’intégration poussée de
la personne. Cela sous réserve de l’approbation
fédérale.

    Dans le canton de Vaud, l’autorité
compétente est le Service de la population (SPOP), dont la
pratique bureaucratique et arbitraire a été mise en
question au Grand Conseil dans une interpellation de J.-M. Dolivo
(AGT !). Morceaux choisis :

  L’appréciation par le SPOP de la condition de
l’intégration professionnelle est particulièrement
ubuesque :

    Une fois la période d’interdiction de
travail écoulée, beaucoup de personnes, à
l’aide d’urgence, n’ont de choix qu’entre un
travail au noir et des programmes d’occupation de l’EVAM
(Etablissement vaudois d’accueil des migrants, réd.). Or
les programmes d’occupation, proposés par l’EVAM, ne
sont pas pris en compte dans l’appréciation de
l’intégration professionnelle… Reste le travail au
noir, dont il est par définition difficile d’apporter la
preuve! De surcroît, les femmes sont discriminées :
d’une part, les emplois proposés sont essentiellement des
emplois pour une main-d’œuvre masculine, d’autre
part, nombre d’entre elles ont des responsabilités
familiales. Le travail éducatif et domestique effectué
par les femmes requérantes déboutées n’est
pas pris en compte dans le critère de l’intégration.

    De plus, le SPOP refuse de prendre en compte la
promesse d’embauche en bonne et due forme d’un employeur.
Il exige un contrat de travail qui ne peut pas être obtenu
rapidement du fait des démarches administratives que doit
impérativement entreprendre l’employeur et dont le sort
dépend justement de l’octroi du permis de
séjour !

  L’appréciation de la condition de
l’intégration poussée se fait selon des
critères particulièrement flous et inadaptés.

  L’appréciation de la condition du lieu de
séjour toujours connu de l’autorité est aussi
appliquée de manière arbitraire.
 
En conséquence, les député·e·s
signataires de l’interpellation demandent au Conseil d’Etat
de préciser les critères d’appréciation des
trois conditions de l’article 14, al. 2 de la LAsi, en
particulier de la notion d’« intégration
poussée » et de « cas de rigueur
grave ». Il est aussi demandé à
l’exécutif cantonal s’il envisage de procéder
à une régularisation des nombreuses personnes qui vivent
au régime – plus que précaire et en principe
provisoire – de l’aide d’urgence, bien que
résidant dans le canton depuis plusieurs années.

Centre de Frambois : déclaration des groupes À Gauche toute !, socialiste et Verts

«Samedi 9 octobre 2010, une révolte a éclaté
au centre de détention de Frambois. Les personnes
détenues administrativement ont exprimé ainsi leur rage
d’être emprisonnées depuis de longs mois dans des
conditions inacceptables. […] Le but de leur détention,
selon la loi, est d’organiser à brève
échéance leur renvoi forcé. Le canton de Vaud
place en détention, en vue de leur renvoi, de nombreux
requérants d’asile déboutés. Or force est de
constater que les personnes emprisonnées le sont depuis de longs
mois, contrairement aux dispositions de la loi. Il s’agit
d’une violation grave des droits humains, notamment du respect de
la liberté personnelle. Le centre de Frambois est une salle
d’attente insupportable, où des êtres humains sont
privés, sans droit, de leur liberté. Relevons que cette
longue attente est d’autant plus insupportable que, pour ces
personnes, elle peut déboucher sur un vol de plusieurs heures,
ligotées, humiliées et maltraitées. Les groupes A
gauche toute !, socialiste et Verts marquent, par cette
déclaration, leur indignation face à la situation
imposée aux personnes détenues iniquement à
Frambois et leur compréhension pour la colère
qu’elles expriment. Ils demandent au Conseil d’Etat vaudois
de prendre toutes les mesures utiles pour mettre fin à ces
conditions de détention inacceptables et contraires aux droits
fondamentaux. »


Déclaration lue à la
tribune du Grand Conseil vaudois le mardi 12 octobre 2010 par
Jean-Michel Dolivo au nom des trois groupes parlementaires.