Festival « CulturescapesIsrael » en Suisse : pas en notre nom !

Festival « CulturescapesIsrael » en Suisse : pas en notre nom !

En automne, plusieurs villes suisses
(Bâle, Zürich, Berne, Saint-Gall, Lucerne, Winterthour,
Genève et Coire) accueilleront le festival
« Culturescapes Israel 2011 »,
cofinancé par l’Etat israélien. Pas sans
protestations de la campagne BDS.



La première information est venue de la Toile : le
festival culturel suisse Culturescapes de cet automne aura comme
invité principal Israël, à la demande de son
ambassade à Berne, comme le reconnaîtra le directeur de
cette manifestation lors d’un débat public à Acre.
Cela au moment où, au niveau mondial, une opinion publique
critique, des spécialistes renommés du droit
international public et d’autres personnalités demandent
avec force qu’Israël rende compte de ses violations des
normes du droit international et où la société
civile palestinienne appelle à soutenir la campagne
« Boycott, désinvestissement et
sanctions » (BDS). Pour de nombreux activistes, il
était évident que ce festival ne pouvait se tenir sans
protester.

La critique du festival

En décembre, un groupe de militant·e·s s’est
réuni pour la première fois au niveau national pour
discuter de la marche à suivre; il prit contact avec la campagne
palestinienne pour le boycott académique et culturel (PACBI) et
avec le groupe israélien Boycott from Within (BWF). Le directeur
de Culturescapes, Jurriaan Cooiman, reçut alors les
premières lettres de protestation. Au printemps, BDS Suisse
publia une lettre ouverte adressée à Culturescapes et
à environ 60 partenaires institutionnels et sponsors du
festival, parmi lesquels Pro Helvetia, la Fondation Christoph Merian,
des autorités cantonales et des responsables politiques. Il leur
fut demandé de renoncer au déroulement du festival dans
ce cadre ou de se retirer du projet. La lettre fut publiée sur
le site de la campagne BDS CH, avec des informations de fond et un
commentaire sarcastique de la militante israélienne Tali
Shapiro. […]

    La critique du festival concerne le cadre
institutionnel de la manifestation, c’est-à-dire la
participation de l’Etat israélien. Culturscapes veut
être un projet progressiste d’échanges culturels,
mais se transforme ainsi en auxiliaire de la stratégie
officielle de relations publiques de l’Etat israélien. La
mise en avant de la créativité et de la diversité
culturelles doit volontairement faire écran à la
destruction systématique de la culture et de la
société palestinienne. Des groupes allemands de la
campagne BDS ont demandé au centre culturel du Burghof de
Lörrach de renoncer à sa participation au festival et le
Forum pour les droits humains Israël/Palestine a également
pris une position critique. BDS CH exigea en outre que la
présidente de la Confédération, Micheline
Calmy-Rey, et le président du gouvernement bâlois, Guy
Morin, se retirent du comité de patronage. Leur soutien actif
est d’autant plus problématique que la Suisse, et le
canton de Bâle encore moins, n’ont rien entrepris
d’efficace pour véritablement protéger les droits
de la population palestinienne et pour l’application du droit
international public. Des membres de l’organisation
Basta !, qui participent à l’Alliance verte avec
Guy Morin, se sont aussi exprimés de manière critique sur
la participation de leur magistrat.

Une responsabilité éthique

La lettre ouverte a provoqué un débat nourri à
Culturescapes et auprès des institutions partenaires.
Début juin, des représentant·e·s de BDS CH
ont été invités à une discussion avec
Culturescapes; ils purent présenter une fois encore leurs
critiques devant 25 représentant·e·s des
institutions participantes et répondre aux arguments des
organisateurs du festival. A cette occasion, il fut frappant de
constater que nombre d’organisateurs acceptaient certes la
dimension politique de la culture, mais éludaient leur propre
responsabilité éthique dans le choix des partenaires en
renvoyant à la capacité critique du public et des
artistes invités.

    La campagne eut toutefois un écho :
certains organisateurs se sont retirés du festival 2011, en
partie pour des motifs explicitement politiques. Des artistes ont aussi
renoncé à se produire. Le trio Joubran, composé de
trois musiciens palestiniens d’Israël, s’est
décommandé après avoir pris connaissance du cadre
institutionnel de l’invitation.

    En septembre, un débat public devra aborder
la question de la dimension politique de la culture et la signification
du boycott culturel. Les manifestations du festival donneront la
possibilité de s’adresser, par le biais d’une
protestation créative, à un public culturellement
intéressé. Dès maintenant, toutes et tous peuvent
participer à la protestation silencieuse du 14 septembre, jour
de la manifestation d’ouverture au Théâtre de
Bâle.

Birgit Althaler