La Face cachée de la mondialisation: l’Impérialisme au XXIème siècle

La Face cachée de la mondialisation: l’Impérialisme au XXIème siècle*

Il m’est difficile de faire une meilleure entrée en matière que celle que Noam Chomsky a écrite à propos de ce livre. Aussi m’en tiendrai-je, dans un premier temps, à vous proposer la sienne.


«Cette impressionnante étude tient les promesses de son titre. A travers une analyse attentive et une évidence empirique, les auteurs présentent une argumentation puissante et persuasive. L’apparente neutralité de la rhétorique de termes aussi plaisants que mondialisation, marchés, démocratie et autres recouvre des réalités que l’on peut bien mieux comprendre au crible de l’impérialisme et des conflits de classes. Leur vaste analyse fait pénétrer à l’intérieur des caractéristiques structurelles de l’évolution des formes de contrôle et de domination, de leurs sévères coûts humains, et de la résistance populaire qu’ils engendrent. Il s’agit d’une contribution inestimable pour ceux qui espèrent non seulement comprendre le monde, mais aussi le transformer drastiquement…»


Au travers de cette œuvre, les discussions se portent autour de thèmes aussi divers que les ONG au service de l’impérialisme, le mythe des marchés émergents, la coopération pour le développement etc. Les deux auteurs relient de manière convaincante tous ces sujets – pures farces selon les deux sociologues, dans la majorité des cas – comme n’étant que de simples instruments ou argumentations au service de la classe dominante capitaliste. Les auteurs prônent sans conteste un retour aux concepts marxistes, indispensables selon eux à la compréhension du monde actuel.


De plus, les diverses études sur les privatisations, l’empire américain en Amérique latine et ailleurs, la relation difficile entre démocratie et capitalisme, la mondialisation comme idéologie et autres nous permettent de mieux cerner les pratiques et stratégies de nos adversaires. A titre d’exemple, quoiqu’il soit difficile de refléter ici la richesse du contenu de ce livre, je prendrai celui du lien entre capitalisme et démocratie. A ce sujet, les auteurs démontrent, de nombreux cas réels à l’appui, que si dans bien des cas, la classe dominante n’a pas hésité un instant à renverser des gouvernements démocratiquement élus lorsque ses intérêts étaient mis en jeu, il n’existe aucun cas historique, «où la classe capitaliste ait accepté une législation qui enraye les prérogatives et le pouvoir de la propriété privée». Ceci nous amène à une profonde réflexion sur la situation dans laquelle nous nous trouvons aujourd’hui et sur la démocratie que nous voulons.


Continuant sur cette lancée, ils posent des questions sujettes à discussion et à réflexion, comme lorsqu’ils critiquent sévèrement «l’incapacité des partis de gauche à développer une vision plus réaliste de l’influence de paramètres de classe sur les règles démocratiques, et à placer leurs propres intérêts de classes au centre stratégique de leurs calculs politiques. [Selon eux, cette faiblesse là] n’a pas permis la mise en place de contre-mesures qui auraient peut-être pu empêcher l’arrivée au pouvoir de l’autoritarisme bourgeois».


Comme vous vous en rendrez compte en lisant ce livre, les auteurs sont parfois durs et leurs critiques virulentes. Cette rigueur dans une pseudo autocritique (je ne pense pas en effet qu’ils s’identifient à cette gauche-là) reflète, à mon avis, une réelle volonté de changement et de progrès, la situation actuelle ne nous permettant pas de nous reposer sur quelques faibles acquis. D’ailleurs, pour faire suite aux critiques, arrive le moment des alternatives. Les lignes directrices d’une transition vers une société socialiste sont intéressantes et méritent leur lecture, même si l’on est bien obligé de constater avec un certain pessimisme que du chemin reste encore à parcourir. Cependant, comme les deux auteurs le disent en constatant la situation catastrophique dans laquelle se trouve actuellement le monde: «Ce serait un manque de courage d’une dimension historique, que de se résoudre à quoi que ce soit en deçà d’une nouvelle société socialiste, d’une nouvelle nation unie dans son intégralité, d’une nouvelle culture non de spectateurs, mais d’acteurs, d’un nouvel internationalisme entre égaux». D’ici là, bonne lecture et rendez-vous aux prochaines mobilisations. 2003 sera, j’en suis sûr, un grand cru.


Nicolas MAYSTRE

* La Face cachée de la mondialisation. L’Impérialisme au XXIème siècle. Petras James et Veltmeyer Henry; L’Aventurine, Paris, 2002 pour l’édition française