Ville de Genève

Ville de Genève : Coup de frein à la vidéosurveillance

Une initiative préélectorale du PDC, avortée en tant que telle faute d’avoir recueilli suffisamment de signatures et transformée en simple pétition, demandant le développement de la vidéosurveillance pour « plus de sécurité dans nos rues » a donné lieu à un débat de près de 3 heures à la dernière session du Conseil municipal de la Ville de Genève.

 

 

Ce volet de la politique sécuritaire de la droite a pu être momentanément stoppé par une petite majorité de 35 contre 32, les absences d’élu·e·s de droite étant plus nombreuses de celles des partis de l’« Alternative »…

 

 

« Mettre fin à l’insécurité dans nos rues »

C’est sous ce titre que les initiants ont argumenté pour soutenir le développement de la vidéosurveillance en ville de Genève qui, toujours selon les arguments des initiants, « connaît depuis quelques années une explosion de l’insécurité ».

     Pour ne pas offrir à la droite un plateau pour développer son discours sécuritaire et populiste, les Verts et les Socialistes ont proposé le débat accéléré, qui aurait fortement limité le temps consacré au débat. Une majorité du groupe Ensemble à Gauche a estimé au contraire qu’il était important de laisser le temps aussi à la gauche de développer ses arguments pour refuser la vidéosurveillance dans les espaces publics.

     L’argumentation développé à gauche dans le débat au municipal se composait de trois volets distincts:

1  L’inefficacité de la vidéosurveillance pour faire baisser, de manière générale, la délinquance ou pour réduire le sentiment d’insécurité. De nombreuses études montrent que la vidéosurveillance n’a une efficacité que sur certains espaces bien délimités et que les actes délictueux ne diminuent pas mais qu’ils se déplacent simplement. (v. l’article de Sebastian Roché dans Pour la science n. 394, août 2010). Les coûts très élevés, pour à la fois disposer d’images de haute qualité et engager du personnel pour les visionner dépassent largement les bénéfices en matière de dissuasion ou de punition.

2  La perte de liberté pour les habitant-e-s d’un espace public vidéo-surveillé est certaine. S’il est impossible de quantifier cette perte, il y a aucun doute qu’elle est réelle puisque personne ne se comporte de la même manière dans l’espace public du moment qu’il/elle sait que ses moindres faits et gestes sont enregistrés.

3  De manière générale, la vidéo-surveillance ne cible qu’un élément de l’insécurité ressentie par la population. La petite délinquance est un problème, mais la droite se garde bien d’adresser les causes profondes de la réelle insécurité économique et sociale qui pèse de plus en plus lourdement sur la population. Il était plus que nécessaire de le souligner dans ce débat.

     Si une petite majorité du Conseil a décidé de ne pas donner suite à proposition de développer la vidéo-surveillance, c’est quasiment à l’unanimité que ce même Conseil va soutenir la proposition du Conseil administratif de renforcer, avec 25 nouveaux agents de ville, la présence préventive pour réduire le nombre d’actes délictueux commis en ville. Une remarque intéressante tirée des études mentionnées dans l’article cité plus haut porte sur les sondages d’opinion qui montrent certes un soutien majoritaire au sein de la population pour les mesures de vidéosurveillance, mais : « Si on leur donne le choix, les sondé·e·s préfèrent avoir des policiers dans la rue plutôt que des caméras».

     Quoi qu’il en soit, il est évident que pour s’attaquer aux vraies causes de l’insécurité il faudra bien autre chose que des policiers… 

 

Tobia Schnebli